…. [size=150]A[/size]l Ewing semble être un scénariste soucieux de l’histoire de la Maison des Idées et de son cheptel, et l’équipe des Mighty Avengers semble en être un nouveau signe.

En effet, la création dudit groupe repose sur des fondations bien connues des lecteurs de la Marvel : une menace hors-norme (créée pour le coup au début des années 1970) pousse plusieurs super-héros à joindre leur force pour en venir à bout et, chemin faisant, découvre que l’union fait la force et décide alors de fonder un nouveaux groupe : les Mighty Avengers.
Après quatorze numéros, le scénariste prouvera qu’il a de la suite dans les idées en concluant son run sur le même principe, décliné cette fois d’une manière plutôt originale.
Mais n’anticipons pas.
…. C’est bien connu, les promesses n’engagent que ceux qui veulent bien y croire, et celle formulée par Luke Cage d’être une équipe avant tout dévouée à l’homme du commun si je puis dire, restera lettre morte ; et les Mighty Avengers feront comme le reste des équipes de l’univers Marvel.
Je ne crois pas d’ailleurs que l’installation d’un standard pour recevoir les appels ait finalement vu le jour. En tout cas on n’en entendra plus parler.

Or donc, comme c’est souvent le cas dans le monde des super-héros, ces derniers seront en grande partie à l’origine des problèmes qu’ils devront résoudre :
…… • Opposition d’ego au sujet du leadership de l’équipe
…… • Vengeance personnelle
…… • « Dispute » familiale

Reste sur la totalité des 14 numéros une menace qu’ils n’auront pas eux-mêmes créée. En dehors de celle qui les réunit.
Je me demande d’ailleurs si l’idée du super-héros, défenseur de la veuve et de l’orphelin n’est pas un vestige d’un très lointain passé ou plus simplement, une vue de l’esprit qui n’a aucun réel fondement ?
Cela dit je n’ai pas de problème avec l’idée de personnages qui finalement sont à l’origine des problèmes qu’ils affrontent.
On sait souvent ce qu’on fait, mais rarement ce que fait ce qu’on a fait.
En outre Al Ewing est un scénariste plein d’idées, qui n’hésite jamais à les partager ; et c’est un aspect très captivant.

D’autre part il n’hésite pas non plus (choix ou nécessité ?) à employer des seconds couteaux (voire des troisièmes couteaux) qui deviennent grâce à son talent des personnages qui arrivent à occuper une place de choix dans mon cœur de lecteur.
Je pense en particulier à Adam Brashear alias Blue Marvel, et à Ava Ayala aka White Tiger, dont malheureusement le potentiel ne sera pas beaucoup exploité.
C’est d’ailleurs l’une des caractéristiques des Mighty Avengers selon Ewing, la plupart des joutes agonistiques – internes ou externes aux personnages – productrices de récit sont assez vite expédiées.
Bien trop vite à mon goût.
En outre il y a peu (ou pas) d’intrigues menées de front, Al Ewing est pour le coup, plutôt adepte de la scansion que du scénario modulaire.
L’impression générale qui me reste de ces quatorze numéros est qu’ils sont très en deçà du potentiel que j’ai cru y voir.
La « responsabilité » si je puis dire, n’est du seul fait du scénariste, elle en revient aussi à l’équipe artistique.

[size=85]Greg Land dans ses œuvres[/size]
…. En effet sans avoir vu les scénarios d’Ewing, il me semble difficile quelque soit son talent et la précision de ses scripts, de réussir à donner de la densité à son run avec un dessinateur comme Greg Land par exemple, qui dessine des planches de 4 ou 5 cases maximum dont une majorité de gros plans sur des visages en utilisant le format panoramique de façon très répétitive.
Surtout que ces cases 16/9ème n’offrent que très peu d’information.
Il s’agit souvent d’un gros plan, voire de deux personnages face à face, et plein de vide autour.
Ce qui rend assez difficile de mener plusieurs intrigues de front sur la même planche par exemple.
Valerio Schiti propose des planches avec toujours aussi peu de cases mais son découpage moins routinier fait (un peu) illusion, malheureusement c’est le moment où Ewing décide de sacrifier à une longue exposition (le #006) à base de dialogues.
Salvador Larocca, que j’ai connu un peu plus inspiré, ne relève malheureusement pas non plus le niveau lors de sa prestation.
Circonstance aggravante si je peux me permettre, le travail des coloristes, Frank D’Armata en tête, n’est pas du tout à mon goût.
Si j’ai l’air de « conspuer » le versant artistique, je n’oublie pas pour autant la possible ingérence de l’éditorial.

…. Cela dit, ces quatorze numéros ne sont pas dénués d’intérêt.
J’aime beaucoup les personnages d’une manière génèrale, ils offrent des possibilités de développement et d’interactions qui peuvent se révéler très « rentables » sur le plan narratif. Et les résultats, même en dessous de mes attentes, sont déjà appréciables ici.
La floraison d’idées est aussi très encourageante, reste plus qu’à ficeler ça de manière à rendre cette profusion plus captivante (ou plus à mon goût).
L’humour qui sous-tend l’ensemble du run est aussi très agréable (dont l’allusion à Ayn Rand).

Bref, il ne reste plus qu’à espérer une équipe artistique plus conforme à ce que j’attends d’elle, et un Al Ewing plus téméraire (et moins linéaire) pour la suite qui s’intitule – mais vous le savez déjà - Captain America et les Mighty Avengers.

À suivre donc !