BLOODLINE (Ange / Alberto Varanda)

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Kevin et Lauren sont deux adolescents que rien ne différencie des autres enfants de leur âge jusqu’à un soir d’octobre où tout bascule. Des tueurs à gages font irruption chez eux, et ils deviennent alors les seuls survivants d’un abominable massacre. Seuls points de repère pour les enquêteurs, un crime similaire perpétré en Italie quelques semaines plus tôt et le cadavre d’un des tueurs retrouvé sur les lieux. Dès lors, pour le FBI et pour Mary, agent de charme et de choc, Kevin et Lauren sont le centre d’une incroyable affaire où les adolescents traqués, une mère introuvable, d’anciens agents du Mossad et l’extrême-droite allemande sont les protagonistes d’un secret mortel.

Bloodline sort en 1996 chez Vents d’Ouest, dans la collection « Global », sous la direction de Laurent Galmot. Cette collection abrite d’autres séries, parfois des créations hexagonales (comme Shekawati de Pierre-Yves Gabrion), parfois des importations, à l’image de Cybersix. Le terme « global » laisse entendre que le catalogue propose des œuvres aux influences venues des quatre coins du globe, comme on dit. Et effectivement, dans le thriller énergique que composent Ange et Varanda, on retrouve un dynamisme emprunté aux bandes dessinées américaines et japonaises.

La première édition est un pavé agrémenté d’un cahier montrant les coulisses du récit, le tout en noir & blanc. L’édition est assez étonnante pour l’époque, et annonce, avec quelques années d’avance, l’évolution du marché : des paginations accrues, des commentaires en complément, le tout avec un mixage des genres. Sauf qu’à l’époque, c’est un peu nouveau, et visiblement la collection « Global » ne rencontre pas son public, en tout cas en matière de créations locales.

Donc, l’action suit Lauren et Kevin, de jumeaux qui échappent de peu au massacre familial. Les fédéraux se chargent de l’enquête, ce qui permet d’avoir le versant des autorités. Entre les scènes consacrées aux premiers et celles dédiées aux seconds, on a droit à quelques séquences intrigantes où l’on voit évoluer ce qui s’avère être les méchants, mais l’accumulation de sous-entendus mystérieux contribue surtout à rendre l’ensemble assez flou.

L’action de ce premier recueil s’étale sur plusieurs années, si bien que les enfants deviennent des ados, que les enquêteurs évoluent (l’une d’eux tombe enceinte…). Les raisons pour lesquelles les « méchants » courent après les enfants demeurent mystérieuses, de même que la disparition de la mère est évoquée à plusieurs reprises, si bien que la révélation à la fin du tome tombe un peu comme une évidence.

Malgré les grosses ficelles, c’est assez prenant, grâce à des scènes d’action peu dialoguées et un peu décompressées (qui, par contraste, rendent assez pénibles les séquences consacrées à la vie estudiantine des deux jeunes héros). Mais le format ne connaîtra pas le succès escompté, et la série s’arrête sous cette forme…

… pour être reprise l’année suivante, en 1997, sous forme d’albums classiques en couleurs. Le contenu du tome en noir & blanc servira à deux tomes et demi de la version couleur, Varanda finissant le troisième tome et supervisant le quatrième qui sera dessiné avec Louis-Xavier Valton et finalement publié en 2002.

Il y a un « effet Image » dans cette version en couleur : autant le trait de Varanda peut paraître stylé en noir & blanc, mélangeant Jim Lee, Scott Campbell, Mike Mignola ou Frank Miller dans une approche vraiment agréable, autant la colorisation un peu tape-à-l’œil avec des couleurs saturées et des dégradés en faux aéro ruine l’ensemble et met en évidence les maladresses ou les raideurs que l’on peut voir dans son style encore vert. Heureusement, c’est Delphine Rieu qui se charge des couleurs du dernier tome, et si l’on a déjà senti une progression sur la série, on notera que le dessin bénéficie enfin de quelqu’un qui a une sensibilité pour cet aspect du métier, qui ne se limite pas à la maîtrise du logiciel.

Pour ma part, entre la colorisation qui n’est pas à mon goût et le fait que Varanda n’ait pas fini seul la série, je n’ai jamais lu la fin. Je ne connais donc pas les raisons de la traque ni les circonstances d’éventuelles retrouvailles entre les enfants et leur mère. Le premier tome en noir & blanc, pour l’instant, me convient très bien.

Jim