CARMEN CRU t.1-7 (Jean-Marc Lelong)

Certains lecteurs attentifs se sont demandés pourquoi l’héroïne de la série de Lelong, Carmen Cru, apparaît en page 18 du roman graphique de Frank Miller, Elektra Lives Again.

L’ouvrage paraît en 1990 mais le style de Miller y évolue, entre les petites cases sombres propres au style Dark Knight et les personnages émaciés et tordus, dessinés au trait, qui annoncent déjà Sin City. De là, on peut en conclure que la réalisation de cet album a pris des années. Et que l’auteur a pu être influencé par des lectures voire des rencontres. Les plus complétistes connaissent la participation de Miller au numéro 27 de Pilote & Charlie, où il signe deux pages qui en surprennent plus d’un. C’était en 1987, Miller découvrait Paris. Et il n’en a pas fallu beaucoup plus pour qu’on imagine le bédéaste américain rencontrer Lelong et repartir avec un album de Carmen Cru sous le bras.

Ma récente participation à la traduction collective de Wimmen’s Comix m’a conduit à adapter des pages de publicité présente dans le célèbre comix underground féministe, du temps où ce dernier était publié par Renegade Press. Et donc, dans le numéro 11, daté d’avril 187, j’ai découvert une annonce concernant un titre intitulé French Ice, et dans lequel on reconnaît Carmen Cru de Lelong. On y apprend d’ailleurs que cette édition dans la langue de Mark Twain est supervisée per R.J.M. Lofficier (le couple Jean-Marc & Randy). Il est fort à parier que Miller, curieux et consommateur de toutes formes de bandes dessinées, ait pu acheter une parution de Renegade Press (pourquoi pas French Ice, au demeurant). Rien n’empêche d’imaginer qu’il ait fait une petite razzia de lecture en passant en France, mais la présence d’une traduction de Carmen Cru rend la possibilité d’une découverte de la version traduite bien plus plausible que l’autre. Néanmoins, son interprétation du personnage, qui a la même pose que sur la couverture du troisième numéro de French Ice (reproduite dans la page de pub en question) pourrait laisser supposer qu’il n’avait que cette image à disposition.

Alors, Miller a-t-il découvert Carmen Cru via l’édition américaine ? Ou en visitant Paris ? Si ça se trouve, la vérité se situe dans une troisième possibilité, qui nous sera peut-être révélée un jour…

Jim