COMMENT TOUT PEUT S'EFFONDRER (Pablo Servigne / Raphael Stevens)

Comment tout peut s’effondrer : Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes

Et si notre civilisation s’effondrait ? Non pas dans plusieurs siècles, mais de notre vivant. Loin des prédictions Maya et autres eschatologies millénaristes, un nombre croissant d’auteurs, de scientifiques et d’institutions annoncent la fin de la civilisation industrielle telle qu’elle s’est constituée depuis plus de deux siècles. Que faut-il penser de ces sombres prédictions ? Pourquoi est-il devenu si difficile d’éviter un tel scénario ?
Dans ce livre, Pablo Servigne et Raphaël Stevens décortiquent les ressorts d’un possible effondrement et proposent un tour d’horizon interdisciplinaire de ce sujet fort inconfortable qu’ils nomment la « collapsologie ». En mettant des mots sur des intuitions partagées par beaucoup d entre nous, ce livre redonne de l’intelligibilité aux phénomènes de « crises » que nous vivons, et surtout, redonne du sens à notre époque. Car aujourd hui, l’utopie a changé de camp : est utopiste celui qui croit que tout peut continuer comme avant. L’effondrement est l’horizon de notre génération, c’est le début de son avenir. Qu’y aura-t-il après ? Tout cela reste à penser, à imaginer, et à vivre…

Pablo Servigne est un ancien chercheur en éthologie, aujourd’hui auteur et conférencier. Il a rédigé le rapport Nourrir l’Europe en temps de crise, commandé par le groupe Les Verts/ALE au parlement européen en 2013.

Raphaël Stevens est chercheur indépendant, diplômé d’une école de commerce (EP HEC) et en gestion de l’environnement (IEC), titulaire d’une maîtrise en science holistique. En 2011, il passe une année au Schumacher College, dans la ville en transition de Totnes et collabore depuis avec le centre d’éducation populaire Barricade (Liège), le centre de recherche en écologie Etopia (Bruxelles) et l’Institut Momentum (Paris).

Broché: 304 pages
Editeur : Le Seuil (9 avril 2015)
Collection : Anthropocène
Langue : Français
ISBN-10: 2021223310
ISBN-13: 978-2021223316
Dimensions du produit: 14,1 x 1,6 x 19 cm

Je me rends compte que je n’ai pas commenté la lecture de cet essai, qui est aussi passionnant qu’inquiétant.
Bref, les deux « collapsologues » qui le signent s’appuient sur des témoignages, des courbes et des explications scientifiques pour nous expliquer que, en gros, tous les indicateurs de la croissance de notre société de consommation (en gros, tous les piliers qui assurent jusqu’ici, peu ou prou, la stabilité de notre mode de vie) laissent entendre qu’elles peuvent s’effondrer, séparément ou en même temps, entre 2020 et 2030.
Les explications sont assez limpides, et les auteurs détaillent également des aspects que nous, simples péquins (enfin, surtout moi, disons) ne connaissons pas. Par exemple, le système d’endettement de l’industrie pétro-chimique, obligée de creuser de plus en plus profonds avec des investissements de plus en plus lourds, ce qui fait que les entreprises pétrolières sont d’ores et déjà dans l’impossibilité de rembourser leurs emprunts (alors que tout va encore assez bien en termes d’extraction).
S’ils parlent des bulles spéculatives, ils évoquent aussi les éco-systèmes, la pollution, la surproduction, etc etc. C’est donc un portrait angoissant de la société à venir qu’ils dressent, sans avoir le brasier d’optimisme que Naomi Klein cherche à entretenir de temps en temps. S’ils affirment qu’il y a des solutions et qu’il est toujours temps de « faire autrement », ils ne débordent pas d’optimisme. C’est un bouquin sans illusion.
Mais qui explique tout de même que cette fois-ci, les gens savent, l’affaire est bien documentée. Ils consacrent un chapitre au déni, au scepticisme (le « climato-scepticisme » servant d’exemple, mais ça s’applique à tous les domaines), et là encore, la démonstration est puissante.
Bref, à lire.

Jim

A ce propos, les médias alternatifs commencent à parler des maisons/bunkers que se font construire les « 1% les plus riches » en Nouvelle-Zélande… Pas très rassurant non plus… Ils détiennent certainement les infos sur les « piliers » de notre société actuelle.
En tout cas, ça devrait me plaire vu que ce qui touche à l’eschatologie m’intéresse.

Ajout : j’ai envoyé un petit message à ma libraire pour qu’elle le mette de côté et voici sa réponse :

« Déprime assurée… Je l’ai lu il y a peu. Cela m’a laissée catastrophée. Je vous conseille de vous équiper pour la lecture, genre un petit remontant à portée, histoire d’encaisser et de conserver force et courage! J’ai fait l’erreur de ne boire que du vin en lisant ce texte, j’aurais dû viser plus fort! ahahaha! Je vous le mets de côté ;-) »

:grin:

Je l’ai fini et effectivement le tableau dressé n’est pas très joyeux. La première partie présente tous les signaux et biais par lesquels la société pourrait (je laisse cette formulation que je voulais corriger mais qui prouve le réflexe de déni que nous avons presque tous) s’effondrer. Pas de grosses surprises, je les connaissais tous mais mis bout à bout ça ne laisse pas beaucoup d’espoir. Et de toute façon, c’est déjà trop tard, les courbes exponentielles démographiques, économiques, de chutes de biodiversité ont déjà crevé le plafond de notre Terre… La seule partie que je ne maîtrise pas (ou peu) concerne le volet économique (20 ans d’étude et je n’ai jamais eu 1h de cours d’économie, je me suis toujours dit qu’il y avait un problème à ce niveau).
La seconde partie, très intéressante, s’intéresse à quand l’effondrement commencera (sans y répondre clairement même si c’est plus proche que les « sceptiques » le pensent).
La dernière partie s’intéresse au déni, au scepticisme (réflexes naturels) puis à l’après et là j’avoue avoir eu un peu de mal avec le côté altruiste de l’être humain que les auteurs mettent en avant en situation de catastrophe. Je suis peut être un peu pessimiste, peut-être que j’ai trop lu le « Silver Surfer » ces derniers temps.

Merci Jim, mon été commence très bien! J’ai une patate d’enfer! :grin:

Douglas Rushkoff a écrit le compte-rendu d’une conférence dans un complexe hôtelier d’hyper-luxe face à ce que je pensais être un groupe d’une centaine de banquiers spécialisés dans l’investissement.

Ces milliardaires envisageaient d’enfermer leurs stocks de nourriture derrière des portes blindées aux serrures cryptées, dont eux seuls détiendraient les codes. D’équiper chaque garde d’un collier disciplinaire, comme garantie de leur survie. Ou encore, si la technologie le permettait à temps, de construire des robots qui serviraient à la fois de gardes et de force de travail.

[Pour en savoir +]

Et quand il ne donne pas des conférences à de riches milliardaires, Rushkoff écrit, notamment de la BD, par exemple pour feu le label Vertigo, mais pas que ; [Pour en savoir +]

Merci Artemus pour les liens!
Pas eu le temps de tout creuser mais déjà les rebonds sont intéressants (j’ai finalement lu ton article sur Alan Moore et les sigils :grin:).

Très bon passage. Le démontage des mécanismes du climato-scepticisme, ça m’a semblé un grand moment.

En même temps, je repense à ce que dit Naomi Klein sur Porto Rico dans Le Choc des utopies, et sur les mécanismes de solidarité qui s’installent. Et je me dis que si le tableau est sombre, il n’est peut-être pas aussi noir que l’on peut parfois penser.

Bah de rien. Moi, je viens de ressortir Antispéciste de la pile, le bouquin d’Aymeric Caron que j’avais commencé il y a de très longs mois, et qui s’était un peu perdu parmi mes lectures. Je sens que ça va être jouasse, ça aussi.

Jim

J’ai commencé « Fauchés : vivre et mourir pauvres » de Darren McGarvey.
Tant que j’y suis j’enchaînerai avec « Le Choc des Utopies » avant de me remettre à mes romans.
J’ai pas mal de « courts » textes de Dostoïevski que je n’ai pas encore lu. Ça va me remonter le moral! :sweat_smile:

Dans un genre voisin, je viens de finir L’Effondrement (et après) expliqué à nos enfants… et à nos parents, de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Plus simple, plus vulgarisateur, le bouquin passe en revue, sous forme de dialogues (avec des représentants de plusieurs générations) les problèmes, les causes, les conséquences et les potentielles solutions (ou comportements à adopter).
C’est pas mal, avec de beaux moments et de chouettes métaphores (par exemple, celle de la bande d’arrêt d’urgence). Servigne maintient une forme d’optimisme, qui fait partie de son discours et sert à désamorcer le catastrophisme, c’est un peu artificiel, mais il a le sens des images parlantes.
(Une très belle vision de l’école, aussi, comme machine à concurrence.)

Jim