Discutez de Cyrrus
Andreas a la réputation d’un auteur exigeant, pour ne pas dire abscons ou cryptique. Si cette réputation n’est pas méritée pour l’ensemble de ses œuvres (des one-shots comme Coutoo ou des séries comme Capricorne, si elles ont leur part de mystère, restent quand même accessibles), elle n’est pas usurpée, si l’on en juge par le diptyque Cyrrus / Mil.
Publié au milieu des années 1980 chez les Humanoïdes Associés, ce récit en deux tomes, lisibles séparément mais c’est quand même mieux de les lire tous les deux et dans l’ordre, propose une exploration des formes en même temps qu’un récit dont les clés ne sont pas fournies.
Cyrrus est archéologue. Il travaille sur des fouilles diverses, cherchant les meilleurs sites afin d’explorer le passé de civilisations perdues. Dans le même temps, il a fait transporter un temple sur un terrain adjacent à sa maison, mais la reconstruction de l’édifice s’éternise. Et justement, tout le récit semble montrer que Cyrrus est perdu dans le temps : au début, cela prend la forme d’absences, de souvenirs disparus, d’évanouissements. Les dates cessent d’avoir de l’importance, Cyrrus se réveillant à d’autres endroits et d’autres moments. Le lecteur, qui n’y comprend goutte, peut penser qu’il revit toujours la même journée, ou bien même des destins parallèles.
Parallèlement, face aux planches et aux cases de Cyrrus (qui se déroulent dans les années 1920), l’auteur nous donne à voir des séquences représentées en vignettes noir et blanc (formidable travail de hachures qui n’est pas sans rappeler Bernie Wrightson, l’une des grandes influences d’Andras), au départ des cases isolées, puis des séquences plus grandes et des planches bientôt. Au fil du récit, il est expliqué qu’il s’agit là de séquences situées dans les années 1970. Un enfant, apparemment disparu et prénommé Mil, y est en mesure d’accéder au passé, et ouvre une porte vers les années 1920, période où vit Cyrrus.
L’intrigue se résout quand Mil s’élance dans le ciel, mais sans doute aussi dans le temps, traversant l’espace en couleurs des cases consacrées à Cyrrhus. La rupture spatio-temporelle ouvre des perspectives que l’auteur n’explique pas, l’ensemble étant laissé à la discrétion du lecteur, à charge pour lui de donner une signification à un récit qui aura marqué.
Jim
Le deuxième volet du diptyque, Mil, est évoqué ici :
Jim
Grand amateur du travail d’Andreas, Guy Delcourt réédite en 1993 le diptyque Cyrrus / Mil dans une intégrale à la très jolie couverture.
Le site bédéthèque qualifie cette intégrale de « remaniée », mais ne la possédant pas, je ne sais pas s’il y a beaucoup de changements (voire quelques éclaircissements).
Jim
