DE LA TRADUCTION...

D’après le net: le Royal College of Science (et la royal school of…)

Je viens de me payer une grosse barre de rire en lisant le début d’ Avengers #15 (je vous ai dit que j’avais du retard?).

Les Vengeurs font un barbecue sur la terrasse de l’Avengers Towers et sur la première case, y en a un qui hurle « POULE! »…

Sérieux, « poule »…

Alors en VO, c’est « FORE! » c’est une interjection utilisée au golf qui pourrait se traduire par « Attention! » (jusque là, normal, et même dans la trad espagnol, c’est bien traduit par « cuidado »).

OK, je vois bien la référence au tir au pigeon, puisqu’ils tirent sur la balle tapée au club de golf… mais POULE quoi…

Peut-être que le traducteur s’est dit que « pull » risquait d’être mal prononcé…

Et même par « Attention devant ! »… Du coup, un « Chaud devant ! » aurait pu convenir, non ?
Notez que je n’ai pas lu l’extrait en question… Je n’ai donc pas le contexte ; un simple « Attention » était probablement efficace.

Tori.

A l’écoute d’un entretien de l’ami Nikolavitch pour l’émission Tumatxa animée par Photonik, il est question de traduction et d’adaptation entre autres choses et par ricochet, je me suis intéressé à la (non)traduction/adaptation des onomatopées dans les mangas.

[size=85]Minetarô Mochizuki - Maiwai, éditions Pika[/size]

Une problématique épineuse s’il en est pour tout éditeur de manga qui publie des œuvres en provenance du Japon par exemple à destination du lectorat français. En effet, les caractères japonais utilisés pour les onomatopées ne sont pas compréhensibles en l’état. La question se pose alors de leur (non)traduction/adaptation sachant que les onomatopées sont considérées à juste titre comme faisant partie intégrante du dessin d’une planche, et que leur adaptation entraîne des retouches d’une partie de l’aspect graphique de la bande dessinée. Un travail dont l’évolution au fil des ans peut se définir de la façon suivante selon BLACK studio, qui s’occupe de traduction et de lettrage pour divers éditeurs de mangas:

"]Au démarrage de l’édition du manga en France, les éditeurs ont pris le parti de remplacer toutes les onomatopées japonaises pour toucher le public plus facilement. Personne ne connaissait le manga et c’était un choix plutôt évident. Au fur et à mesure des années, le public a mûri et a fini par demander des mangas plus fidèles, ce qui impliquait, entre autres, de garder le graphisme des onomatopées.
Donc, garder une onomatopée japonaise sur la planche relève de la politique éditoriale de l’éditeur français…]
Désormais, il est convenu depuis longtemps que l’onomatopée est un dessin en soi qui appartient à l’œuvre. Dans les exemples cités, on le voit bien, c’est très graphique et cela prend part à la narration globale du manga.

On décèle dès lors plusieurs pratiques dans la production manga en France qui témoignent de différents choix effectués en fonction des éditeurs. Soit la traduction et le remplacement d’une onomatopée japonaise par un équivalent français, soit la conservation de l’onomatopée d’origine à laquelle l’éditeur peut dans certains cas accoler une traduction française sur la planche.

[size=85]Kazuo Umezu - La maison aux insectes, éditions Le lézard noir[/size]

[size=85]Takehiko Inoue - Real, éditions Kana[/size]

"]*…]Le choix de remplacer toutes les onomatopées est un choix difficile, car, pour le lettreur, c’est un travail beaucoup plus laborieux. Celui-ci devra retoucher les planches et redessiner certaines parties des cases ! En cela, on « abîme » un peu l’œuvre.

Pour rester encore plus fidèle de l’œuvre, la solution du « sous-titrage » a été trouvée et appliquée. Elle consiste globalement à mettre la traduction de l’onomatopée à côté de cette dernière. Ainsi, on garde le style graphique, mais on peut lire la traduction du japonais sans effort.
Dans le sous-titrage, il y a différentes gammes d’implication…]*

Dans le cas qui m’intéresse aujourd’hui, le choix mis en oeuvre par l’éditeur est de traduire et d’adapter autant que possible en français les onomatopées mais avec une différence de taille dans l’approche puisque l’auteur du manga lui-même redessine ses propres onomatopées pour la version française. Il s’agit d’Eldo Yoshimizu dont le manga Ryuko sera publié à l’automne par Le lézard noir, dont l’éditeur Stéphane Duval s’est récemment confié sur son métier lors d’un entretien accordé à Xavier Guibert.

[size=85]Eldo Yoshimizu - Ryuko, éditions Le lézard noir[/size]

Eldo Yoshimizu partage quelques extraits du travail en cours d’adaptation des onomatopées de Ryuko:

[size=85]Eldo Yoshimizu - Ryuko, éditions Le lézard noir[/size]

[size=85]Eldo Yoshimizu - Ryuko, éditions Le lézard noir[/size]

[size=85]Eldo Yoshimizu - Ryuko, éditions Le lézard noir[/size]

Tu pointes un sujet qui m’intéresse beaucoup, dans le Comics Interview #52 il y a un chouette article sur le travail de Willie Schubert le lettreur de Lone Wolf and Cub pour l’édition First.

Pour ma part d’un côté je pense qu’il faut « traduire » les onomatopées, surtout dans le cas d’une langue comme le japonais lu par un français par exemple, et d’un autre côté on perd le lettrage d’origine.
La note en bas de page c’est pas mal, et l’adaptation par l’auteur aussi.

Dans tous les cas j’aimerais qu’on réserve une page, comme on le fait lorsqu’il y a un glossaire, pour expliquer les onomatopées japonaises, exemples à l’appui.

Ce commentaire mériterait un sujet à lui tout seul. :wink:

Est-ce qu’il te serait possible de scanner le contenu? ça m’intéresserait de voir comment procède un éditeur américain sur ce travail d’adaptation.

Je suis aussi pour « traduire » autant que faire se peut et l’adaptation par l’auteur, procédé difficilement généralisable j’imagine, me semble le meilleur compromis possible.

Chouette article ! il en faudrait plus de ce style sur MS :slight_smile: [je commente depuis la section « article » pas le forum] Et c’est quelque chose dont on pourrait davantage parler dans les chronique/avis peut-être.
La question des onomatopées est en effet drôlement intéressante … J’ignorais que la traduction et l’adaptation en français des onomatopées pouvait être faite par le mangaka. Est-ce qu’il y a d’autre exemple de cette pratique ?
Ce procédé est un bon point, mais ça me laisse toujours un doute sur la légitimité de la traduction systématique. Il me semble que plus une onomatopée est dessinée en lien avec le dessin de la case, moins elle devrait être transformée (en effet c’est un « dessin en soi qui appartient à l’œuvre »). Je crois que je suis pour un mixte entre sous-titrage, et adaptation (par l’auteur), selon les cas ; du coup comme rien est systématique, ça oblige à prendre des décision « artistiques », et c’est plus intéressant ^^

[quote=« Benoît »]
Est-ce qu’il te serait possible de scanner le contenu? ça m’intéresserait de voir comment procède un éditeur américain sur ce travail d’adaptation. …][/quote]

Oui, mais pas dans l’immédiat, j’ai un petit soucis technique avec mon scanner. :wink:

Article intéressant, je plussoie pour plus de contenu de ce genre !

Merci. :wink:

Dans ce cas précis, je pense que la traduction est assurée par le traducteur français dans un premier temps, et que l’éditeur collabore ensuite avec l’auteur pour qu’il puisse participer au lettrage et adapter son travail tout en restant au plus proche de l’esprit de l’original.

Je ne sais pas s’il existe d’autres cas mais j’aurais tendance à penser que ce genre de collaboration rapprochée entre l’auteur et l’éditeur français serait difficilement possible chez de gros éditeurs avec un certain volume de production, qui passent de toute façon le plus souvent par un process impliquant des intermédiaires plutôt que l’auteur lui-même. Sans parler du rythme de production soutenu sur lequel fonctionne les gros éditeurs japonais, qui imposent de fait une cadence de travail incroyable aux auteurs et à leurs assistants.

Stéphane Duval gère une petite structure indépendante avec Le lézard noir qui fonctionne sur un modèle économique différent des éditeurs traditionnels (il a une autre activité professionnelle à côté pour avoir des revenus stables). C’est quelqu’un qui aime aller au contact avec les éditeurs, les auteurs (quand c’est possible) et qui peut parfois déboucher sur ce genre de collaborations j’ai l’impression.

En temps normal, je suis de cet avis mais quand je vois le travail en cours pour Ryuko, on arrive à quelque chose qui me semble proche de l’original tout en en respectant l’esprit. C’est peut-être une voie supplémentaire à explorer dans cette étape d’adaptation.

[quote=« artemus dada »]

[quote=« Benoît »]
Est-ce qu’il te serait possible de scanner le contenu? ça m’intéresserait de voir comment procède un éditeur américain sur ce travail d’adaptation. …][/quote]

Oui, mais pas dans l’immédiat, j’ai un petit soucis technique avec mon scanner. :wink:[/quote]

Rien ne presse. :slight_smile: c’est très gentil de ta part d’accepter. Merci!

Je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui, mais il y a encore une petite quinzaine d’années, les éditeurs japonais ne fournissaient pas aux adaptateurs étrangers de matériel très performant pour les versions étrangères. Dans le meilleur des cas, les éditeurs étrangers recevaient au mieux des films d’impression (ce sont des plaques en plastique transparent sur lesquelles apparaît le trait noir correspondant à la page imprimée), au pire des impressions papier voire des exemplaires d’origine qu’il fallait démonter avant de procéder à la numérisation en interne. Les éditeurs nippons capables d’envoyer des CD étaient très rares, et même dans ce cas, les fichiers étaient aplatis, à savoir qu’aucun élément de la page (bulles, textes, onomatopées) n’était séparé. Même quand les mangakas utilisent l’informatique.
J’imagine que les choses ont changé (notamment parce que les auteurs japonais commencent à intégrer l’informatique dans leur boîte à outil personnelle), mais ça donne une idée de la difficulté technique d’adaptation. Cela revient à effacer des éléments, à en recréer d’autres, bref un temps colossal avec des opérations ingrates, répétitives et casse-tête. J’ai toujours pensé que le fait de laisser les onomatopées nippones n’est pas tant dû à un quelconque respect du matériau d’origine qu’à une volonté de minimiser la charge de travail.
Le problème se rencontrait également pour l’adaptation des fumetti. Bonelli envoyait aussi des exemplaires en grand nombre, certains servant à la numérisation (et d’autres au traducteur, au lettreur…). Mais la somme de travail est moindre : on n’a pas besoin de retourner les planches, les onomatopées italiennes sont souvent compréhensibles par les Français…
Dans la première moitié des années 2000, DC était le dernier éditeur américain à fournir des CD, tous les concurrents envoyant des fichiers informatique depuis belle lurette. Je trouvais que l’éditeur de Superman en était encore au Moyen-Âge, mais je me rassurais en regardant du côté du Japon ou de l’Italie, où les méthodes relevaient de pratiques préhistoriques.

Jim

Je suis, quant à moi pour le sous-titrage (ou l’adaptation par l’auteur) dans la majorité des cas. l’onomatopée fait, dans le manga, souvent partie intégrante du dessin (surtout dans les titres d’action)… Et, en tout cas, il faudrait que l’onomatopée française ait le même style graphique que la japonaise.

Je crois que c’est toujours le cas de la majorité de ce que reçoivent les éditeurs français. Il y a quelques exceptions (pour Vinland Saga, Kurokawa reçoit des planches sans les onomatopées, par exemple.).

En tout cas, on est loin du temps où les éditeurs modifiaient l’onomatopée japonaise pour la faire ressembler à une onomatopée française ou, pire, appliquaient une grosse onomatopée qui masquait une partie du dessin d’origine.

Sinon, pour rester dans le thème des onomatopées dans les mangas : Toriyama a marqué les esprits en utilisant beaucoup d’onomatopées en anglais, alors que les japonais avaient l’habitude de n’avoir que des onomatopées dans leur langue. Je ne sais pas s’il était le premier (probablement pas), mais il en utilisait beaucoup, et comme c’était sur un titre très populaire (je ne sais plus s’il le fait sur Dr. Slump… pas au début, en tout cas, où il utilise une onomatopée en japonais dont un personnage se sert physiquement (et le « Ncha cannon » d’Arale est en hiragana). En tout cas, il me semble qu’il en utilise aussi dans certaines de ses histoires courtes)…

Tori.

Je suis aussi pour le sous titrage des onomatopées. Reste le problème de celles qui n’ont pas d’équivalent français car la quantité d’ onomatopées japonaises est phénoménale. Par rapport à d’autres pays comme la France où la bande dessinée a moins de place dans la culture et où le style franco-belge nécessite moins d’onomatopées tout simplement. Dans tout les cas je verrai toujours les modifications non obligatoires comme une atteinte inutile à l’oeuvre, ce n’est pas pour rien qu’ Akira vient d’être ré-édité avec les onomatopées japonaises, les lecteurs actuels sont en demande de manga plus fidèles à leur version d’origine. Exit les versions d’il y a 20/25 ans où l’on cherchait systématiquement à franciser le plus possible dans le but de vendre plus facilement( sens de lecture occidental, onomatopées remplacées et/ou supprimées, francisation des noms, des villes, des aliments ou des autres détails culturels. Désormais le public a « l’expérience » nécessaire pour apprécier des versions plus fidèles.

C’est à dire ???

Curieux de dire ça pour l’un des pays les plus consommateur du genre et le plus divers.

Pour avoir fréquenté quelques studios de lettrage pour mangas, sociétés pratiquant des tarifs concurrentiels mais également un travail assez discutable (en gros, on n’est pas cher, on se contente donc de faire rentrer le texte dans les bulles, s’il est trop long on réduit le bloc jusqu’à ce qu’il entre, et on ne touche à rien d’autre), j’aurais tendance à dire, hélas, que le choix de ne pas toucher aux onomatopées japonaises n’est pas dicté par un parti pris esthétique ou culturel, mais par la dure réalité du pognon, le respect de l’œuvre d’origine n’étant chez beaucoup qu’un paravent.
L’enthousiasme sincère et militant d’un Dominique Véret n’est pas partagé par tous, et la concurrence obligeant les éditeurs à rogner sur les différents postes afin de proposer des produits sans exploser les coûts, nombreux sont ceux à dissimuler le boulot mal fini sous le tapis du culturel.

Jim

Pour le manga, il y a aussi le problème de l’orientation des bulles, qui sont verticales alors que le texte qu’on cherche à y mettre est horizontal dans la version traduite (il faudrait, comme les onomatopées, les avoir dans un calque différent pour pouvoir en modifier la forme).

C’est assez vrai… Mais ils essaient, en général, également de ne pas trop mécontenter le lecteur, qui est aussi l’acheteur.

Je pense que Grégoire Hellot (pour Kurokawa), est à ranger dans la même catégorie que Dominique Véret… D’ailleurs, chez Kurokawa, le parti pris est de tout traduire/adapter dans l’œuvre (à part parfois, bizarrement, le titre du manga lui-même).

Tori.

De l’intérêt d’une relecture évitant une version française très visionnaire

http://img4.hostingpics.net/pics/124234capfaucon.jpg

Captain America #154 - Octobre 1972

edit : Tirées de l’intégrale Captain America 1972

:laughing:

Et les références de cette belle version française, sans indiscrétion ?.. :mrgreen:

edit : C’est bien ce que je pensais. Je vois que les ficus de chez Panini sont toujours aussi actifs… 8)