Discutez de Des Belles et des Bêtes
Recueil d’histoires courtes tournant autour des drames liés à un couple (séparations, retrouvailles, deuils, abandons…) cet album méconnu de 1986 est une démonstration des talents graphiques de Michel Riu.
L’enjeu ici est de faire de la bande dessinée en cassant les outils de la bande dessinée. Très peu de bulles (la plupart des récits utilisent des voix off, parfois très déconstruites), la page n’est pas emplie entièrement, utilisant le vide pour jouer sur la composition, et parfois même ce sont les décors (portes, plinthes…) ou les vêtements des personnages qui délimitent les vignettes.
L’auteur, au-delà de cet exercice formel, parvient à créer des petites histoires à chute dont la dynamique fonctionne bien, et à varier les tons : mention spéciale à la deuxième histoire qui raconte une rupture et qui met en avant le cynisme du personnage masculin, qu’on ne voit pas mais qui sert de narrateur.
L’album, dans la période de sa sortie, avait de quoi séduire les amateurs de comics. Les outils narratifs (notamment une voix off à laquelle Riu fait subir les pires outrages) et les compositions, à commencer par ces pages intégrant du vide, rappellent, de loin, le travail de Frank Miller entre autres. Et bien entendu, le dessin au trait, réaliste et rond, n’est pas sans évoquer celui de Geoff Darrow, moins la minutie du détail. Une belle élégance pour un album singulier.
Jim