DOOMSDAY CLOCK #1-12 (Geoff Johns / Gary Frank)

Oui ça a déjà commencé, mais la pilule fut dure à faire passé malgré tout, là je vois ça comme une seconde tentative pour allé plus loin par la suite.

Par principe, j’imagine qu’aucune suite n’est inenvisageable a priori (et l’exemple de « 2010 », une suite très honnête et sans prétentions quant au fait d’égaler son modèle, est effectivement parlant) ; dans le cas de « Watchmen », deux problèmes se posent à mon avis : formellement le récit est parfaitement bouclé sur lui-même et n’appelle aucune suite, et surtout il y a la question des droits. Moore et Gibbons ont bel et bien été arnaqués par DC.
Les gens (comme Bendis) qui utilisent l’argument « ils ont signé un contrat, ils n’avaient qu’à le lire » sont à côté de la plaque. Moore et Gibbons étaient censés récupérer les droits de « Watchmen » à la fin du cycle de réimpression en TPB ; or cette fin n’est jamais survenue, ça continue encore. Moore et Gibbons ne pouvaient le savoir, c’est précisément le succès de « Watchmen » qui a changé la donne par rapport à la politique des réimpressions…
Fut un temps où les auteurs, par « solidarité », n’auraient jamais touché à « Watchmen ».

Tout a fait.

Et franchement apres les jurisprudence Mantis, Thanos, Elektra… on sait qu un editeur finira par utiliser des personnages qui lui appartiennent même si un regime avait promis que non.
En plus là, on parle de Watchmen… surement la plus grosses ventes tp de DC ou pas loin.

Le jour où Miller et Gaiman refuseront les suites de DK et Sandman… ils les fileront à un autre.

Johns utilise le plus simple pour expliquer tant de turpitudes surtout qu on a du lui demander des les utiliser un jour.

[quote=« BenWawe »]Bien sûr que Johns ne se prend pas pour Moore - mais bien sûr que DC, à la recherche d’un élément pour expliquer/défaire New52 en reliant à l’avant rêvé par les fans et ayant besoin de faire le buzz, a fini par en venir aux Watchmen, figures « mythiques » pour le poids (légitime) de la BD éponyme dans la culture générale et qui, en les utilisant, leur permettrait de faire parler.
Il ne faut rien y chercher d’autre.[/quote]

Sur le fait que tout ça est monté pour créer du buzz (y compris du bad buzz), on est d’accord.
En revanche, je crois qu’il y a eu et qu’il y a encore chez des scénaristes de Dc cette envie de se mesurer à la légende Moore, et donc pour cela de se servir de « Watchmen ». Donc, pour moi, Johns, comme Morrison à sa manière, a envie de s’y coller, sans avoir besoin qu’on le lui impose vu sa situation haut placée dans l’organigramme de DC (en tant que « chief creative officer », il ne reçoit d’ordre que de lui-même).

Je précise que je n’ai rien contre Johns : la manière dont il a revigoré « Green Lantern » pour en faire durant tout son run un perso de premier plan est exemplaire, même si on peut ensuite critiquer par le détail les histoires (et je ne les ai pas toutes lues). Ses deux runs sur la « JSA » et « Justice Society of America » font partie de ce que j’ai préféré lire chez DC en leur temps.
On ne peut lui nier une grande connaissance de la mythologie DC, une vision, une affection et une volonté d’organiser tout ça de manière cohérente et excitante. Si, chez Marvel, on peut discuter de qui est le véritable architecte en chef, le scénariste qui a cette vue d’ensemble à la fois du passé, du présent et de l’avenir, Johns chez DC occupe ce poste.
Mais bon, il ne s’agit pas que de de position hiérarchique, de culture maison, d’amour des comics : il est aussi question de talent. Or, personne, je crois, ne peut dire que Johns en a autant que Moore. L’un est un scénariste efficace, l’autre est un auteur qui a révolutionné les comics : ça donne une idée du gouffre qui les sépare et donc du souci posé par cette idée.

Mais ça n’empêche que cette provocation récurrente, qui consiste à remâcher « Watchmen », à s’en servir pour justifier ici un reboot, ici un gros coup commercial, même assumée par Johns, est aussi navrante que facile. Comme l’a souligné Jim, si DC cherche un personnage censé être l’auteur de la refonte de l’univers DC, il n’y a pas que le Dr. Manhattan, mais en le choisissant, ça revient à dire à Alan Moore et à ceux qui estiment que « Watchmen » a un caractère sacré : « F*** you ! »

[quote=« Photonik »]Par principe, j’imagine qu’aucune suite n’est inenvisageable a priori (et l’exemple de « 2010 », une suite très honnête et sans prétentions quant au fait d’égaler son modèle, est effectivement parlant) ; dans le cas de « Watchmen », deux problèmes se posent à mon avis : formellement le récit est parfaitement bouclé sur lui-même et n’appelle aucune suite, et surtout il y a la question des droits. Moore et Gibbons ont bel et bien été arnaqués par DC.
Les gens (comme Bendis) qui utilisent l’argument « ils ont signé un contrat, ils n’avaient qu’à le lire » sont à côté de la plaque. Moore et Gibbons étaient censés récupérer les droits de « Watchmen » à la fin du cycle de réimpression en TPB ; or cette fin n’est jamais survenue, ça continue encore. Moore et Gibbons ne pouvaient le savoir, c’est précisément le succès de « Watchmen » qui a changé la donne par rapport à la politique des réimpressions…
Fut un temps où les auteurs, par « solidarité », n’auraient jamais touché à « Watchmen ».[/quote]

Je crois, sur ce point, que Moore et Gibbons (même si Gibbons a approuvé qu’on retouche à « Watchmen » à l’époque de « Before Watchmen ») ont péché par naïveté. Bien entendu, nul ne pouvait prévoir quel succès aurait « Watchmen » à l’époque, et donc le contrat signé avec DC, impliquant la restitution des droits à la fin du cycle de réimpressions, était correct.
Mais tout ça a évidemment totalement changé quand « Watchmen » est devenu ce phénomène d’édition. Si Moore et Gibbons pensaient encore alors pouvoir récupérer leurs droits, c’est désarmant.
L’époque n’était pas la même non plus : aujourd’hui, je pense (je ne suis pas spécialiste, je peux me tromper) que beaucoup d’auteurs se méfient davantage au moment de signer leur contrat avec les éditeurs, a fortiori quand ils acceptent à la fois du « work for hire » et obtiennent de produire du « creator-owned » (ou de travailler pour une autre maison, tout en étant exclusif chez un des « big two »).
Est-ce que Moore et Gibbons bénéficiaient de bons conseils, d’agents compétents, d’avocats, pour s’assurer que DC tiendrait sa promesse, qu’il n’abuserait pas de réimpressions permanentes pour ne jamais leur rendre les Watchmen ? A l’évidence non.
Donc l’argument de Bendis n’est pas cynique : il me semble que Moore et Gibbons, incapables de prédire le succès de leur oeuvre et mal conseillés juridiquement, n’ont pas pu prévoir non plus les finasseries contractuelles qui se sont retournées contre eux. Actuellement, les cadors comme Bendis, Millar, Johns, Morrison, Brubaker, Aaron, Rucka, Waid, etc. doivent avoir des contrats blindés, remplis de clauses, d’alinéas, à la fois pour s’assurer que Marvel et DC ne vont pas les embrouiller mais aussi tout simplement pour durer au sein d’une maison dans laquelle la concurrence entre auteurs est forcément féroce (même si, « officiellement », tout le monde s’adore et écrit en respectant ce que le voisin écrit). Et c’est logique : tous ces auteurs ont appris des mésaventures de leurs prédécesseurs.
Bref, tout ça est difficile à juger d’un bloc. Bien entendu, on ne peut que se sentir solidaire de Moore (quoiqu’on pense du bonhomme) parce que l’attitude de DC est tout sauf élégante. Mais si Moore avait écrit « Watchmen », fort d’une expérience plus solide, avec déjà des soupçons sur des manigances éditoriales, il aurait certainement été plus prudent.

Quant au risque de donner une suite à « Watchmen »… Sur le papier, ça paraît effectivement compliqué. Déjà, Rorschach est mort, donc ce ne serait plus vraiment l’équipe telle qu’on l’a connaît, mais un scénariste trouverait un moyen de le ressusciter (le plus simple serait qu’un personnage inédit reprenne son nom et son apparence masquée) - et le compte serait bon.
Pour quelle histoire ? Je suis sûr que bien des auteurs et des fans ont imaginé une intrigue aussi tordue que celle d’Ozymandias.
Mais effectivement, ce serait la provoc’ ultime, cet « After Watchmen » ou « Watchmen 2 ». Là, en fait, ce qui est choquant avec ce « Doomsday Clock », c’est le recours à Dr. Manhattan comme deus ex machina, et plus précisément le fait qu’en utilisant le perso pour expliquer/justifier « Rebirth » (en partie ou en totalité), ça le banalise au lieu de le grandir. Et c’est un coup de pub plus retentissant que de se servir du sorcier Shazam, du Phantom Stranger, de Ganthet, du High Father, du Spectre.

En même temps, durant la longue préparation de « Before Watchmen », il avait été envisagé de reprendre littéralement des idées jetées en l’air par Moore lui-même (le journal de guerre du Comédien, les aventures de Rorschach avec Nite Owl puis en solo). Et « Minutemen » de Cooke était le seul projet que Moore prévoyait vraiment d’ajouter à « Watchmen » - peut-être pas sous la forme que lui a donnée Cooke, mais en tout cas avec le même objectif (détailler le passé de ce groupe, de sa formation à sa dissolution).

[quote=« KabFC »]

[quote=« BenWawe »]
Après, je suis d’accord avec toi sur le principe - mais Before Watchmen étant déjà passé par là, produisant des comics relativement nazes et sans intérêt, derrière un vernis de respect cachant pathétiquement l’appât du gain, je pars du principe que la « pureté originelle » de Watchmen est déjà brisée ; alors les réutiliser pour justifier le changement de DC, c’est pas moins moche ou con que de faire Before Watchmen.[/quote]

Oui ça a déjà commencé, mais la pilule fut dure à faire passé malgré tout, là je vois ça comme une seconde tentative pour allé plus loin par la suite.[/quote]

Certes, Doomsday Clock va plus loin - mais, au fond, assume et est plus sincère et honnête que Before Watchmen.
Before Watchmen piétinait Watchmen et n’était qu’une tentative commerciale, « cachée » derrière un vernis de « qualité », DC indiquant mandater des artistes spécifiques pour chaque mini-série, pour « respecter » le matériel ; mais ce sont des conneries, ils ont fait ça pour récolter du fric, et ça a marché.
A la limite, Doomsday Clock me semble plus sincère, oui : là, DC ne se cache derrière aucun vernis artistique « respectable », ils assument réutiliser comme des cochons Watchmen pour gérer leur foutoir ; soit. C’est tout aussi bon, mais plus direct et j’ai moins l’impression d’être pris pour un con.

[quote=« Photonik »]Par principe, j’imagine qu’aucune suite n’est inenvisageable a priori (et l’exemple de « 2010 », une suite très honnête et sans prétentions quant au fait d’égaler son modèle, est effectivement parlant) ; dans le cas de « Watchmen », deux problèmes se posent à mon avis : formellement le récit est parfaitement bouclé sur lui-même et n’appelle aucune suite, et surtout il y a la question des droits. Moore et Gibbons ont bel et bien été arnaqués par DC.
Les gens (comme Bendis) qui utilisent l’argument « ils ont signé un contrat, ils n’avaient qu’à le lire » sont à côté de la plaque. Moore et Gibbons étaient censés récupérer les droits de « Watchmen » à la fin du cycle de réimpression en TPB ; or cette fin n’est jamais survenue, ça continue encore. Moore et Gibbons ne pouvaient le savoir, c’est précisément le succès de « Watchmen » qui a changé la donne par rapport à la politique des réimpressions…
Fut un temps où les auteurs, par « solidarité », n’auraient jamais touché à « Watchmen ».[/quote]

L’honneur est, malheureusement, une valeur en disparition.

[quote=« penitent »]

[quote=« BenWawe »]Bien sûr que Johns ne se prend pas pour Moore - mais bien sûr que DC, à la recherche d’un élément pour expliquer/défaire New52 en reliant à l’avant rêvé par les fans et ayant besoin de faire le buzz, a fini par en venir aux Watchmen, figures « mythiques » pour le poids (légitime) de la BD éponyme dans la culture générale et qui, en les utilisant, leur permettrait de faire parler.
Il ne faut rien y chercher d’autre.[/quote]

Sur le fait que tout ça est monté pour créer du buzz (y compris du bad buzz), on est d’accord.
En revanche, je crois qu’il y a eu et qu’il y a encore chez des scénaristes de Dc cette envie de se mesurer à la légende Moore, et donc pour cela de se servir de « Watchmen ». Donc, pour moi, Johns, comme Morrison à sa manière, a envie de s’y coller, sans avoir besoin qu’on le lui impose vu sa situation haut placée dans l’organigramme de DC (en tant que « chief creative officer », il ne reçoit d’ordre que de lui-même).

Je précise que je n’ai rien contre Johns : la manière dont il a revigoré « Green Lantern » pour en faire durant tout son run un perso de premier plan est exemplaire, même si on peut ensuite critiquer par le détail les histoires (et je ne les ai pas toutes lues). Ses deux runs sur la « JSA » et « Justice Society of America » font partie de ce que j’ai préféré lire chez DC en leur temps.
On ne peut lui nier une grande connaissance de la mythologie DC, une vision, une affection et une volonté d’organiser tout ça de manière cohérente et excitante. Si, chez Marvel, on peut discuter de qui est le véritable architecte en chef, le scénariste qui a cette vue d’ensemble à la fois du passé, du présent et de l’avenir, Johns chez DC occupe ce poste.
Mais bon, il ne s’agit pas que de de position hiérarchique, de culture maison, d’amour des comics : il est aussi question de talent. Or, personne, je crois, ne peut dire que Johns en a autant que Moore. L’un est un scénariste efficace, l’autre est un auteur qui a révolutionné les comics : ça donne une idée du gouffre qui les sépare et donc du souci posé par cette idée.[/quote]

Sincèrement, je ne suis pas sûr que Johns ait envie de se « mesurer » à Moore : en définitive, Johns est un fan qui a réussi son rêve, raconter les aventures de ses personnages préférés ; au-delà de l’appréciation personnelle qu’on peut avoir de lui (et j’apprécie, sincèrement, ce qu’il fait, car j’ai un attachement aux personnages qu’il manipule), il me semble que c’est là définitivement ce qu’"'est" Geoff Johns - un fan qui a réussi, et qui veut faire plaisir aux fans.
D’où l’absence (ou quasi absence si je me trompe, mais je ne pense pas) de projet indépendant ou « personnel » ; d’où sa constance dans le travail sur des personnages très âgés, qui ont bercé son enfance.

Au fond, Johns ne veut que faire « vivre » les personnages qui le hantent depuis qu’il est jeune ; là où Moore a/avait une approche du medium, une envie de le changer, de bouleverser les codes, de s’amuser avec, d’être extrêmement ambitieux dans son approche du comics et de la réalité.
Moore joue et veut briser/modifier les lignes ; Johns ne veut rester que dans les lignes, et s’amuser dedans.

En ce sens, je doute sincèrement que Johns ait envie de se « mesurer » - au fond, je pense qu’ils ne sont pas dans la même division et la même approche.
C’est plus un Morrison ou un King, qui ont une approche des lignes et une réflexion sur le fond et la forme du comics, qui auraient cette envie-là ; pas Johns.

Je rebondis sur ce passage, lors d’une discussion que j’avais initié je ne sais plus ou sur le forum, j’avais dit que les nouveaux scénaristes n’avaient plus d’amour pour les personnages. et effectivement Johns reste l’un des rares à vouloir continuer de jouer avec.
Je suis pas un immense fan de Johns loin s’en faut, mais il est vrai que le bonhomme apprécie jouer avec l’univers DC et continueras de faire avec, sans effectivement vouloir sortir du cadre établit (ce qui n’est pas un reproche).

Sur les deux points que tu soulèves, Ben :

  • « Before Watchmen » : je me rappelle que lorsque ça avait été annoncé, j’étais furieux parce que je considérais ça vraiment comme un sacrilège, une affaire purement commerciale. Je ne doute pas que c’était la motivation éditoriale principale. Mais je dois aussi reconnaître qu’à la lecture, j’ai été favorablement surpris - je n’ai pas tout lu (j’ai zappé « Comedian » et « Rorschach »), mais « Minutemen » était parfait (en même temps, avec Cooke, peu de risque de ratage), « Silk Spectre » était un vrai bonbon (merci Amanda Conner), et « Dr. Manhattan » quand même épatant (JMS se débrouillait bien et Hughes a livré des pages à tomber). « Nite Owl » valait surtout pour les Kubert (enfin… Pour Joe K., toujours génial), tout comme « Ozymandias » devait l’essentiel à Jae Lee.
    Donc, j’ai avalé mon chapeau : finalement, c’était chouette, sympa à lire, avec de superbes dessinateurs, parfois des scénaristes inspirés, du moins respectueux. Et puis ça existait sans prétendre expliquer ou justifier quoi que ce soit d’autre, ce n’était pas là pour servir de rustine au nouveau reboot, aucun Justice Leaguers ne passait par là. Tout compte fait, ça n’abîmait pas « Watchmen » : c’était inutile, superflu, mais pas dégradant. DC a gagné beaucoup de dollars certainement avec tout ça, et ils ont même fait du rab (mais sympa aussi : « Dollar Bill » avec Rude « The Dude » ou « Moloch » avec Risso).

Là, ça me gêne davantage parce qu’il y a cette volonté affichée, assumée, décomplexée (donc maintenant, c’est clair, Johns et compagnie n’en ont vraiment plus rien à foutre de la valeur sacrée de « Watchmen ») d’associer l’oeuvre originale au tout-venant du DC-verse. Dr. Manhattan sert à (re)coller les morceaux, et il est choisi, lui, parce que ça va provoquer du buzz : c’est vulgaire, et grossier, la totale. Moore et tous les « Watchmenolatres », préparez la vaseline, vous allez en reprendre un coup !

  • Johns vs. Moore : ton analyse sur la carrière de Johns me plait bien, elle est juste. Et je reconnais, j’estime, son dévouement, son affection pour DC, ses héros. Avec la position hiérarchique qu’il occupe, et sa connaissance de cet univers, il a le pouvoir d’organiser tout ça. C’est beaucoup de pouvoir (et donc de responsabilité…) pour un seul homme, mais si ça marche, il gagne légitimement, et si ça ne marche pas, le coupable est tout désigné. C’est plus évident que chez Marvel où Axel Alonso comme Joe Q. et Tom Brevoort avant lui est une cible plus claire que les scénaristes finalement.
    Toutefois, je crois, mais c’est tentant, que se mesurer à Moore (comme on pourrait le faire avec Miller, voire Gaiman - même s’il a un statut moins iconique : Gaiman, c’est « Sandman » évidemment, et ce n’est pas rien, mais je n’ai pas l’impression que ça compte autant, sentimentalement, que « Watchmen » ou le run de Miller sur « DD » ou « The Dark Knight ») est irrésistible dès qu’on en a l’occasion. Pas forcément en espérant faire mieux, mais aussi bien, aussi percutant. C’est un peu comme se mesurer aux créations de Kirby, Eisner, mais de manière plus concentrée parce que Moore, pour tout le monde, fans ou pas, connaisseurs ou pas, c’est « Watchmen ». Arriver à sortir un truc qui ne soit simplement pas ridicule, c’est un défi difficile à refuser. Donc, ça doit quand même un peu démanger Johns : il est arrivé au top (des runs marquants, un rôle haut placé chez DC, une réputation flatteuse chez les fans), quand on en est là, que reste-t-il ? « Challenger » un maître reconnu, mythique même - pas forcément en l’imitant, mais en reprenant une de ses créations et en cherchant à l’intégrer à quelque chose de manière habile.
    Le problème étant que là, le procédé est quand même très lourdingue : établir « Rebirth » (soit la tentative de réconcilier anciens et modernes, déçus du « New 52 » et adeptes d’un vrai renouveau) en emballant ça grâce à « Watchmen ».

Ce qui serait sympa, c’est que DC reste dans la même veine que « The Button » à savoir ne pas montrer « God » à la manière d’un « c’est lui mais vous ne le verrez pas ».

Bon après à la lecture, il n’y a rien de scandaleux. Comme lorsque « Before Watchmen » est sorti, en somme, l’œuvre originale reste et restera intouchable.

[quote=« Hush »]" à savoir ne pas montrer « God » à la manière d’un « c’est lui mais vous ne le verrez pas ».
[/quote]

Comment on interprète ça ?

[quote=« penitent »]Sur les deux points que tu soulèves, Ben :

  • « Before Watchmen » : je me rappelle que lorsque ça avait été annoncé, j’étais furieux parce que je considérais ça vraiment comme un sacrilège, une affaire purement commerciale. Je ne doute pas que c’était la motivation éditoriale principale. Mais je dois aussi reconnaître qu’à la lecture, j’ai été favorablement surpris - je n’ai pas tout lu (j’ai zappé « Comedian » et « Rorschach »), mais « Minutemen » était parfait (en même temps, avec Cooke, peu de risque de ratage), « Silk Spectre » était un vrai bonbon (merci Amanda Conner), et « Dr. Manhattan » quand même épatant (JMS se débrouillait bien et Hughes a livré des pages à tomber). « Nite Owl » valait surtout pour les Kubert (enfin… Pour Joe K., toujours génial), tout comme « Ozymandias » devait l’essentiel à Jae Lee.
    Donc, j’ai avalé mon chapeau : finalement, c’était chouette, sympa à lire, avec de superbes dessinateurs, parfois des scénaristes inspirés, du moins respectueux. Et puis ça existait sans prétendre expliquer ou justifier quoi que ce soit d’autre, ce n’était pas là pour servir de rustine au nouveau reboot, aucun Justice Leaguers ne passait par là. Tout compte fait, ça n’abîmait pas « Watchmen » : c’était inutile, superflu, mais pas dégradant. DC a gagné beaucoup de dollars certainement avec tout ça, et ils ont même fait du rab (mais sympa aussi : « Dollar Bill » avec Rude « The Dude » ou « Moloch » avec Risso).

Là, ça me gêne davantage parce qu’il y a cette volonté affichée, assumée, décomplexée (donc maintenant, c’est clair, Johns et compagnie n’en ont vraiment plus rien à foutre de la valeur sacrée de « Watchmen ») d’associer l’oeuvre originale au tout-venant du DC-verse. Dr. Manhattan sert à (re)coller les morceaux, et il est choisi, lui, parce que ça va provoquer du buzz : c’est vulgaire, et grossier, la totale. Moore et tous les « Watchmenolatres », préparez la vaseline, vous allez en reprendre un coup ![/quote]

Je te suis sur ton raisonnement, mais pas sur le ressenti.
A titre personnel, j’ai très mal « vécu » Before Watchmen : au-delà de la reprise des personnages de Watchmen pour raconter du vide (aucune mini-série n’est justifiée : même Minutemen, même Doctor Manhattan n’avaient pas lieu d’être ; l’histoire originale dit tout ce qu’il faut savoir, laissant aux lecteurs le soin de combler les blancs ; le fait de raconter tout ou d’en rajouter fut une insulte à mon intelligence et à mon « apport » inconscient lors de la lecture de Watchmen), c’est bien le fait que DC ait voulu cacher cet appât du gain bête et méchant par un « vernis » de respectabilité.
En mandatant des Cooke, Azzarello, Bermejo, Straczynski ou Hughes, DC a voulu attirer les fans avec : « hé, on n’est pas si méchants, on reprend honteusement Watchmen mais on met des artistes qui racontent des trucs »… mais en fait non.

Au-delà de leur qualité intrinsèque, ces mini-séries n’ont pas d’intérêt, et pas de sens en définitive.
Or, DC ne l’a pas assumé et s’est « caché » derrière ce vernis, pour jouer la vierge effarouchée en cas de critique sincère.

De ce fait, Before Watchmen a déjà « tout cassé »… et Doomsday Clock a mes « préférences », dans le sens où c’est plus direct, plus simple, plus assumé en fait. On me prend moins pour un con ; je n’aime toujours pas l’idée, mais je me sens moins insulté.

[quote=« penitent »]- Johns vs. Moore : ton analyse sur la carrière de Johns me plait bien, elle est juste. Et je reconnais, j’estime, son dévouement, son affection pour DC, ses héros. Avec la position hiérarchique qu’il occupe, et sa connaissance de cet univers, il a le pouvoir d’organiser tout ça. C’est beaucoup de pouvoir (et donc de responsabilité…) pour un seul homme, mais si ça marche, il gagne légitimement, et si ça ne marche pas, le coupable est tout désigné. C’est plus évident que chez Marvel où Axel Alonso comme Joe Q. et Tom Brevoort avant lui est une cible plus claire que les scénaristes finalement.
Toutefois, je crois, mais c’est tentant, que se mesurer à Moore (comme on pourrait le faire avec Miller, voire Gaiman - même s’il a un statut moins iconique : Gaiman, c’est « Sandman » évidemment, et ce n’est pas rien, mais je n’ai pas l’impression que ça compte autant, sentimentalement, que « Watchmen » ou le run de Miller sur « DD » ou « The Dark Knight ») est irrésistible dès qu’on en a l’occasion. Pas forcément en espérant faire mieux, mais aussi bien, aussi percutant. C’est un peu comme se mesurer aux créations de Kirby, Eisner, mais de manière plus concentrée parce que Moore, pour tout le monde, fans ou pas, connaisseurs ou pas, c’est « Watchmen ». Arriver à sortir un truc qui ne soit simplement pas ridicule, c’est un défi difficile à refuser. Donc, ça doit quand même un peu démanger Johns : il est arrivé au top (des runs marquants, un rôle haut placé chez DC, une réputation flatteuse chez les fans), quand on en est là, que reste-t-il ? « Challenger » un maître reconnu, mythique même - pas forcément en l’imitant, mais en reprenant une de ses créations et en cherchant à l’intégrer à quelque chose de manière habile.
Le problème étant que là, le procédé est quand même très lourdingue : établir « Rebirth » (soit la tentative de réconcilier anciens et modernes, déçus du « New 52 » et adeptes d’un vrai renouveau) en emballant ça grâce à « Watchmen ».[/quote]

Encore une fois, je suis ton raisonnement mais je ne suis pas pleinement d’accord. Si un Morrison a tenté de suivre les pas de Kirby ou de Moore, si King tente également de suivre Moore, je n’ai jamais eu l’impression que Johns veuille faire ça…
Quand il fait Darkseid War, je ne vois rien de Kirby, en fait ; je vois du Johns. Quand il fait Infinite Crisis, je ne vois pas grand-chose de Wolfman, mais du Johns pur jus. Quand il fait JSA V2, je ne vois pas Kingdom Come ou Hypertime, mais du Johns.
Après, certes, la comparaison avec Watchmen sera inévitable - mais je pense que Johns se concentre sur les personnages et écrit pour eux. Il n’écrit par eux, comme Morrison ou King ou Moore par exemple (même s’ils ont aussi un certain amour pour les personnages), mais Johns écrit clairement pour les personnages ; rien d’autre, en fait.

[quote=« Hush »]Ce qui serait sympa, c’est que DC reste dans la même veine que « The Button » à savoir ne pas montrer « God » à la manière d’un « c’est lui mais vous ne le verrez pas ».

Bon après à la lecture, il n’y a rien de scandaleux. Comme lorsque « Before Watchmen » est sorti, en somme, l’œuvre originale reste et restera intouchable.[/quote]

Je pense au contraire qu’on va voir « vraiment » Doc Manhattan. Le teasing est trop fort, il « faudra » passer par là.

Très belle analyse Ben je ne peux qu’abonder dans ton sens.

Je serais curieux de savoir, dans le cas de Before Watchmen, s’il y a des auteurs qui ont refusé la proposition, et dans le cas de « Doomsday Clock » (et de DC Universe Rebirth), s’il s’agit d’une idée du seul Johns.

Jim

Pour Befor Watchemn oui il y en au eu, de mémoire Kevin Smith sur, et il y en a eu d’autres, mais j’ai oublié.

Grant Morrison a refusé également si je me souviens bien. Je ne sais plus si on lui avait effectivement proposé ou s’il réagissait seulement à l’idée de développer des extensions à Watchmen.

A sa manière, il a pondu le fabuleux « numéro 4 » de Multiversity : PAX AMERICANA

Au San Diego Comic Con, Geoff Johns a eu son panel rien qu’à lui pour détailler Doomsday Clock. Entre les banalités d’usage (« c’est une histoire risquée », « c’est quelque chose que nous n’avons jamais fait auparavant », « l’univers DC ne sera plus jamais le même »…), on a appris que Doomsday Clock sera une maxi-série en 12 épisodes, qu’elle s’étalera de novembre 2017 à décembre 2018 et que l’histoire se déroulera un an dans le futur de l’univers DC (et tout sera coordonné pour que toutes les séries DC en arrivent au même point que Doomsday Clock à la publication du #12).

Geoff Johns : “There’s so much great thematic and important stuff about what the DC Universe is, what these heroes mean to us, what the world faces on a daily basis, and what these heroes — DC’s in specific — speak to me and hopefully why they speak to you. That’s what the book is about. The book is a celebration of all of it; it’s a comic book that encompasses everything from Action Comics #1 in 1938 all the way till today, and it leads the DC Universe into tomorrow with issue # 12 — like, literally tomorrow. There’s a lot of things that I’m excited for you guys to see, but one scene in particular that I love: I love seeing the smartest man from one world talking to the smartest man from another — and the smartest man from DC is Lex Luthor — and that’s all I’ll say.”

Ci-dessous, quelques cases signées Gary Frank :

Source : www.comicbook.com

Je rêverais de pouvoir dire un jour à un auteur d’arrêter de nous bassiner avec ces phrases !

Ils embauchent chez DC ? Non parce que la coordination éditoriale je la sens pas du tout.

Les premières couvertures :

Doomsday-Clock-1-variant-cover-b-666x1024

Doomsday-Clock-1-main-cover-666x1024

C’est direct et assumé, clairement.