Discutez de Dusk
Trois enquêteurs, visiblement du FBI, arrivent dans une petite ville où l’explosion tragique d’une station-service a fait plusieurs morts. Leur mission consiste à vérifier la teneur des déclarations et à déterminer s’il s’agit bien d’un accident.
Sur ces bases, le scénariste compose un récit rythmé par le temps que passent les enquêteurs sur place, chaque scène étant identifiée de manière chronologique. L’enquête est ponctuée de temps morts permettant de mettre en évidence le caractère des personnages. C’est là qu’apparaît le premier défaut de ce tome : les dialogues sont très bavards, maladroitement surjoués, et les personnages, surtout le jeune agent, sont de véritables têtes à claques insupportables. Ça ne sonne pas naturel du tout, et on a beaucoup de difficultés à s’intéresser à eux.
L’album se conclut sur le départ des agents, qui n’ont rien résolu du tout, qui décident de faire un rapport édulcoré qui sera perdu dans les méandres de l’administration, et qui font l’amer constat que le mal se situe partout, exacerbé par les circonstances. Un discours qui tend à dire qu’à la banalité du mal se substitue une normalité des gens mauvais (dans cette zone crépusculaire définie par le titre), et qui réduit l’action de l’autorité à sa mécanique : assez intéressant en soi, et ça aurait été percutant si on avait pu réellement s’intéresser aux trois émissaires du gouvernement.
Graphiquement, Christian De Metter livre une prestation cohérente par rapport à ce qu’on connaît de lui, mais n’est pas Kent Williams qui veut. Rajoutons à cela un bullage rigide, une ponctuation hésitante et quelques traits d’union absents, et on a des planches un brin pénibles à lire.
Jim
C’est pas un bullage de roman-photo ?
Voilà : bulles rectangles, serrées contre le texte, qui n’est pas génialement disposé. Un vrai repoussoir.
Jim
Les trois enquêteurs, agités par des tensions toujours palpables (on se demande comment ils font pour se supporter), enquêtent sur la mort étrange d’un notable, découvert à moitié nu devant son ordinateur. Joe, le plus jeune du trio, découvre que la victime surfait sur des sites pédophiles au moment de son décès. Si l’enquête s’intéressait au début à un acte extérieur, le défunt officiant comme consultant auprès de différentes agences gouvernementales, elle s’oriente bien vite vers l’entourage proche, et familial, de la victime, notamment à cause du comportement mutique de la fille, une jeune adolescente.
Sujets sensibles que la pédophilie, et l’inceste. Richard Marazano parvient à aborder le sujet par le biais des enquêteurs, entre consternation et dégoût, ce qui évite la glamorisation ou le voyeurisme. Cependant, il faut reconnaître que ses dialogues fonctionnent à l’image d’un rouleau-compresseur, le scénariste insistant lourdement sur les divergences de personnalité des trois enquêteurs, sur leurs réactions surjouées.
Le scénario donne également l’impression que Marazano avait plein d’idées pour ses héros, mais que la série a été interrompue trop tôt. Solomon, le plus vieux des trois, a droit à quelques séquences frappantes (là encore, pas particulièrement légères) sur son alcoolisme, qui cache bien entendu quelque profonde blessure. De même, l’enquête sur la victime laisse entendre que certaines personnes, au sein du service, ne sont pas enthousiasmées à l’idée que la boue soit remuée. Autant de fils narratifs qui auraient pu nourrir un (ou plusieurs) volume suivant. Mais la série s’arrête avec ce deuxième tome.
Christian De Metter décrit des personnages un peu raides, peu expressifs, ce qui ne facilite pas la transmission de l’émotion, un ingrédient pourtant essentiel de cette intrigue.
Jim
La série, quoique courte, a eu droit à une intégrale en 2007.
Jim