ENGLISH REVOLUTION (Ben Wheatley)

[quote]DATE DE SORTIE PREVUE

5 juillet 2013 (UK - sortie simultanée sur tous les supports : cinéma, TV, DVD, VOD)
Indéterminée (France)

REALISATEUR

Ben Wheatley (Kill List, Touristes…)

SCENARISTES

Ben Wheatley et Amy Jump

DISTRIBUTION

Julian Barratt, Reece Shearsmith, Michael Smiley, Peter Ferdinando…

INFOS

Long métrage britannique
Genre : drame/horreur
Titre original : A Field in England
Année de production : 2013

SYNOPSIS

Angleterre 1648. Un petit groupe de déserteurs fuit une violente bataille à travers champs, mais se fait arrêter par deux hommes : O’Neil et Cutler. O’Neil, un alchimiste, oblige le groupe à l’aider dans sa recherche afin de trouver un trésor qu’il croit enterré sur le champ de bataille. Mais le groupe de déserteurs s’enfonce rapidement dans le chaos : dispute, bagarre, paranoïa. Il devient alors clair que le trésor n’est peut-être pas de l’or. Les déserteurs deviennent petit à petit prisonnier des effroyables énergies qui émanent de ce lieu… [/quote]

Premiers visuels :

Cette sortie multisupports est intrigante. En connaît-on les raisons ?
Dans tous les casprès la surprise de Kill List et la bonne tenue de Sightseers, j’en serai assurément.

[size=85]Et Ben Wheatley sur Solomon Kane, c’est quand ils veulent, aussi.[/size]

Source :channel4.com/info/press/news/ben-wheatleys-a-field-in-england

aaaaah ! et bien on va finir par l’avoir, ce film sur Solomon Kane !

J’attends ce film avec énormément d’impatience, convaincu par les deux essais précédents du bonhomme. Les méthodes originales de Wheatley (tournage bref, beaucoup d’impro, montage ultra-travaillé) peuvent donner un résultat intéressant dans le cadre du film « en costumes »…
Un pitch original, intrigant et prometteur par là-dessus, que demande le peuple ?

La bande-annonce :

Ah, si c’est « Nicolas Roeg-approved », ça m’intéresse encore plus…
Je suis très intrigué par cette (première, j’imagine) bande-annonce.

D’abord, une petite remarque en forme de coup de gueule (attention ça dénonce) : le film s’appelle désormais pour le marché français « English Revolution ». Ouais.
Donc on oublie le magnifique titre anglais (ce sont des choses qui arrivent) pour…un autre titre anglais, plus moche et en plus à côté de la plaque puisque la fameuse révolution du titre (la guerre civile anglaise de 1651) n’est pas la sujet mais plutôt le contexte de l’oeuvre. N’importe quoi.
Passons.

Alors qu’est-ce que nous a concocté le plus que prometteur Ben Wheatley avec ce quatrième long ? Après « Kill List », fracassante résurrection du cinoche horrifique anglais sous influence « Wicker Man », et le virtuose, drôle et glaçant tout à la fois « Touristes », jalon supplémentaire dans le sous-genre du film de « couple de serial-killers » (« Badlands » de Malick, « Bonnie and Clyde » de Penn ou « Tueurs Nés » de Stone sont des fleurons du genre), on attendait du lourd.
Wheatley avait prévenu, il fallait s’attendre à un OVNI. Yes indeed. Et ça peut paraître paradoxal, mais au final « A Field in England » est à la fois le plus impressionnant des films de Wheatley mais aussi le moins abouti…
Tentative d’explication.

Avec son pitch fort alléchant sur le papier (en tout cas à mes yeux), Wheatley se posait quand même un sacré défi de mise en scène ; après tout le film n’est qu’un huis-clos en plein air avec 5 types en tout et pour tout. Pas facile d’accrocher le spectateur.
Intelligemment Wheatley adapte significativement sa mise en scène à ce dispositif : fini les tournages ultra-rapides basés sur de longues impros des acteurs retravaillés au montage, ici que le réal barbu a savamment préparé son découpage (pas le choix) et ça se voit. Si on exclut les séquences les plus barrées, c’est le film le plus « classique » de Wheatley de ce point de vue là.
Une constante par rapport aux autres films : les acteurs sont fabuleux. Wheatley est soit un caster de génie, soit un fabuleux directeur d’acteurs, et peut-être même les deux à la fois.
Wheatley, pour tonifier au maximum sa mise en scène, use de plus de valeurs de plan sans cesse changeantes, on passe de plans d’ensemble très larges à de très gros plans en permanence, c’est extrêmement dynamique sur ce plan.

Et il y a donc les séquences barrées, littéralement hallucinées (les persos sont sous champi). On retrouve la patte de l’anglais au niveau du montage (qui reste son opération fondamentale) des séquences les plus extrêmes, certaines frôlant la stroboscopie, d’autres au contraire consistant en des moments de stase assez hypnotiques (la sublime séquence de la corde et de la tente, filmée au ralenti et en plan-séquence, sur une musique planante à la Tangerine Dream).
Et puis il y a des moments totalement autres, totalement inclassables, comme ses plans (certains sont absolument hilarants) où les acteurs se figent dans des poses outrées : on dirait que Wheatley se moque là de la possible option « théâtre filmé » que son projet porte en germe. Au final c’est tout l’inverse.
Et puis le film est plastiquement très beau, tout simplement, avec son noir et blanc très peu contrasté (école française plutôt qu’allemande, quoi) et son utilisation astucieuse des lens-flares.

Niveau thématique, Wheatley continue à creuser son sillon, avec une sorte d’étude archéologique (on creuse beaucoup dans ses films…) des couches de croyances empilées qui constituent le fond culturel de l’Angleterre, du paganisme au rationalisme à tout crin en passant par le christianisme.
Deux points très intéressants à ce sujet :

  • Wheatley choisit un peu comme le Verhoeven de « la Chair et le Sang » un période historique charnière où l’humanité bascule du règne de la superstition à celui de la rationalité, il confronte un peu les différentes attitudes possibles devant ce changement de paradigme.
  • il est intéressant de voir comment il nous montre des persos qui aspirent par divers biais à une certaine spiritualité alors qu’il ne cesse de les ramener à une matérialité brute ; dans le même ordre d’idées le film est très sensitif, au sens où Wheatley multiplie les macros (gros plans extrêmes) sur les mains, les yeux, les oreilles…

Le film n’est pas sans défauts : déjà il est très bavard, logique (défaut en partie compensé par l’excellence des dialogues), et puis, comme tout film « expérimental » qui se respecte, il a de gros défauts de rythme. Le film dure 1 h 25 et semble faire une demi-heure de plus, sans qu’on se fasse chier pourtant…
Les changements de braquet rythmiques des séquences les plus bizarres en sont la cause, alors que « Touristes » par exemple était un modèle de fluidité.
Et puis bon, faut reconnaître qu’on ne comprend pas tout ce qui se passe à l’écran, pas que ce soit foncièrement gênant mais quand même, la narration est assez confuse.

Malgré ces défauts (qui vont faire que certains vont rejeter en bloc, c’est sûr), c’est un projet qui attire instantanément la sympathie : Wheatley se dépatouille comme un chef d’un budget de misère avec 5 mecs, un canasson, quelques fumigènes et beaucoup d’imagination là où d’autres pondent de la merde insipide avec l’équivalent du PIB du Bostwana, ça fait du bien.
Et je ne parle pas même pas des références convoquées, des films les plus originaux de la Hammer (genre « Captain Kronos, Vampire Hunter ») au feeling des films des 70"s de Jodorowsky ou de Werner Herzog (j’ai beaucoup pensé à Herzog) en passant par certains fleurons du film « d’auteur en costumes » comme « Andreï Roublev » ou « Le Septième Sceau » : on a vu pire.

J’ai hâte de voir le prochain Wheatley, qui sera trèèèèèèès différent de ce film puisque le réal anglais aura pour la première fois un budget confortable : ce sera « Freakshift », mi-SF mi-monster flick. Vite !!!

Il va d’abord réaliser les 2 premiers épisodes de la saison 8 de Doctor Who !

Ah tiens, c’est étonnant…non ? Ceci dit, il produit aussi quelques projets à droite à gauche d’après ce que j’ai cru comprendre.

[size=200]INTERVIEW DE BEN WHEATLEY[/size]

Pour Freakshift, ça ne sera pas encore pour tout de suite. Il va commencer en juin le tournage de High Rise, l’adaptation d’un roman de J.G. Ballard connu en France sous le titre I.G.H..
Son acteur principal sera Tom Hiddleston.

Tu me l’apprends, mais je ne prends pas ça comme une mauvaise nouvelle parce que j’adore « I.G.H. », et les tonalités respectives de Wheatley et de Ballard me semblent pouvoir, sur le papier, plutôt bien se superposer.
Excellente nouvelle !!
(Hiddleston ? très prometteur aussi ma foi)

Je trouve d’ailleurs l’introduction et la conclusion très efficace. La caméra de Weatley extrait les personnages d’un champ de bataille dont le spectateur n’a des connaissance que les « bruits d’ambiances », sans repère aucun (les clés de l’histoire seront distillées au fur et à mesure comme si on débutait In Media Res), pour finalement ramener le personnage principale (le magistrale Reece Shearsmith). Et qu’est ce qu’il découvre ? Rien, aucun champ de bataille, juste ses amis acteurs.

L’envers du décors.

Ou ils usent de la magie, retranscrite par une diversité de techniques visuelles épatantes. La troisième partie du film est quand même sacrément bien foutue. Ils en sont même à mettre en garde le téléspectateur des « effets stroboscopiques » en début de film, c’est dire si ça déménage.

Ah tiens, je suis content que ça t’ait plu…ça me donne envie de le revoir d’ailleurs.

Ouais, j’aime bien Ben Wheatley. Son Kill List m’avait bien mis la fièvre. Je remarque que j’ai pas encore vu son premier film Down Terrace, je vais donc rattraper cette bévue.

Mais là, c’est surtout Captaine Kronos, Tueur de Vampires qui passe en tête de ma liste. Je ne connais absolument pas, ça fait deux fois que tu le cites et le titre a tout de fabuleux.

En attendant ça:

Ah ouais, ça je l’attends de pied ferme…
« Down Terrace », avec son budget de misère, est déjà tout entier un pur film de Ben Wheatley. Un excellent polar, bien barré, à la fois marrant et d’une noirceur peu commune (« Touristes » est un peu comme ça, aussi).

« Captain Kronos » ? Un incontournable ! Demande au Doc ce qu’il en pense…