FABULER LA FIN DU MONDE - LA PUISSANCE CRITIQUE DES FICTIONS D'APOCALYPSE (Jean-Paul Engélibert)

Oui et non : en ventes mensuelles, il est dépassé par Demon Slayer, mais en ventes totales, non… Quant à l’arrêt de One Piece, rien n’est sûr (tandis que Démon Slayer_ se termine, lui).

Quant à la figure du pirate dans le manga, elle est présente depuis bien longtemps (il n’y a qu’à voir l’emblème du Shōnen Jump)…
Je pense à des titres comme Full ahead! Coco ou Captain Kidd, ou même Shin takarajima de Tezuka, par exemple.

Tori.

Sans oublier « Capitaine Albator »

Oda a pourtant indiquer finir aux alentours du 105 il y a peu de temps.

Il va nous faire comme Kirkman

« hé au fait, le prochain numéro c’est le dernier »

En tant qu’auteur ayant traité de certains genres qui ont développé une dimension transversale, je peux témoigner qu’il n’est pas facile de parler de jeux vidéo quand on n’est pas joueur. C’est mon cas, et même si je suis bien conscient que certains jeux ont imposé une imagerie nouvelle et exploré des thèmes selon des angles neufs, je n’arrive pas à me débarrasser de l’idée (totalement erronée j’en ai bien conscience) qu’il ne s’agit pas d’une histoire à proprement parler, que l’interactivité nuit à la chose. C’est quelque chose que j’ai toujours eu du mal à exprimer, et mon inculture dans le domaine n’aide pas, mais le fait que l’on puisse « jouer le récit » m’a toujours plus ou moins empêché de voir celui-ci comme une œuvre. Pour moi, une histoire doit être racontée par quelqu’un d’extérieur, afin que j’en saisisse l’intention, la tonalité. C’est une perception qui, pour fausse qu’elle soit, me semble en partie partagée par les non-joueurs qui ont, de ce fait, bien des difficultés à percevoir l’importance que tel ou tel jeu peut revêtir dans l’évolution d’un genre.

Je n’irai pas jusque-là, mais c’est vrai que c’est assez prenant. Surtout l’ouverture, dans la maison.

Tiens, puisque tu t’y connais bien… Pourrais-tu nous retrouver ce jeu dont la bande-annonce est une sorte de récit à l’envers ? De mémoire, c’est un récit de zombies, mais je ne suis plus trop sûr. En revanche, j’en garde le souvenir d’images impressionnantes (alors que je ne suis pas joueur et que j’ai tendance à m’en foutre un peu).

Charmant !
:wink:

Jim

Entre ce qu’on a l’intention de faire, ce qu’on déclare vouloir faire et ce que l’on peut faire ou que l’on fait effectivement, il y a parfois un monde…

Je comprends ce que tu veux dire. Et, pourtant, il y a, la plupart du temps, une vraie trame (après, ça dépend des types de jeux, aussi : c’est fatalement moins développé dans un jeu de combat, de course ou de foot que dans un RPG ou un jeu d’aventure).
Il y a un début et une fin (parfois plusieurs, c’est vrai), et des étapes obligatoires. Le rôle du joueur se résume parfois, d’ailleurs, à réussir à faire avancer l’histoire, ou à passer par les bonnes étapes pour aller à la fin (comme dans les _livres dont vous êtes le héros_®).

Tori.

J’y ai pensé ensuite. C’était pas forcément un reproche mais plus un regret. Cependant je pense que c’est quelque chose qui s’atténuera avec le temps un peu de la même façon que la série télévisée est étudié ou incorporé dans une analyse de manière naturelle. Le jeux-vidéos étant joué par des millions de gens depuis longtemps maintenant, il est évident qu’on aura des personnes qui prendront ce matériaux pour l’incorporer dans une étude au même titre que des livres ou des films.

(après la difficulté première c’est la multiplicité des supports narratif et le temps à y consacrer. C’est très frustrant parce qu’une des choses que je préfère c’est les liens entre tout cela, pas forcément de me consacrer à un seule chose parce que c’est tellement de manière différentes de raconter et de vivre des aventures)

Je vois ce que tu veux dire. De façon pragmatique t’a peu de jeu où tu joue le récit, dans le sens où tu l’influence totalement (le jeu vidéo n’est pas du jeu de role de manière pratique). Je pense plutôt qu’il faut voir une manière de participer et de s’impliquer. Dans les jeu où les créateurs mettent en avant le récit, ce que tu as affaire n’influe pas le cour du récit (du moins pas de manière irrévocable) mais te place dans une situation de participant avec obligation de réussir une épreuve pour voir la suite.

Ce qui est, en fait, intéressant c’est d’utiliser ce mécanisme de base du jeu (réussir une épreuve pour passer à celle suivante) pour y intégrer des aspect narratif et artistique quitte à filouter avec le joueur. Ta des cas qui remontent à loin en la matière mais pour reprendre l’exemple de The Last of Us, le jeu t’implique dans une relation qui va se construire entre un homme qui a perdu son humanité et une jeune fille qui va l’aider à le retrouver. Le jeu, de par sa longueur logique et les épreuve, t’implique dans cette relation et son évolution jusqu’à son final

qui voit Joel refuser qu’on opère Ellie pour extraire la souche permettant de trouver un remède au virus. Opération mortelle pour la jeune fille. Joel préférera tuer les membres de l’équipe médicale pour que la jeune fille puisse vivre

Sans compter l’environnement même qu’on découvre juste en se baladant. C’est cette environnement qui fait le sel de ce jeu et qui lui donne une place de choix dans le genre post-apo

Le joueur n’est pas le créateur ou le narrateur d’un jeu, il en le participant consentant. D’où le fait que des créateurs arrive à jouer de ses mécanismes pour créer de véritables grandes oeuvres. Et encore là je reste sur un aspect narratif qu’on peut rapprocher d’oeuvres similaires sur d’autres support mais le fait de « jouer » implique de fait que cet art se situe sur deux champs qui le rend difficilement totalement comparable aux deux versant (le jeu et la « vidéo ») faisant de cet art un objet à part (d’où surement le fait qu’on ai du mal à l’incorporer ou que les adaptations ciné de jeu soit globalement mauvais)

Dead Island ?

(chouette jeu de zombie par super bon techniquement mais dont la force est de se passer dans un environnement original, celui d’une ile paradisiaque pour touriste)

Ho oui

The Last of Us part II se déroule 4 ans après la fin du premier. Dans ce jeu Joel se fait tuer dès le début par un groupe d’individu dont une femme farouche. Ellie part donc pour se venger de la mort de son père de substitution. On apprendra au cour du jeu, mais on se doute assez vite, que la meurtrière de Joel est lié aux médecins que ce dernier à tués à la fin du premier jeu. Son père était le chirurgien qui aurait pu trouver le remède.

Mais le plus intéressant ce n’est pas la quête d’Ellie dans Seattle mais que le jeu, dans sa seconde moitié t’oblige à jouer Abby la meurtrière. On « refait » alors le jeu mais de son point de vue et peu à peu on est bien obligé d’admettre qu’une empathie, si ce n’est une compréhension du personnage s’effectue. A la fin du jeu, qui voit la confrontation des deux femmes, on ne sait plus vraiment pour qui on est. Ellie qu’on a suivi depuis le 1er jeu et qui n’a pas hésité dans le 2ème à tuer des innocents (mais aussi des soldats « lambda » dont le jeu arrive à donner une contenance plus fort que celle d’un simple obstacle) dans sa quête de vengeance ou Abby dont on comprend aussi les motivations et qu’on vient de suivre durant toute une partie du jeu. En parallèle le jeu nous montre la lutte de deux factions (nées toutes deux de gens qui se sont révoltés contre le pouvoir des militaires) dont on ne sait pas (et eux non plus) pourquoi ils s’entretuent alors qu’elles sont toutes deux des sociétés composés de familles normales tentant de survivre.

Le jeu décrit bien tous les mécanismes de haine et nous place dans chaque « camp » pour au final nous montrer qu’il n’y jamais de vainqueur.

Je ne dis pas qu’un film ou un livre est incapable de cela bien sur mais les mécanismes même du jeu et le fait de participer à cela apporte un angle et une expérience nouvelle à ce type d’histoire.

C’est certain, mais je pense que si l’on n’est pas joueur, le premier risque c’est de ne pas connaître l’œuvre du tout, et le second c’est de ne pas trop savoir hiérarchiser tout cela, et donc de recourir à l’artifice de la simple énumération. La manière que tu as de parler de certains jeux implique une connaissance mais aussi une familiarité, qui te permet de mettre en avant telle ou telle chose, d’en définir la spécificité, l’intérêt, l’impact. L’auteur d’un essai, s’il n’a pas cette expérience, est obligé de recourir à quelqu’un qui la possède. Grosso modo, c’est ce que j’éprouve avec Buffy : je n’aime pas la série mais j’adore qu’un fan m’en parle, car son expérience me permet d’en saisir le meilleur. Pour les jeux, les essayistes qui ne connaissent pas doivent se documenter de cette façon, selon moi : c’est une manière d’en saisir le meilleur et de ne pas focaliser sur le plus difficile.

Voilà !
Merci !

Jim

Totalement. Du coup l’ouvrage me tente aussi mais j’en vois les limites et c’est dommage mais n’enlève pas forcément l’intérêt de la chose à mes yeux.

Très gros HS et probable brosse à reliure perso

D’où la force des ouvrages collectifs. J’ai participés il y a 15 ans aux Miroirs Obscurs qui faisait suite à l’essai Les Miroirs de la vie de Martin Winckler. L’idée de ce dernier c’est qu’il ne pouvait pas brosser tout le spectre d’un médium très varié. D’où l’idée d’un ouvrage collectif où chacun apporterait sa connaissance et son point de vue sur une ou plusieurs séries. Ca donne au livre une richesse encore très pertinente aujourd’hui encore, ca rend aussi dommage le fait qu’on ai pas pu concrétiser l’idée d’un troisième volume consacré à la sitcom.

Par delà ça, je me dis que c’est aussi une des grandes forces des forums tel que celui-ci. De permettre la rencontre de personne aux gouts différentes qui apporte beaucoup dans leur domaine enrichissant alors les autres

Le risque y étant souvent une dispersion du propos, un flou dans la note éditoriale.

Clairement. Le nombre de fois que j’ai lu un avis ou une opinion apportant un éclairage parfaitement efficace sur un point, c’est frappant.
Et ouais, comme tu dis, ce n’est pas le cas de tous les forums, loin de là.

Jim

J’arrive après la bataille et sans avoir grand chose à dire, si ce n’est que j’ai lu vos échanges pointus avec intérêt.

Sur la question de ce que le jeu vidéo fait au storytelling et réciproquement, je peux en revanche recommander une vidéo de décembre dernier, issue de la chaîne Lessons from the Screenplay de Michael Tucker, et consacrée au premier volet du jeu The Last of Us que Lord évoquait (et puis en plus c’est raccord avec le sujet « officiel » du thread).

La chaîne — très recommandable, même si un peu systématiquement marquée (citations sourcées à l’appui) par le type de pensée très « carrée » délivrée outre-Atlantique sur ce genre de sujets — est habituellement consacrée au cinéma, mais Tucker a décidé de casser un peu le moule sur ce coup-là en interviewant l’un des concepteurs du jeu.

(Il y a pris goût visiblement puisqu’une nouvelle vidéo sur la question a été mise en ligne ce week-end, sur la question de la gestion de l’interraction avec les PNJ à travers l’exemple du jeu The Outer Worlds, et qu’une sous-section consacrée au jeu vidéo a été annoncée dans la foulée, intitulée The Story Mode.)

Et comme on trouve le pire comme le meilleur sur Internet, ces mécanismes ont malheureusement ont fait retour, à plus « petite » échelle, dans la réception du jeu : Laura Bailey, qui double Abby, s’est ainsi vu assaillir de quelques tonnes de charmants messages du style « salope ta ruiner mon jeu, je vai trouver où tu habite et vou tué toi et ton fils ». (Aux reproches sur les actions du personnage, déjà détaillées par Lord, s’ajoute le fait que ledit personnage soit une femme très musclée avec peu de poitrine, provoquant chez un certain type de joueurs une révulsion à l’idée de jouer un personnage qu’ils ont aussitôt étiqueté comme « trans »…)

Le problème des pandémies, c’est qu’on n’a jamais encaissé un virus qui tue les cons. Sinon, on serait quand même vachement tranquilles, depuis le temps…

Jim

ha déconne pas la dessus, je serais dans la population à risque si ca existait

Il paraît qu’on est tous le con de quelqu’un. Donc nous sommes tous visés…
Ce n’est pas rassurant !
:wink:

Jim