JUDEX (Georges Franju)

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REALISATEUR

Georges Franju

SCENARISTES

Jacques Champreux et Francis Lacassin, d’après le scénario de Louis Feuillade et Arthur Bernède

DISTRIBUTION

Channing Pollock, Edith Scob, Francine Bergé, Sylva Koscina…

INFOS

Long métrage français/italien
Genre : action/thriller
Année de production : 1963

Co-fondateur de la Cinémathèque Française, Georges Franju, réalisateur du magnifique Les Yeux sans Visage, a toujours proclamé son admiration pour le cinéma de Louis Feuillade, l’un des pères du feuilleton cinéma (ou ciné-roman comme il sera également appelé…le format sera par la suite très populaire au U.S.A. sous l’appellation serial). Oubliée après l’avènement du parlant, l’oeuvre immense de Louis Feuillade (plus de 800 courts et moyens métrages, dont une grande partie est aujourd’hui disparue) a été redécouverte après la Seconde Guerre Mondiale par ces passionnés dont faisait partie Franju.

Georges Franju souhaitait même réaliser un remake du Fantômas de Feuillade (d’après le roman de Marcel Allain et Pierre Souvestre), projet qu’il n’a jamais pu concrétiser, les producteurs de la trilogie bien connue avec Louis de Funès et Jean Marais lui ayant préféré André Hunnebelle, plus « sûr » commercialement parlant. Lorsque le scénariste Francis Lacassin et Jacques Champreux, le petit-fils de Feuillade, lui proposèrent de réaliser à la place un remake de Judex, un autre ciné-roman de l’auteur des Vampires, Franju se fit tout de même d’abord un peu prier.

En effet, il reconnaissait volontiers que « Judex était le seul film de Feuillade qui n’était pas du bon Feuillade ». Il finit par accepter, animé par cette envie de recréer le style de ce cinéma qu’il avait tant aimé dans sa jeunesse (et il glissera même quelques références à Fantômas au sein du film).
L’histoire reprend les grandes lignes du feuilleton ciné de 1916/1917, qui mettait en scène les aventures d’un justicier drapé dans une cape noire, figure positive après que Feuillade se soit intéressé aux exploits d’un gang de criminels dans son serial précédent, Les Vampires.

Leader d’une organisation de vengeurs masqués, Judex a pour cible Mr Favraux, un banquier véreux qui a construit sa fortune sur de nombreuses malversations et qui ne craint pas de se salir les mains. Il devra également affronter une bande de voleurs dirigée par Diana Monti tout en composant avec ses sentiments naissants pour la propre fille de Favraux, la douce Jacqueline…

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Pour interpréter le héros, Franju a choisi l’américain Channing Pollock, un prestidigitateur bien connu à l’époque et qui avait délaissé les planches pour tourner quelques films, principalement en Europe. Choix judicieux, notamment à cause de la première apparition du héros lors de la magnifique scène du bal des oiseaux, l’une des plus belles du long métrage, dans laquelle un Judex caché sous un masque d’aigle subjugue les foules et fond sur sa proie sans même l’avoir touché. Hypnotique et troublant…et tellement Franju dans sa thématique.

Les rôles féminins sont également très bien choisis. À la perversion de la manipulatrice Diana Monti, interprétée par la brune Francine Bergé sanglée dans une combinaison moulante noire qui évoque celle portée par Musidora dans Les Vampires de Feuillade, Franju oppose la douceur de la blonde Edith Scob, son égérie, l’inoubliable Christiane des Yeux sans visage.

Réussite formelle, Judex exprime le goût de Franju pour l’expressionnisme, à travers une série de tableaux d’une grande beauté et de scènes finement ciselées. Dans cette aventure aux accents très pulps, le cinéaste combine stylisation sixties et touches directement héritées du cinéma muet…et même de légers accents surnaturels.

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Mais aussi beau soit-il visuellement, Judex n’est pas efficace sur tous les points. Franju se perd hélas un peu trop souvent dans ses hommages appuyés et en oublie d’insuffler du rythme à un récit qui en devient par conséquence beaucoup trop statique. Les scènes d’action manquent alors terriblement de dynamisme et le climax, qui aurait du être beaucoup plus palpitant, en souffre…

Loin de la perfection poétique et morbide des Yeux sans visage, Judex n’est donc pas du grand Franju…mais cette réinterprétation d’un ciné-roman du muet n’est pas sans qualités, loin de là…

Tellement manipulatrice qu’elle arrive à faire oublier à un chroniqueur aussi pointilleux que tu peux l’être l’actrice derrière le masque. :wink:

Cela étant dit, j’ai vu ce film, et pour ma part ce n’est pas **Judex ** qui en est le héros mais plutôt justement **Diana Monti **alias la magnifique Francine Bergé (Pour en savoir +)
Contrairement au fadasse Judex. :slight_smile:

Oups…on dirait bien qu’elle m’a plus troublée que je ne le pensais… :laughing:

Merci, amigo !

Et je vois que la scène du bal t’a autant emballé que moi…mais je reste un chouïa moins enthousiaste que toi sur le film, pour les points que j’ai souligné. Il me manque un côté « bondissant » pendant les scènes d’action. Par exemple, quand les hommes de Judex escaladent le mur du repère de Diana Monti à la fin du film, la séquence s’éternise…si Franju savait magnifiquement créer des ambiances, l’action (tout du moins sur ce que j’ai vu) n’était pas son point fort…

Ron Wimberly :