LE CONTE DU CHARBONNIER (Shigeyasu Takeno)

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Ah tiens, j’ai trouvé ce bouquin à vil prix aujourd’hui. Le dessin m’a séduit, avec ce réalisme détaillé que me fait penser à Taniguchi quand il fait des trucs comme Seton.
Et l’objet est chouette, aussi, notamment cette jaquette en papier calque (à défaut de meilleur terme) qui apporte la couleur et, pour ainsi dire, la tonalité aux couvertures.

Reste plus qu’à le lire.

Jim

Je préfère ce style à celui qu’il a plus tard.

Les manga des éditions Picquier de l’époque étaient tous comme ça. L’inconvénient, c’est que ces jaquettes sont fragiles.
Je n’ai pas Le conte du charbonnier, tiens.

Tori.

Les trucs plus contemplatifs, ceux qui plaisent à Radio France et Arte ?
:wink:

Moi, j’ai découvert avec L’Homme qui marche, donc bon… Mais ces dernières années, j’ai découvert la grande variété de son éventail, et j’aime vraiment sa veine réaliste avec son goût pour les grands décors majestueux.

C’est le premier que je lis. Je découvre l’objet.
(En revanche, au premier survol, je n’aime pas le lettrage.)

Jim

Voilà.

Moi, avec Blanco (dans la première version, quand Casterman commençait à sortir des mangas).

Tori.

Ah oui, tu as raison, j’ai sans doute découvert Blanco avant L’Homme qui marche. Je l’ai découvert à la sortie. Mais peut-être qu’à l’époque, je n’avais pas tout à fait identifié l’auteur et fait le lien.
Je sais qu’à un moment, je pensais que Blanco était une exception, une sorte d’œuvre de jeunesse avant la « maturité » de la contemplation. Il faut dire que pendant longtemps, du moins j’en ai l’impression, les récits contemplatifs occupaient la scène taniguchienne. Il a fallu du temps pour que les éditeurs aillent fouiller ailleurs, il me semble.

Jim

A force de trop contempler, sûrement !

Oui. En ce sens, tu peux dire que Blanco était bien une exception.
J’ai mis du temps à retrouver cet auteur que j’avais apprécié.

Tori.

C’est quand même assez épatant la manière dont un marché façonne la perception qu’on a d’un auteur rien qu’en sélectionnant les œuvres et la promotion autour.
Bon, je ne devrais pas être étonné, connaissant la manière dont les comics ont été exploités au fil des ans, mais quand même…

Jim

C’est assez intéressant de lire Taniguchi sur son propre parcours.
Il explique que la plupart (la totalité ?) de ses œuvres sont des commandes. Le côté contemplatif de ses œuvres ne vient pas tellement de lui d’ailleurs.
L’homme qui marche, par exemple, fut une commande de son éditeur dont il ne comprenait pas trop le comment du pourquoi.
D’ailleurs il évoque qu’au début, il avait mis plein de commentaires du marcheur. Que c’est son éditeur qui lui a suggéré d’épurer à fond.
Il dit par exemple qu’il n’avait jamais d’idées de scénario.
Pourtant, ses histoires se déroulent régulièrement du côté de Totori, terre de son enfance. Ça peut donner l’impression d’une histoire toute personnelle (dans la création, non dans le vécu).

Je tire ça surtout de l’ouvrage d’entretiens L’homme qui dessine, entre Benoît Peeters et Jiro Taniguchi, que j’ai parcouru, plus que lu.

Livre sans réel enjeu, chronique du quotidien difficile et rude d’un fabriquant de charbon de bois qui vit à côté du four torride où il fabrique le combustible à partir du bois tiré de la parcelle qu’il exploite, vivant seul dans la nature, ce Conte du charbonnier va jusqu’à prendre à rebours la logique narrative : le premier chapitre décrit comment le matériau est fabriqué, alors que le dernier montre la fabrication du four lui-même.

Les autres chapitres s’arrêtent sur le rapport à la nature, aux créatures qui viennent explorer son petit monde, aux saisons, aux oiseaux qui nichent et travaillent eux aussi… Quelques chapitres sont consacrés aux rapports humains, souvent à l’occasion de souvenir situés dans l’enfance ou l’adolescence du charbonnier, comme un temps révolu. On y parle de chasse, de cuisine, avec quelques maigres références à la situation politique du pays, quelques courtes mentions de la période, un long après-guerre qui s’étale sans précision.

Formellement, c’est assez joli, avec un trait réaliste, surtout dans les décors dont les jeux de hachures et de trames donnent une profondeur incroyable aux images. Takeno glisse de temps en temps des références (par exemple au Cri de Munch…) ou altère son style pour adopter un traitement plus humoristique ou anthropomorphe (à l’exemple des poissons…), c’est très discret, on ne s’en aperçoit pas tout de suite, mais une fois qu’on a repéré l’effet, c’est un peu déstabilisant.

Jim

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