Je mets telle quelle, sans filtre, ma chronique du numéro 1, de l’époque de France-Comics :
Si ce n’est pas non plus une invasion, on commence à revoir de plus en plus des comic books de super-héros à la française. Et comme on ne peut pas toujours tout lire ou acheter, il y a un moment où il faut faire des choix. Et ceux-ci se tiennent parfois à peu de choses … une rencontre par exemple, au festival de Saint-Malo, avec le créateur de ce personnage, Terry Stillborn, autrement dit Thierry Mornet, l’éditeur de la collection Contrebande chez Delcourt. S’il ne me refait pas l’histoire de la genèse (qui est disponible dans la partie éditoriale de ce premier numéro, et prouve que de vieilles idées ne sont jamais à jeter), il me raconte le concept : le Garde Républicain est un personnage (sans pouvoir, mais bien équipé) qui a connu différentes incarnations au fil de ces derniers siècles. Une idée qui permet d’avoir de développer des histoires aux genres variés et de les intégrer également à l’Histoire de France (ce qu’on pourra voir dans un autre magazine).
En soit, cela rappelle l’astuce rétroactive sur le Captain America qui évoluait entre la Seconde Guerre Mondiale et avant Avengers #4, mais en ayant finalement plus de libertés, une existence plus étendue et surtout des Gardes qui vieillissent. Bref, c’est quand même autre chose qu’une version hexagonale de la bannière étoilée.
Cette première histoire met en scène le Garde Républicain de notre époque, qui va tenter de faire déjouer un attentat à la Tour Eiffel organisé par l’organisation criminelle CRIMEN, mais qui sera finalement qu’un leurre pour finalement voler un objet magique très ancien caché dans le musée du Louvre.
Etre un bon éditeur (cela n’engage que moi, mais j’estime que Thierry Mornet en est un) ne veut pas forcément dire être un scénariste, et je restais donc un peu méfiant. Finalement assez inutilement, parce qu’en une quarantaine de pages, l’auteur montre une belle efficacité dans la construction, avec beaucoup de dynamisme (pas vraiment de temps mort) et une présentation progressive de l’environnement du personnage, hors personnages issus de l’univers Hexagon, sur lequel s’appuie Mornet pour son intrigue. Celle-ci sert également à présenter le personnage de Marianne, qu’on pourrait considérer comme le sidekick du Garde Républicain, et en profite pour laisser quelques détails pour préparer une intrigue qu’on sent être le fil rouge des prochains récits (même si ce premier épisode est auto-contenu).
J’avais également une appréhension au niveau des dialogues, qui peuvent être parfois un peu to much dans ce genre de bande dessinée quand un Français veut faire comme Stan Lee. Mais le scénariste ne dépasse pas la limite du supportable, et essaie de varier les langages en fonction de la caractérisation voulue de ses personnages (avec une volonté d’être le plus représentatif, Marianne en étant la meilleure preuve, sans en faire trop dans le cliché). Et le phrasé fait plus naturellement français par rapport à des comic books américains traduits dans la langue de Molière (ce qui n’est pas étonnant, les contraintes n’étant pas les mêmes).
Juan Roncagliolo Berger, dont le travail a déjà été vu dans les deuxièmes intégrales de Phénix et d’Hexagon, n’arrive donc pas dans un univers totalement inconnu. Le Mexicain livre des planches assez sages en termes d’agencement de cases, mais tout en dynamisme, à l’image du récit. Il montre assez bonne maîtrise du mouvement des personnages, que ce soit en moto volante, en skate-board ou au cours d’un combat (même si une case vers la fin semble un peu étrangement construite, malgré une bonne idée de départ). Les arrière-plans sont fournis, sans alourdir les pages, et nous montrent bien que l’histoire se déroule à Paris (même quand les héros vont dans les égouts). Son style graphique pour cet album pioche évidement dans celui des comic book, et manque peut être de personnalité. Cependant, il est suffisamment solide et agréable à lire pour ne pas rougir de la majorité des artistes américains.
A noter que la belle couverture est réalisée par Eric « The Goon » Powell.
Avis : ce n’est pas exempt de défauts, mais pour une première, c’est très plaisant et facile à lire. Cela met l’eau à la bouche pour d’autres aventures.