LE GRAND INQUISITEUR (Michael Reeves)

Bon, alors, on rentre dans la subjectivité, là.

Tout ce que je peux dire, c’est que, dans la communauté d’étude du Folk Horror, à laquelle je participe de loin, on ne considère pas que le genre soit propre aux pays anglo-saxons. Et, en fait, on pense que si cette trilogie a été promue fer de lance du genre, ça a été un peu un hasard. Dans l’état actuel de nos recherches, la première mention du terme de Folk Horror et de cette trilogie date d’avant le reportage de Mark Gatiss dont tu parlais. Et, bon, accessoirement, tu mélanges les deux (formidables) reportages qu’il a fait, « Horror Europa » et « The History of Horror ». Celui où il parle de Folk Horror, c’est dans son histoire générale.

Mais de toute façon, la trace la plus ancienne qu’on trouve du terme FH et de la trinité vient d’une interview de Piers Haggard pour Fangoria, avant les documentaires, donc. Il y fait des liens avec des films qui sont proches de sa propre sensibilité, donc britanniques. Et, du coup, c’est un peu un hasard, en grande partie dû au reportage de Gatiss, qui s’appuyait sur cet entretien, si ces films se sont retrouvés porte-étendards du genre.

Si on définit le Folk Horror comme un genre artistique horrifique ancré dans le folklore (enfin, je résume, c’est plus compliqué que ça), on en retrouve des expressions un peu partout. Les principaux foyers, à notre sens, seraient les îles britanniques, bien sûr, mais aussi les pays slaves (avec des œuvres comme « Valerie… », « Marketa Lazarova », « Otesanek », « Leptirica », « Viy », « Les Chasses Sauvages du Roi Stakh »…), l’Allemagne (avec justement « Hagazussa », les différentes versions de « Nosferatu », « Haxan »…), la Scandinavie (« Jour de Colère », « La Source », « Quand nous étions sorcières »…) et, même si c’est un peu à part, le Japon (« Kwaidan », « Onibaba »…). Et ça, c’est sans compter les films occasionnels venus d’autres horizons… De même, si ça semble clair que les âges d’or du genre sont les années 60/70 et maintenant, on considère aussi que ce genre d’histoires existait avant et existera après.

Après, si tu as envie de considérer que le genre se résume aux îles britanniques parce que c’est ce que tu préfères, il n’y a pas de problèmes, on a tous des préférences, mais ce n’est pas le point de vue majoritaire dans la communauté, en tous cas. (EDIT: Je précise que je ne suis pas sarcastique, je pense vraiment que c’est un point de vue qui se tient, même si je ne le partage pas).

Ce n’est pas une volonté de déprécier ces trois films, hein. Je pense que « Wicker Man » reste le chef d’œuvre absolu du genre (j’ai plus de réserves sur les deux autres, même s’ils restent formidables). Mais je ne pense pas que la frontière entre ces films et le reste de la production FH soit si claire que ça.

Oui mais ce n’est pas le sentiment principal du film, contrairement à « Hagazussa ». Après, on ne peut pas nier que les films soient proches, hein. Mais il y a des différences.

Si tu veux disparaitre pendant quelques années, on a fait une liste de tous films comportant des éléments FH auxquels on pouvaient penser (de près ou de loin, hein, certains sont quand même assez différents du style de base). Pour l’instant, on a 550 films dedans.

Et ça, c’est sans compter les séries TV, les livres, les BDs, les jeux vidéos, les musiques…

Ah, ce serait un titre qui en jette, ça. :wink:

Sylvain, c’est pour toi !

Pas de subjectivité de ma part : je ne disais pas que le genre de la folk horror soit un genre exclusivement britannique, mais que la unholy trinity du genre (les trois films de Reeves, Haggard et Hardy) avait été définie initialement par des Britanniques avec une sensibilité (et donc une subjectivité, là, pour le coup) britannique — comme tu le dis toi-même.

Bien que moins détaillé sur cette possible confusion, que je confesse, entre deux documentaires, mon humble savoir sur la question est synthétisé sur la page d’introduction du site Folk Horror Revival (From the forest, from the furrows, from the field… and further) par Andy Paciorek :

The term ‘Folk Horror’ in its modern context, though it had been used before in references to folklore and art, appears to have been created by Piers Haggard in a 2003 interview with Fangoria magazine in reference to his own 1971 movie The Blood on Satan’s Claw. The term was later popularised by Jonathan Rigby and Mark Gatiss In the ‘Home Counties Horror’ episode of the 2010 documentary series A History of Horror. In it, three movies are mentioned in relation to ‘Folk Horror’ and as such have become the unholy trinity of Folk Horror cinema, namely, Witchfinder General (1968), The Blood on Satan’s Claw (1971) and The Wicker Man (1973). Using these excellent, evocative movies as a blueprint, some have come to define ‘Folk Horror’ as British movies of the late 1960s and ’70s that have a rural, earthy association to ancient European pagan and witchcraft traditions or folklore.

Mais Paciorek ne s’arrête pas là pour autant, et lui aussi ouvre largement la définition du genre. Un peu trop largement, je trouve, même, je l’avoue. Quand on commence à mettre dans le même sac Les Contes de la lune vague après la pluie, Rosemary’s Baby et Pique-nique à Hanging Rock, il me semble qu’on pousse un peu loin les limites d’un genre dont la définition même la plus restrictive est déjà un peu… brumeuse. De même, quand on le fait remonter à Häxan : je ne nie pas qu’il y puisse y avoir là une source d’influence, mais à mes yeux on est quand même dans une logique différente ; à ce compte-là, on peut aussi bien remonter jusqu’à la fin du XVIIIe siècle (avec les contes des frères Grimm ou les balades de Burns et Wordsworth), et pourquoi pas même jusqu’à l’Antiquité (Horace, Apulée…?). Mais au bout d’un moment c’est comme si on incluait un affluent de la Saône dans une définition de l’Océan Atlantique. Mes réserves portent néanmoins plus sur la définition des éléments constituants du genre, que sur une question d’origine géographique.

J’ai tendance à penser que le cœur de la folk horror repose sur la rencontre entre, d’une part, un point de vue « moderne » / « civilisé », généralement d’origine urbaine et plus ou moins individualisé, et un cadre rural / isolé, plus ou moins communautariste, théâtre préservé de traditions archaïques, de cultes occultes, ou de la présence ou résurgence de forces infracivilisationnelles (bref, comme disait Audiard : « À la campagne, le jour on s’ennuie, la nuit on a peur ! »).

Les îles britanniques ont évidemment fourni un terreau privilégié, mais le genre peut évidemment se décliner sous tout un tas de latitudes et en puisant dans tout un tas de traditions. — On évoquait d’ailleurs Midsommar comme possible flagship du retour à la mode du genre, ça n’exsude pas particulièrement l’anglicité. — En revanche, plus on s’éloigne de cette dynamique de confrontation entre l’ancien et le moderne, entre différents régimes de croyance / modes de pensée / modes de vie, plus on s’éloigne (de mon point de vue) de ce qui fait la spécificité du genre, voire on navigue en fait dans d’autres eaux, même si on y retrouve l’utilisation d’éléments communs.

Le nombre atteint témoigne, je pense, que ta vision du genre est effectivement beaucoup plus « large » et englobante que la mienne :wink: mais ouais, je suis carrément preneur d’une telle liste, je suis sûr que j’y ferais d’intéressantes découvertes.

Oups. :sweat_smile:

Pour tourner autour de la définition que tu avances là, je dirais que la « folk horror » repose sur la notion de religions comparées, en dernière analyse. Je crois que c’est Dionnet qui présentait la chose en ces termes, en évoquant « The Wicker Man », où cette dimension est évidente. Le terme de « religions » étant pris dans son sens le plus large, ici.

Non non, mais ce n’était pas une critique de ma part, tout juste une annonce. Je m’incluais totalement dans le lot. Je suis subjectif sur cette question, mais je maintiens que tu l’es aussi. Ce que je dis, c’est que, à partir du moment où on cause de définition de ce genre, c’est difficile de proposer quelque chose d’absolu.

Et bon, puisque tu évoques Folk Horror Revival et notre grand leader charismatique Andy Paciorek, je vais être clair: le point de vue que je défend est celui de la communauté FHR, tout simplement parce que les études, les recherches, ont été faites de manière communautaire. Après, c’est Andy qui s’est occupé de regrouper tout ça, de mettre en forme et de rédiger. Donc, c’est bien normal que ce soit son nom à la fin de l’article. Mais c’est notre point de vue global qui est indiqué. C’est littéralement le condensé d’années de réflexion (qui continuent) qu’on retrouve dans ce site et dans nos livres.

Je suis pas en train de tirer la couverture à moi, je le précise: je ne fais pas partie des contributeurs importants. J’ai juste filé un coup de main.

Mais, justement, si tu trouves que j’ouvre beaucoup la définition, attends un peu de causer avec Andy Paciorek. Il est infiniment pire que moi. Il est envisageable qu’il considérerait Apulée ou Wordsworth comme comportant des aspects FH, oui. Mais il y aussi des gens plus modérés sur cette question comme moi ou Darren Charles. Mais je pense qu’on serait tous d’accord pour dire que les frères Grimm sont FH. Les autres exemples que tu donnes, c’est moins le cas, quand même (sauf pour Andy).

Au passage, un peu de pub: Darren fait une émission de radio hebdomadaire, Unearthing Forgotten Horrors, où il passe beaucoup de musiques FH, entre autres. C’est sur Mixcloud. Je recommande.

Mais, pour en revenir à l’article (https://folkhorrorrevival.com/about/from-the-forests-fields-and-furrows-an-introduction-by-andy-paciorek/), c’est là qu’on voit le danger de sortir quelque chose de son contexte. Le paragraphe que tu cites est là parce qu’il fallait quand même reconnaitre l’importance de ces films dans l’identité du FH. Mais tout le reste de l’article est une suite de nuances à apporter. Et ces nuances prennent beaucoup plus de place dans l’article que le paragraphe sur la trinité parce que c’est quand même notre point de vue que le rapport à ces trois films est un peu une prison pour le genre. Tu trouveras notamment un paragraphe listant des films plus anciens et/ou non-britanniques. Et disons que, si on nomme des dizaines de films dans ce paragraphe, face aux seuls trois de la trinité, c’est quand même une volonté de minimiser ce que nous considérons comme une seule des étapes d’un thème artistique plus global.

Similar aspects of witchcraft and paganism had also featured in earlier non-British movies such as Häxan (Denmark 1922), Il Demonio (Italy 1963), Viy (Russia 1967) and Kladivo Na Čarodějnice (Czechoslovakia 1970), Mark of the Devil (West Germany 1970) and Leptirica (Yugoslavia 1973) for example. America also produced its own examples in Crowhaven Farm (1970), The Dark Secret of Harvest Home (1978) Children of the Corn (1984) and, in a different manner, later with The Blair Witch Project (1999). Japan also produced numerous movies of note that were spun from its own folk tradition, such as Ugetsu Monogatari (1953), Onibaba (1964) and Kwaidan (1964). Australia has produced some stunning folk horror movies that make use of the great outback as well as Aboriginal dreaming and also the backwoods aspect of rural isolation. These include Peter Weir’s Picnic at Hanging Rock (1975) based on the haunting novel by Joan Lindsay and The Last Wave (1977), Walkabout (1971) and Wake in Fright (1971).

Mais, dans ce cas, si nous considérons que le FH est un style global plus ancien, pourquoi y a-t-il eu une résurgence importante pendant les années 60-70 ? Et c’est là que ça devient très intéressant à mes yeux.

A theory put forward on the ‘Free Radio Santa Cruz Folk Horror’ edition of the Other Side of the Tracks music show suggests that the Folk Horror of that period emerged from a sense of post-hippy disillusionment in which the ideals of the back-to-the-land movement no longer seemed ideal. Coupled with the 1960s resurgence of interest in paganism and the occult, Folk Horror movies arose when, to paraphrase a line from horror writer Stephen King’s Pet Sematary, ‘The ground became sour’.

Je souscris totalement à cette analyse et c’est la raison pour laquelle ce genre me fascine. Cette résurgence s’est passée au moment où l’utopie hippie était en train de se casser la gueule. Et aucun film ne représente mieux cela que « The Wicker Man ». Y’a du Charles Manson et du Brian Jones dans Summerisle (histoire de faire le lien avec l’entretien que Photonik a eu avec Franck Buioni dans Tumatxa!).

Bon, oui, j’ai fait un raccourci de trop dans mon post précédent. Tu as raison de me reprendre là-dessus. Je savais que je résumais un peu trop, c’est pour ça que j’ai dit « enfin, je résume, c’est plus compliqué que ça ». Mais c’était des nuances importantes. Donc, je vais préciser.

En fait, c’est pour ça que j’insiste sur la question de la subjectivité. Ce qui constitue du FH pour nous relève beaucoup de l’intuition, d’une impression partagée. Mais, évidemment, si on veut pouvoir analyser un minimum, ce n’est pas suffisant. Donc, on a cherché ce qui reliait ces oeuvres.

Ce sont les 4 points que Adam Scovell (un autre des piliers de FHR qui nous sert un peu de porte-parole puisqu’il bosse au BFI… beaucoup d’articles dans le blog du BFI sur le sujet) a théorisé dans un de ses discours et qu’il a ensuite développé pour son livre « Folk Horror: Hours Dreadful and Things Strange » (que je recommande aussi). Et, donc, un résumé de ces quatre points est présent dans l’article d’Andy Paciorek. Bon, c’est un peu long, donc je vais pas recopier la totalité du passage mais, en résumé, ça donne ça.

Landscape: En gros, c’est quand l’environnement devient une source de menace, réelle ou ressentie, comme l’île dans « The Wicker Man », ou la forêt comme domaine de la sorcière dans « The Witch ». Ou, plus rarement, quand un rapport mystique (pas forcément hostile, d’ailleurs) se crée entre un lieu et un personnage (« Penda’s Fen »).

Mais, point important, pour nous, il existe une forme de FH qui s’adapte parfaitement à un environnement urbain. On utilise le terme « Urban Wyrd » pour le définir mais on le considère quand même comme faisant partie, bien qu’un peu à part, du canon FH. On peut penser au film « Death Line » (aka. « Raw Meat »), par exemple, ou à la fin du « Midnight Meat Train » de Clive Barker.

Ce premier point est important parce que c’est celui qui fait le lien avec la psychogéographie, le rapport mental que quelqu’un peut avoir avec un lieu, ce qui est une thématique qui revient très régulièrement dans FHR et (tu peux demander à Photonik) un truc dont je parle beaucoup.

Isolation and Skewed Moral Beliefs: Bon, alors, là, je vais pas trop m’étendre parce que c’est plus ou moins le point sur lequel nous sommes d’accord. C’est la définition que tu as donnée du FH. Avec le coté « personnage coupé de son environnement naturel » mais c’est un corollaire logique, en fait.

Happening / Summoning: Celui-là est un peu lié au précédent mais c’est son pendant surnaturel ou, au moins, ritualisé. Ça peut être tout simplement l’apparition d’une créature surnaturelle mais, plus généralement, ça se réfère à un évènement qui ne semble ne pas être à sa place dans un environnement donné: un sacrifice rituel dans le monde moderne (« The Wicker Man »), une entité cosmique dans un environnement familier de Nouvelle Angleterre (H.P. Lovecraft… je devrais préciser que, pour nous, Lovecraft n’est pas vraiment FH mais certains de ses textes s’en rapprochent).

Voilà. Donc, y’a des trucs que je devrais préciser. Tous les récits ne se rapportent pas forcément aux quatre points. Ce sont plus des pistes de réflexion qu’autre chose. En fait, les premières études sur le FH en tant que genre datent vraiment des années 2010, pas avant. Donc, on est vraiment dans un work in progress. En particulier, de l’avis de pas mal de monde (dont moi-même), le dernier point, « Happening / Summoning », s’il n’est pas faux en soi, est encore un peu bancal. De l’aveu même de Adam Scovell, il est probable que la liste évolue au fil du temps. Mais, pour l’instant, on en est là.

Aussi, ce n’est pas parce que une œuvre répond à un des points cités que ça devient automatiquement du FH. Y’a quand même une dose d’interprétation. Sinon, « Predator 2 » serait un film FH, ce qui est un peu exagéré.

Marrant, la première fois que j’ai lu cette ligne, c’était dans une BD de Didier Comès (« La Maison où rêvent les arbres », je crois), qui est un auteur que je considère aussi comme FH.

Bon, je dois préciser un truc, l’idée était de lister tous les films se rapprochant de près ou de loin au genre, et ce, dans une communauté qui a déjà une définition très inclusive de ce principe. Donc, je ne doute pas que tu vas te demander ce que certains films font là. Même pour moi, il y en a certains qui sont un peu abusifs là-dedans (« Prince Of Darkness »… sérieux, les gars… mais bon, c’est pas grave, la liste reste intéressante).

Folk Horror Revival Films

En fait, c’est marrant, cette notion de religion dans le FH. C’est assez indéniable que, au moins dans la trilogie, c’est un élément central. Mais, quand on s’en éloigne, on tombe de plus en plus sur des cas où cela ne s’applique pas vraiment.

Typiquement, dans « Blair Witch », on a certes une sorcière mais son système de croyance n’est jamais exploré (vu que, de toute façon, son rôle est avant tout celui d’une menace diffuse mais jamais vraiment représentée) et que, les rares traces constatées de sa « magie », essentiellement les figures de bois qu’elle accroche dans les arbres, sont des éléments de paganisme un peu génériques. De toute évidence, cette notion de « religion comparée » ne faisait pas partie des intentions des créateurs du film. Mais, pourtant, pour nous, il avait les caractéristiques d’un récit FH (après, on peut ne pas être d’accord, hein).

De la même manière, dans « Calvaire », qu’on considère comme faisant partie du canon, la question religieuse est certainement là dans le sous-texte (ne serait-ce que dans le titre), mais n’apparait pas scénaristiquement et, à mon sens, n’est pas vraiment explorée dans l’histoire. Ce n’est pas le sujet du film.

Et, ça, c’est sans parler des œuvres asiatiques, notamment japonaises, où le rapport à la religion est tellement différent du notre que vouloir l’utiliser pour étudier les films, globalement, ne marche pas.

Mais, pourtant, on ne pouvait pas nier que 90% des œuvres appartenant à ce courant avaient des références religieuses, généralement centrales. C’est en grande partie à cause de ce problème qu’on en est arrivé à l’analyse en quatre points dont je parlais plus haut. Si tu prends ces notions telles quelles (rapport à la terre, repli communautaire, système moral, système rituel et/ou surnaturel), ben, la question de la religion (ou, peut-être plus justement, du culte) est là en filigrane. Mais ça peut aussi s’appliquer à des cas, plus rares, où la question de la religion n’est pas vraiment traitée.

Et, sinon, bon anniversaire, Photonik.

Ha c’était pas aujourd’hui. La blague, sur Facebook, c’était le 06/06/66 (je ne suis pas encore dans ma cinquantaine, en fait :slight_smile: ), en bon fan d’Iron Maiden.
Mais c’est l’attention qui compte, donc merci. :slight_smile:

J’aurais une définition moins large, alors, car moi je ne classerais pas « Blair Witch » dans cette catégorie. C’est un récit horrifique tout à fait dans le moule du « Sticks » de Karl Edward Wagner (influence évidente de « Blair Witch », mais aussi de la première saison de « True Detective », du propre aveu de Nic Pizzolatto), donc je rattacherais plus ça aux formes nouvelles prises par la « weird fiction » depuis les années 90, du fait des racines littéraires de Wagner.

Oh oui, il n’est pas rare que la Weird Fiction s’hybride avec un peu de FH. La première saison de « True Detective » se rapproche des deux genres, à mon avis.

Mais, si je ne nie pas l’influence de « Sticks » sur « Blair Witch », j’hésiterais à considérer le film comme de la Weird Fiction. Il n’y a pas, ou peu, le coté « déconstruction d’anciens mythes » qui, pour moi, constitue l’essence de ce genre. La figure de la sorcière, là-dedans, est finalement extrêmement classique, même si la mise en scène ne l’est pas (pour l’époque). C’est pour ça que « Blair Witch », à mon avis, relève plus du FH.

Je ne vais pas tout citer parce que ce serait vite indigeste, donc je vais essayer de répondre point par point en espérant que ça demeure clair et qu’on s’y retrouve.

Sur la subjectivité : je ne suis pas sûr de voir où on ne se comprend pas. Je maintiens que pour ce qui est ma remarque initiale (l’explication de l’exclusion de Valerie… de la « trinité » emblématique, sur la base de la définition de cette trinité par des Anglais considérant un corpus purement anglais), je n’ai fait que relayer ce qui me semblait une subjectivité autre que la mienne (en gros, les biais de Haggard puis Gatiss). Ça n’empêche absolument pas de considérer que la définition du genre a pu être élargie depuis et qu’un film tchèque y a sa place.

Maintenant, pour ce qui est de ma propre subjectivité, bien fondée comme je l’ai dit non sur la nationalité d’origine mais sur des thématiques, — et je rappelle encore une fois que j’ai lu le roman de Nezval (écrit entre 1935 et 45) mais non vu le film, donc je me fonde sur le premier, sous réserve que l’adaptation n’apporte pas des éléments complètement nouveaux — il est vrai que je ne suis pas sûr du tout de voir Valerie ou la semaine des merveilles comme un pinacle de la folk horror. Pour moi, on est plus dans le registre de la relecture surréaliste subversive d’un schéma de conte de fée, mâtiné de Faust et d’Alice au pays des merveilles, centré sur le thème du passage à l’âge adulte via l’accès à la sexualité. Je n’y vois pas beaucoup de folklore, pas vraiment d’horreur, et rien du conflit central qui est pour moi le nœud de la définition du genre.

Mais ce n’est pas de ça que je parlais dans ma remarque initiale.

Sur le fait de citer FHR : j’ignorais que tu étais lié à ce site, donc n’y vois ni flagornerie ni tentative de mise en porte-à-faux de ma part ! :smile:

Sur le « danger de sortir quelque chose de son contexte » : mais je le précisais juste après, le contexte…?? :face_with_raised_eyebrow:

Sur la théorie de la désillusion post-hippie : comme je le disais avant-hier soir dans le topic sur The Blood on Satan’s Claw, loin de moi l’idée de nier absolument le mérite de cette idée ; mais si elle fonctionne très bien pour les deux titres les plus tardifs de la « trilogie impie », ça marche beaucoup moins pour la production des années 60 (voire 50 si on part, mettons, de Rendez-vous avec la peur de Tourneur). Dont ce Grand Inquisiteur dont il est question ici, d’ailleurs. Sans remonter aux calendes grecques, il me semble qu’il y a d’autres facteurs à considérer pour la genèse du genre — je pense notamment à l’essor du néopaganisme dans les années 50, avec les écrits de Gerald Gardner qui codifie et popularise la Wicca, et son intégration dans la contre-culture des années 60, via par exemple les groupes folk-rock psychédéliques. Que là-dessus intervienne en 70 le contrecoup négatif du mouvement hippie, qui vient apporter « la dernière touche », c’est évidemment aussi une donnée importante. Mais ça n’est pas tout.

Sur l’Urban Wyrd : là, j’avoue que, de mon point de vue, on est dans l’exemple-type où à force de considérer les ingrédients de façon disparate au lieu de ce qui fait la spécificité de la recette, on arrive à un point où tout est dans tout et réciproquement.

Sur l’appartenance ou pas de Blair Witch au « corpus » : pour moi on est un peu aux limites de la FH, mais on retrouve suffisamment d’éléments constitutifs pour que ce ne soit pas absurde de le considérer. Et par ailleurs le film a une influence évidente sur la production postérieure.

Sur le coup des « sticks », ou en tout cas des objets « craftés », il me semble que ça se trouve déjà dans Harvest Home de Thomas Tryon, roman paru un an avant la nouvelle de Wagner — et qui relève pour le coup de façon indéniable et « pure » de la FH.

Concernant la liste FHR : « Google Drive : accès refusé » :tired_face: :tired_face: :tired_face:

(Et sinon, joyeux non-anniversaire Photonik !)

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Oui, tu as raison. Je pense qu’on a déjà dépassé le stade de l’indigestion, honnêtement. Et je plaide coupable. Pourtant, j’ai omis plein de trucs dans mes messages pour simplifier mais je n’ai jamais été bon pour la synthèse.

Ok, je suis revenu sur la source de cette incompréhension. Ça vient de moi. La première mention de subjectivité vient de la première phrase d’un de mes posts. Je l’avais conçue comme un préambule. Mais je l’avais placé juste après un extrait d’un de tes arguments. Donc, tu as cru que je répondais spécifiquement à la question de la trilogie alors que, pour moi, cela concernait la totalité de notre échange. C’est moi qui ait mal construit ce message.

Oui oui, bien sûr, il suffit de regarder le nombre de wiccans, gardneriens ou autres, qu’on a dans la communauté FHR pour s’en convaincre. Mais, en fait, j’ai volontairement fais l’impasse sur la question de la musique acid-folk (ou free-folk, ou psych-folk, comme tu veux la nommer) qui est encore aujourd’hui primordiale dans la communauté FH. Et certaines formes de musiques électroniques, industrielles et metal qui jouent aussi un rôle. Il suffit d’aller sur Bandcamp et de regarder le nombre de disques qui utilisent le tag « folk-horror » pour le voir. Mais cette question des liens qui unissent FH et musiques est bien touffue. On va peut-être juste se focaliser sur le cinéma. C’est déjà assez compliqué comme ça. Je peux juste recommander le livre (dont j’ai déjà parlé à Photonik, d’ailleurs), « Electric Eden: Unearthing Britain’s Visionary Music », qui revient sur tout ça. Et, puis, bon, à FHR, on a aussi sorti 2 livres sur le sujet, « Harvest Roots » volumes 1 & 2.

Oui mais regarde le langage employé dans le paragraphe que tu utilises (sans parler du reste de l’article qui est beaucoup plus à charge). Andy est là pour minimiser l’importance de la trilogie. Regarde toutes les fois où il utilise l’expression « some have said… », « some have taken this to imply… » (oui, il a un peu un tic d’écriture avec les « some have… », il les utilise sans arrêt). Il reconnait la beauté de ces films avec « Using these excellent, evocative movies as a blueprint… » mais c’est pour immédiatement relativiser leur position avec un « some have » de plus. Et je ne parle pas du reste de l’article qui accentue encore cet effet-là. C’est pour ça que, utiliser cet article pour placer la trilogie comme l’archétype du FH me semble être un contresens.

Il reconnait leur importance, évidemment, mais c’est pour immédiatement ouvrir le sujet, nommer les œuvres qui sortent de ce canon, et arriver aux 4 points qui définissent ce genre pour nous (encore une fois, c’est un work in progress, personne n’en est totalement satisfait pour l’instant mais c’est plus proche de l’idée qu’on s’en fait).

Après, comme je disais plus haut plus haut, Andy est le plus radical dans la communauté sur cette question-là. On est plusieurs (moi y compris) à ne pas avoir de problèmes avec le fait de placer ces films au centre (même si on pense que c’est l’arbre qui cache la forêt).

Ceci étant dit en toute humilité, hein. Il se trouve que, dans la résurgence FH récente, notre communauté est celle qui a été mise en avant, surtout grâce au fait que Adam Scovell bosse au BFI. Mais ça ne veut pas dire que notre définition est forcément la bonne. Mais c’est celle qui nous semble la plus intéressante. Et ça a voir avec la conception qu’on a de l’art en général.

J’essaie de répondre un peu à tous les points que tu soulèves dans tes derniers messages pour éviter de se disperser, dans le mesure du possible.

Basiquement, on part du principe qu’il n’existe pas un seul genre artistique qui se résume à une idée unique. Pour rester dans l’horreur, le slasher ne se résume pas à la violence psycho-sexuelle, le récit gothique n’est pas juste la figure de l’Autre, de l’Étrange, et le FH n’est pas que la confrontation religieuse. Pour nous, n’importe quel genre est une nébuleuse comportant plusieurs idées, plusieurs origines. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de thématiques reliant tout ça mais elles restent assez brumeuses et changeantes.

C’est pour ça que présenter la trilogie comme étant la définition me semble trompeur. Je serais par exemple tenté de dire que les œuvres de MR James et Arthur Machen sont tout autant primordiales. De même pour les résurgences paganistes (wicca et autres) du 20ème siècle. Tu as raison de nommer Gardner mais je rajouterai « Le Rameau d’or » de Frazer aussi, notamment. Juste des exemples parmi d’autres.

Ca ne veut pas dire qu’on peut remonter ainsi jusqu’à Shakespeare (y’a des sorcières là-dedans, après tout). Il faut quand même tracer la ligne à un niveau (pour moi, il n’y a pas d’œuvres FH avant le 19ème siècle… Andy ne serait pas d’accord). Mais, en même temps, on veut laisser suffisamment de place pour pouvoir explorer.

Après, ça ne veut pas dire que les œuvres dans notre corpus sont égales sur ce plan. Évidemment pas. Il y a des œuvres centrales (la trilogie, « The Witch »…) des œuvres qui s’en inspirent (« Kill List », « Blair Witch », la sitcom de Mark Gatiss, « The League of Gentlemen »…), des œuvres qui ont toutes les caractéristiques mais avec un élément différent (la SF avec « Quatermass and the Pit », le cadre urbain de « Death Line »…), des œuvres marginales mais qui ont quand même un lien (« Dead Man », « Picnic At Hanging Rock »…), les équivalents venant de cultures non-européennes (tous les kwaidan-eiga japonais, « Dust Devil »…)… Donc, on va inclure tout ce beau monde dans le corpus parce que, pour la compréhension d’un genre quel qu’il soit, on pense que l’ouverture du champ d’études est plus intéressante que sa restriction mais ça ne veut pas dire qu’on n’a pas conscience de place de telle ou telle œuvre dans le genre. Si on me demande une bonne série FH, je ne vais pas mentionner la sitcom « Detectorists » ou « Flowers » même si les parallèles existent. Il y a des œuvres qui sont fondamentalement FH et d’autres qui le sont marginalement. Mais, ça, c’est vrai pour tout genre artistique.

Mais, en tous cas, ce qui est notre position, c’est que l’ouverture fonctionne mieux pour la compréhension du genre que la fermeture. C’est juste notre point de vue. Il y a des gens qui sont en opposition totale avec cette idée (notamment pour des questions politiques mais on ne va pas ouvrir ce panier de crabes). Chacun fait comme il l’entend (ce qui n’empêche pas les accrochages, bien sûr). Disons qu’une définition stricte nous semble moins intéressante qu’une qui nous donne une marge de manœuvre.

Ah, je connais pas, celui-là. Je le rajoute à la liste. Merci.

Et celui-là, de lien, il marche ? https://docs.google.com/document/d/1O7HYFuv2WzYOlGxHKFVt36g1xoc6y-ek9WIm7JCexoo/edit?usp=sharing

Heureusement que tu ne voulais pas faire indigeste ! :wink:

Je comprends les arguments supportant la volonté de « viser large », intellectuellement — et loin de moi l’idée de réduire un genre à une seule idée. Ensuite, comme tu le dis, « il faut bien tracer la ligne quelque part ». C’est le propre d’une définition (comme le mot l’indique) de tracer des contours. J’en reviens à mon image d’affluent d’un affluent d’un affluent du Rhône qui se jette dans la Méditerranée pour définir l’Atlantique. Ce n’est pas faux de dire que tout ça appartient à la même masse d’eau (et aussi en contact avec les autres océans), et que les limites supposées sont de l’ordre de l’arbitraire. Mais ce n’est pas une réponse très éclairante à quelqu’un qui demanderait qu’on lui dise ce que c’est que l’Océan Atlantique.

Disons juste qu’on ne trace pas tout à fait la ligne au même endroit. :wink:

Sinon, le lien fonctionne à présent, merci. :yum:

(Sans vouloir indéfiniment relancer le débat, faudra quand même m’expliquer à quel titre, même lointain, Eyes Wide Shut se retrouve là-dedans.)

Pour Harvest Home — une histoire de couple new-yorkais qui emménage dans le Connecticut profond et se retrouve confronté à des rites pas très catholiques — ce roman contemporain de The Wicker Man a aussi été adapté sur le petit écran U.S. quelques années plus tard (je n’ai pas vu le résultat) sous forme de mini-série avec Bette Davis et une toute jeune Rosanna Arquette, sous le titre The Dark Secret of Harvest Home.

Pour rester sur le territoire américain, un autre manque que je repère dans la liste, une découverte que j’ai moi-même faite il y a quelques mois à l’occasion de la sortie DVD, et que je ne vois curieusement jamais cité dans les listes de folk horror (ce qui m’a poussé à vérifier tout de suite celle de FHR), alors que franchement ça coche toutes les cases : Deadly Blessing / La Ferme de la terreur de Wes Craven (1981). (Film loin d’être parfait, mais c’est une autre question.)

Oui, c’est l’idée.

Oui, je suis d’accord avec toi. Mais, justement, la ligne n’est pas la même pour tout le monde. Pour le coup, vu que la liste a été faite de manière collaborative, je ne sais pas comment le film est arrivé là. Mais, si je devais deviner, je dirais que que ça vient du fait qu’on considère le film de Kubrick comme (potentiellement) inspiré de « The Devil Rides Out », le film de la Hammer, qui, lui, est plus nettement FH. Mais tu as raison. Selon mes critères personnels, c’est un peu juste pour l’inclure dans la liste. « Eyes Wide Shut » n’est pas le seul à être présent simplement à cause d’une connexion supposée avec un autre film.

Eh bé, ça a l’air intéressant. J’aime bien les films tardifs de Bette Davis, à commencer par « Burnt Offerings » (« Trauma » en VF), que je considère comme un chef d’œuvre. J’irai vérifier tout ça, livre comme série.

Oui, je suis allé vérifier dans la communauté. Le film a été évoqué rapidement mais n’a jamais vraiment été discuté. Je vais le regarder et en causer dans le groupe.

Bon, je n’essaie pas de relancer la discussion mais, en guide de conclusion, je vais préciser l’article de blog où Adam Scovell définit le système en 4 points mieux que je ne saurais le faire. Au pire, tu auras des suggestions de films de grande qualité, que tu considères qu’ils soient FH ou pas.

https://celluloidwickerman.com/2014/09/25/the-folk-horror-chain/

Et, sinon, il semblerait que John Hillcoat (« Ghosts… of the Civil Dead », « La Route », « Des Hommes Sans Loi »…) prépare un remake de « Witchfinder General ». A voir si ça se fera.

https://www.imdb.com/title/tt5737754/?ref_=nm_flmg_dr_1

Frederick Cooper :

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Michael Peters

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