LE HOBBIT : LA DESOLATION DE SMAUG (Peter Jackson)

La nouvelle bande-annonce :

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J’avoue que la bande annonce me chagrine un peu : le Seigneur des Anneaux, c’est un groupe qui marche (en tout cas pour le premier tiers…). Là, on a un groupe qui saute. Ça saute, ça bondit, ça rebondit, ça dégringole, ça tombe.
Et question dialogue, c’est assez pauvre. « Ce n’est pas notre combat / c’est notre combat » (avec une construction de phrase calquée sur l’américain, sans précaution pour écrire comme parleraient des Français), ou « et si c’était un piège / c’est sûrement un piège », c’est quand même d’une tristesse à pleurer.
Alors ouais, les décors sont magnifiques, et ouais, ça donne envie d’aller voir le film, mais plus pour l’univers que la bande-annonce précède que par la qualité intrinsèque d’icelle.

Jim

J’ai pas vu la bande annonce, mais ce que tu évoques rappelle beaucoup le premier !

La nouvelle bande-annonce :

Making-of : La Maison de Beorn (V.O.)

Bon, alors c’est très bien.
Jolies images, chouettes scènes d’action, des personnages secondaires pas trop mal, une structure en quête pas trop chiante (parce que le résultat de la quête arrive assez vite et parce que l’ensemble à des conséquences sur le reste des personnages, on sent que tout est impacté, que ça dépasse la petite troupe…).
Mais.
Parce qu’il y a un « mais ».
Même plusieurs.

Y a plein de choix qui ne sont sans doute pas les plus judicieux. Séparer Gandalf du groupe (d’autant que l’introduction tourne autour du magicien et de sa science des rouages politiques, le présentant comme plus retors et comploteur qu’à l’accoutumée, ce qui est cool) prive l’équipe et le récit d’un moteur narratif évident, surtout pour se contenter de le montrer allumer la lumière chez les méchants. Les dialogues sont dans l’ensemble assez pitoyables, les extraits de la BA cités plus haut donnant le ton.
Le montage est d’une sécheresse voire d’une rudesse telle qu’on a l’impression que des bouts de secondes ont été rabotés sur des plans mieux pensés sur le plateau, si bien qu’on a des successions de plans dans des scènes où un ou deux plans plus calmes auraient été plus efficaces (le réveil chez Beorn, par exemple, est épileptique). Certains travelling aériens sur des décors sont longuets et répétitifs, comme si le monteur ne se rendait pas compte qu’il disait la même chose d’un plan sur l’autre. Et la caméra tremble souvent (caméra qui tremble plus surmontage pour des scènes calmes égalent gros malaise). De même, les scènes de bastons au corps à corps sont à peu près aussi illisibles que dans les Batman de Christopher Nolan : on comprend rien.
Les multiples petites touches qui donnaient au film précédent (et à la première trilogie) un sentiment de merveilleux ne sont plus là : peu de grands décors naturels étourdissants (malgré la magnifique vue des montagnes brumeuses où courent les Wargs, au tout début), des endroits clos serrés et peu spatialisés (la maison de Beorn, c’est bien gentil, mais l’espace n’est pas très bien défini), pas de rapport à l’animalité passant soit par l’humour soit par la majesté (les lapins de Radagast sont à peine évoqués dans une prise de vue très lointaine). Pour tout dire, voilà, l’image est trop éloignée ou trop rapprochée.
Après, il y a des choix narratifs qui me semblent tourner à la maladresse. Le passage à la douane, dans le bateau de Bard, présente le personnage du douanier, qui visiblement semble connaître le contrebandier, mais il faut attendre cinq ou six plans avant de voir son visage. Et c’est d’autant plus dommage que ledit visage est aussitôt éclipsé par quelqu’un d’autre, donc justement, l’intérêt du jeu est de présenter le premier personnage pour mettre en valeur celui qui arrive après.
Bref, montage bizarroïde, cadrages qui manquent de souffle, acteurs pas convaincants (quelqu’un pensait réellement qu’Evangeline Lilly allait livrer une prestation mémorable ? Elle est toujours mono-expression, aujourd’hui, c’était le petit sourire en coin, demain ce sera quoi ?), pistes narratives pas suivies (l’intro, la visite des prisons, le père de Legolas…), péripéties invraisemblables (l’idylle de Tauriel, sérieux ?), montage parkinsonien…

Bon, tous ces défauts disparaissent quand enfin la petite troupe de nains (tronquée d’un bon tiers, sans doute pour alléger les soucis des scénaristes, bien embêtés à animer tous ces gnomes barbus qui se ressemblent et cherchant desespérément un prétexte pour faire agir deux Elfes qu’ils ont rameuté dans le récit…) s’embarque pour la montagne. Toute la partie Smaug est nettement supérieure, mieux montée, plus dynamique, plus nerveuse, plus héroïque. Question dialogues, ça ne s’améliore pas, mais question image, y a un net mieux.
Et le film se conclut sur un gros cliffhanger. Un très gros.

Reste quand même de bonnes scènes. Mention spéciale de toute la poursuite en tonneaux, qui, pour déclinable qu’elle soit en jeu vidéo, n’en reste pas moins une bonne scène de cascade, de baston, mais aussi de travail d’équipe. On sent le danger (c’est un truc qui manque un peu dans le film, ça, le danger), l’entraide, la solidarité, la cohésion, l’esprit de sacrifice, la stratégie, bref, d’un coup, là, on retrouve l’esprit de l’univers. Et puis, ça ne manque pas de mauvais esprit (Legolas qui marche littéralement sur la gueule des nez, les flèches qui clouent deux têtes à la fois, les crânes en gros plan…), et la petite étincelle Peter Jackson semble renaître l’espace d’un vrai morceau d’épopée.
De même, on se réjouira du côté bidouille technique de certaines scènes. Là encore, la caméra dans l’eau, ça fait son petit clin d’œil Evil Dead et pour une fois, l’image qui danse follement, ça a son utilité. En revanche, on s’étonnera que le versage de lait chez Beorn soit bidouillé à l’informatique : on se demande bien pourquoi.

Bref, c’est très sympa, mais il y a un souffle qui a été perdu en chemin. Il s’est arrêté dans les replis montagneux des dernières images du précédent film. Ça tient à des âneries de scénario (séparer tout le monde pour gérer trois lignes narratives en même temps comme dans les « final » des Star Wars, ça va trois minutes), à un manque de scènes de repos, à des personnages caricaturaux (tiens, encore un dirigeant politique souffreteux et corrompu, que c’est nouveau…) et à une équipe composée de copier-collers.
Reste une seconde partie nettement plus engageante, et qui promet un troisième film qui déboîte.
On verra si la promesse est tenue (en juin, c’est ça ?)

Ça se laisse voir sans déplaisir, les deux heures et des brouettes passent très vite, et c’est très sympa. Mais c’est pas étourdissant et vertigineux comme le reste de la saga nous y avait habitués.
On a peut-être été trop gâtés.

Jim

Bon, je ne l’ai pas encore vu (et j’ai hâte), j’y vais le week-end prochain, mais…

Ca reste fidèle au roman. Gandalf manque (c’est pour ça que Jackson lui a rajouté des scènes), mais Tolkien ne le fait revenir qu’avant la bataille des 5 armées.

Non, décembre comme d’habitude.

[quote=« Le Doc »]Bon, je ne l’ai pas encore vu (et j’ai hâte), j’y vais le week-end prochain, mais…

Ca reste fidèle au roman. Gandalf manque (c’est pour ça que Jackson lui a rajouté des scènes), mais Tolkien ne le fait revenir qu’avant la bataille des 5 armées.[/quote]

Vu le nombre de changements qu’il a effectués, il aurait pu gérer ça autrement. Il fait une trilogie cinéma sur trois ans, pas un roman de 150 pages.

(Purée, depuis dix ans, je me dis qu’il faudrait que je relise Tolkien, mais sérieux, j’aurais JAMAIS le courage…)

[quote=« Le Doc »]

Non, décembre comme d’habitude.[/quote]

Ah bon, j’avais toujours cru que c’était pour l’été suivant.
Là, sur IMDB, ils annoncent août 2014.

(d’ici là, je sens que mon enthousiasme va retomber, je suis quand même moins chaud que l’année dernière, quoi…)

Jim

Moi sur IMDB, j’ai le 17 décembre 2014.

Et oui, Jackson et ses scénaristes font beaucoup de changements, mais sur ce que j’ai vu (et ce que j’en sais) pour l’instant, la structure de l’aventure est respectée (comme pour le SdA en fait).

Ah ouais, j’ai lu au mauvais endroit, t’as raison.

Purée, un an.
Pff.

Jim

Depuis le SdA, quand même tu devrais le savoir que c’est une diffusion annuelle.

Ouais, bah j’avais cru comprendre que Jackson avait tourné les deux dans la foulée, et qu’ils voulaient boucler la diffusion plus vite.
Après, je m’en fous un peu, mais c’est vrai que j’espérais profiter de l’élan, quoi (parce que là, mon élan, il vient d’être un peu coupé, quand même).

Jim

Laisse le temps au marketing de vendre les figurines, les jeux et tout le tralala liés au 2e volet.

[quote=« Vik »]

Laisse le temps au marketing de vendre les figurines, les jeux et tout le tralala liés au 2e volet.[/quote]

Chose qui me passe au-dessus de la tête mais alors totalement.
C’est à peine si j’aperçois du coin de l’œil une figurine quand je vais dans un comic shop (pour n’importe quelle licence, au demeurant). Tout ce qui est produit dérivé, c’est quasiment une autre galaxie, pour moi, je sais que ça existe parce que j’entends des gens en parler…

Jim

je l’ai vu à l’instant.

Depuis le un qui nous affranchit sur la walt disneyrisation du monde, on sait à quoi s’attendre.

En effe,t là où ca marchait désormais ca saute et ca voltige. L’ambiance est clairement différente, mais ne l’etait elle pas dans les bouquins également ?

J’ai pas tres bien compris le coup du nain en or, ni ne voit comment ils vont pouvoir raccorder l’ignorance de gandalf quand au retour de sauron dans le seigneur à ce qui nous est présenté là, mais passé cela, j’ai apprécié.

On est en mode visite du monde, et comme c’est ce qui me plait, ça me plait. De la montagne à la foret, en passant par des forteresses pas si abandonnées, la demeure des elfs pour aboutir au village sur le lac, sans parler de la demeure des nains, on est servi.

Si c’est votre truc.

Après un premier volet dans l’ensemble très fidèle aux premiers chapitres du livre (à quelques ajouts près), La Désolation de Smaug prend plus de libertés tout en respectant le déroulement des événements majeurs de l’histoire…ce qui me va très bien, puisque cela réserve plus de surprises, rend plus cinématographique certaines parties du bouquin un peu plus plates et continue à lier les deux trilogies par petites touches.

Oui, le film a ses défauts. L’utilisation de plus en plus importante de doublures numériques lors des scènes de combat se fait trop visible (ce qui permet tout de même des mouvements de fous dont profite particulièrement Legolas), le montage est un poil saccadé à certains endroits (en attendant la version longue), le personnage de Tauriel n’apporte pas grand chose à l’histoire à part une présence féminine dans un environnement exclusivement masculin (ce qui ne fait pas de mal malgré une romance superflue), et il y a quelques incohérences qui seront je l’espère expliquées lors du dernier volet.

Mais franchement, ces réserves volent pour moi en éclat devant l’exubérance du spectacle. J’ai adoré reprendre la route avec Bilbo et les 13 nains dans un chapitre au rythme très soutenu, aux péripéties virevoltantes qui s’enchaînent jusqu’à un final de toute beauté et un cliffhanger qui va me tenir en haleine pendant un an.
J’aime le sens de la démesure de Peter Jackson, sa générosité dans l’action et l’humour (trop généreux diront certains); une démesure qui prend toute son ampleur dans la présentation du superbe Smaug et des scènes d’action qui s’ensuivent.
J’ai également apprécié les changements concernant certains personnages, une meilleure introduction de Barde l’Archer, une utilisation plus intéressante du maître de Lacville, ce qui sera utile pour les événements précédant la Bataille des 5 armées.
Même si certains nains sont encore une fois un peu laissés de côté dans cet opus, la caractérisation apportée à ces personnages leur donne tout de même plus de vie que dans le livre où ils sont beaucoup moins bien définis (à part Thorin et le gros Bombur, ils se ressemblent tous). L’excellent Richard Armitage tire une nouvelle fois son épingle du jeu dans son portrait d’un Thorin gagné par la folie de ses ancêtres.

Bref, vivement le grand final !