Puisque la série permet de lire les albums séparément, je peux donc l’évoquer en fonction de mes trouvailles sur les rayons des libraires. Et donc, comme ici, parler du tome 2.
Parmi les « merveilles » de l’Antiquité, il y a les Jardins suspendus de Babylone. Enfant, je ne comprenais pas bien l’expression « suspendus ». J’imaginais d’immenses filets retenant des merveilles botaniques au-dessus du vide, et il a fallu que je voie des représentations, sans doute dans des peplums, peut-être dans des livres illustrés, pour me faire une idée de la chose : ce sont (selon les différentes théories, il semblerait que les archéologues ne s’accordent pas sur l’allure du truc, les traces restantes n’étant pas suffisantes pour étayer leurs idées) des jardins luxuriants disposés sur les terrasses de bâtiments colossaux, et abritant un éventail de plantes aussi impressionnant qu’exhaustif pour l’époque.
J’insiste sur ce point parce que c’est l’un des éléments forts de l’album. Le dessin de Roberto Ali, tout en trait, manquant de profondeur et de modelé pour les personnages, s’avère parfois un peu maladroit quand il s’agit de mettre en mouvement les protagonistes, qui d’ailleurs changent de tronche d’une page à l’autre (au point que l’apparition d’un personnage clé un peu plus loin dans l’album me semble tomber à plat, tant on ne la reconnaît pas). En revanche, l’illustrateur livre des décors vraiment impressionnants, tant par leur équilibre que par leur force évocatrice. C’est souvent le contraire, ou trouve fréquemment des dessinateurs représentant des personnages convaincants dans des décors vides, mais l’inverse est rare.
Quant au scénario de Luca Blengino, il rompt un peu avec les autres tomes que j’ai évoqués, dans le sens où le meurtre et l’enquête, présents dans la trame, sont finalement assez secondaires. Le principe est simple : appartenant à la communauté d’esclave, le Juif Hésédiel est convoqué par le roi Nabuchodonosor afin qu’il sauve ses arbres d’une épidémie. S’étant exécuté, l’horticulteur est promu jardinier en chef, jusqu’à ce que le souverain fou le somme de faire pousser une fleur mythique. S’ensuit une quête afin d’en retrouver les graines et de la faire éclore, alors que le temps est compté, et que, dans un an, s’il échoue, il sera assassiné avec sa maîtresse et 99 autres esclaves. Le scénario tourne donc autour de cette quête de perfection, et l’intrigue en croise une autre, celle d’un complot politique visant à renverser le « roi fou ». Mais l’aspect thriller / policier est secondaire, le scénariste s’attachant à la peinture d’idéaux contradictoires. Une guerre sur le terrain du symbole, quoi de plus humain ?
Jim