MAGIC MAGIC (Sebastian Silva)

[quote]DATE DE SORTIE FRANCAISE

28 août 2013

REALISATEUR & SCENARISTE

Sebastian Silva

DISTRIBUTION

Juno Temple, Michael Cera, Emily Browning, Catalina Sandino Moreno…

INFOS

Long métrage américain/chilien
Genre : thriller/horreur
Année de production : 2013

SYNOPSIS

Pendant ses vacances au Chili, Alicia, une jeune américaine réservée, se retrouve embarquée par sa cousine Sara et sa bande d’amis sur une île isolée.
Personne ne fait vraiment d’effort pour intégrer Alicia. Elle se replie de plus en plus sur elle-même et commence à perdre peu à peu ses facultés mentales sans que le groupe n’y prenne garde…[/quote]

La bande-annonce :

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Un film vraiment étonnant. Mais je ne sais pas si c’est lui rendre service que de l’avoir vendu comme un film d’horreur, parce que c’est tout sauf ça…

L’histoire est assez polanskienne, avec un perso féminin virant parano le long d’un crescendo assez démentiel, jouée par l’excellente Juno Temple, désormais habituée à ce type de rôles (un peu comme dans « Killer Joe » ; elle joue ici une version introvertie du rôle qu’elle y tenait). La grande qualité du film, c’est cette retenue dans les effets, avec une façon d’introduire l’étrange par toutes petites touches.
Un regard caméra d’un animal par exemple suffit à induire un sentiment d’inconfort assez étonnant, dans cet univers totalement distordu par le délire apophénique du perso principal, ça et quelques plans de « natures mortes » assez bluffants de beauté, sans esbroufe. Il faut dire que le jeune Sebastian Silva (qui écrit et réalise, après l’inédit « Crystal Fairy », désormais dispo au moins en VOD, je crois) est bien épaulé par Christopher Doyle, l’incroyable chef-op’ de Wong Kar-Wai, qui signe ici un travail époustouflant (des scènes de nuit qui sont VRAIMENT des scène de nuit, une utilisation astucieuse des sources de lumière dans le cadre, des subtils contre-jours…).

Tout ça est très malin en plus, car Silva se livre au petit exercice de reprendre les codes du film d’horreur pour faire tout à fait autre chose (la bande de jeunes isolés dans une baraque paumée, l’inquiétante étrangeté, etc…), dans la démarche inverse d’un Bruno Dumont qui n’utilisait aucun des codes du film d’horreur avec « 29 Palms », qui en est pourtant un. Une étonnante réflexion sur un genre, mais extérieure au genre.
Le plus étonnant c’est cette narration basée sur des fragments plutôt courts, avec un montage plutôt cut, mais pas dans le mauvais sens du terme. Je suis d"habitude plutôt réfractaire aux montages trop nerveux, mais ici c’est parfaitement pensé, comme une sorte de travail sur le « plan fugace », à l’image du titre du film qui s’affiche de manière presque subliminale, quelques fractions de seconde.

Un film vraiment original, qui ne connaît que peu d’équivalents (les films du mexicain Carlos Reygadas, peut-être), et qui est du coup précieux dans le paysage actuel. Si on y ajoute une facture technique irréprochable (j’aurais aussi pu vanter le travail sur le son), c’est Byzance.
Avertissement aux âmes sensibles (j’en suis manifestement), quand même : la fin est absolument déchirante, vous êtes prévenus.