MULTIVERSITY (Grant Morrison / Reis, Lee, Quitely, Oliver, Sprouse, Stewart, Mahnke)

Faudra que je relise alors.

Je n’ai pas détesté Multiversity, mais je n’ai pas accroché. Quand je l’ai pris lors de sa sortie en VO digital, j’ai essayé mais je n’ai pas trouvé le courage d’aller très loin après Pax Americana je crois. J’en suis pas ressorti avec l’impression que je tenais un ouvrage incontournable bien au contraire, j’ai trouvé ça plutôt anecdotique, un peu comme une lubie de l’auteur mais sans pour autant être le pivot sous-jacent à l’ensemble du multivers DC.

(Désolé, le forum n’autorise pas la citation de passages « floutés » et j’ai la flemme de recopier deux lignes de texte.) Vu comme ça, c’est sûr que c’est décevant. Sauf que c’est une lecture personnelle, ou, devrais-je dire, ça reste seulement une des lectures possibles (et effectivement pas la plus intéressante) que de réduire ça à un délire ne reposant sur rien, non ?..

Ce qui me semble relever de l’ambition du scénariste, c’est plutôt ce que je développais dans les paragraphes suivants.

Je passe sur le parallèle proposé entre le boulot d’editor sur une revue anthologique (boulot que j’ai pas trouvé scandaleux personnellement, pour les quelques numéros que j’ai regardés) et celui consistant à donner forme (ou plutôt en l’occurrence à transformer… ou déformer) à l’intégralité d’un univers cohérent impliquant des dizaines de séries et des centaines de personnages…

Venant de ta part, ce genre de leçon est tout à fait savoureux, mais il se trouve que je n’ai pas passé une soirée à pondre mon texte uniquement pour te répondre à toi personnellement. Je pensais aussi plus largement à tous ceux qui peuvent se sentir un peu « perdus » à la découverte — le terme de « guide des égarés » étant tout au plus un clin d’œil à un classique de la philosophie médiévale (le titre original peut d’ailleurs aussi se traduire en « guide des perplexes »).

Mais oui, il se trouve que selon mon interprétation — qui n’est pas tout à fait que la mienne d’ailleurs, je n’ai pas trouvé tout ça tout seul — comprendre ce que l’auteur a voulu représenter via les vilains de l’histoire est 1/ pas évident (on peut facilement « passer à côté ») mais 2/ essentiel si on veut comprendre l’enjeu du bouquin (parce que sans ça, effectivement, il y a de bonnes chances de ressentir un « tout ça pour ça »).

Ça ne veut pas dire que d’autres critiques, d’une part, et/ou d’autres interprétations, d’autre part, sont nécessairement invalides. Et si tu préfères penser que Morrison n’est qu’un gros plouc prétentieux et que tu es tellement au-dessus de ça, grand bien t’en fasse.

Je ne vois pas ce qui motive cette attaque particulière.

L’histoire de Morrison avec Watchemn est longue et un peu complexe mais je ne pense pas qu’il ait jamais réduit le titre à un pur exercice de style (je peux me tromper, évidemment : si quelqu’un me ressort un texte que je ne connaîtrais pas…).

Dans l’absolu, je considère que la meilleure « réponse » de Morrison (avec Millar en coscénariste) à Watchmen est Flash #134 (dispo en VF dans l’anthologie d’Urban), où il reprend certains des thèmes de la BD de Moore et Gibbons sous un angle beaucoup plus positif et « héroïque ».

Deux références que je ne connaissais pas, je l’avoue.

Si tu veux remonter encore plus loin dans le temps, cela dit, la référence aux comics (certes de façon générale) comme un élément moteur de l’inspiration pour le devenir super-héroïque d’un personnage est déjà présente dans le premier numéro de Captain America fin 1940.

Je ne suis pas certain qu’il n’existe pas d’autres exemples encore.

(Reste que chez Fox et Infantino il y a la concaténation de : je lis les aventures d’un personnage de comics, je découvre immédiatement que ce personnage existe dans une ville qui « vibre » à une autre fréquence que mon monde. Il faudra que j’aille y voir de plus près dans les numéros que tu cites pour voir à quel point ça diffère ou ça « annonce », rétrospectivement, cette approche.)

Pour ce qui est de la « lubie de l’auteur », c’est sûr que Multiversity est une sorte d’encyclopédie de toutes ses obsessions. Ensuite, je ne sais pas si le but était de fournir « le pivot sous-jacent à l’ensemble du multivers ».

En tant que vieux lecteur, c’est un sentiment que je n’ai plus très souvent… mais que j’aime beaucoup néanmoins.

Moi non plus, mais y a certaines choses que j’ai appris à aimer. Bon, pas Final Crisis.

Ah bah évidemment, si tu le fais exprès…

(et, euh, on peut savoir pourquoi ?)

Je l’ai plutôt perçu comme une sorte d’exercice de style. Assez souvent avec Alan Moore en ligne de mire (ou en point d’horizon). Ce qui fait que j’ai lu la plupart des récits comme des propositions indépendantes, qui rendaient hommage soit au fond soit à la forme de certaines grandes figures de l’histoire du genre.

C’est aussi une « suite », et en cela une forme de répétition, de Final Crisis, qui elle-même était une répétition de ce qu’il avait fait dans ses JLA. Par conséquent, dans Multiversity, je trouve les deux chapitres d’encadrement assez anecdotiques : ce sont ses visites dans des univers déjà marqués qui m’intéressent davantage.

Jim

Un peu comme Se7en Soldiers, déjà.
N’empêche que j’ai hâte de lire. Même si je suis sûr que mon émotion la plus forte donnée par Morrison demeurera, pour moi, son Final Crisis : si imparfait, mais d’une puissance absolue dans plusieurs passages.
Les cases où Darkseid contrôle le monde, où tous les Humains agissent et parlent comme lui, ça me fait frissonner et ça me terrifie.

Mais c’est une excellente question ça. Faut que j’y réfléchisse (mais y a risque que les X-Men ne soit pas loin)

Même si j’aime beaucoup, ses X-Men ne m’ont apporté que très, très peu d’émotions.
Beaucoup de moments sympathiques, et je salue l’ampleur du travail, mais rien de « fort » en ressenti. A la différence de ses JL, où il parlait l’épique que j’aime.

Qui contourne ses répétitions : la menace est la même (l’humanité risque de perdre son autonomie en perdant son sentiment d’individualité, tout ça tout ça…), mais il parvient à varier les thèmes justement en réécrivant des figures connues, ou pas, de l’univers DC.

Jim

C’est con, mais j’ai beaucoup aimé son Filth. Et le peu des Invisibles que j’ai lu.
Mais la plus forte émotion, je ne sais pas … j’ai en tête la mort de Jean avec Wolvie dans l’avion, ça m’a bien marqué.

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Ah moi, je crois que c’est la fin de ses Animal Man. Une merveille en termes de rapport fiction / réalité, et aussi un grand moment d’émotion.

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animalgrant

Jim

On aimerait bien le connaître, ce grand moment d’émotion, nous pauvres petits lecteurs Français allergiques à la VO.

Gnagnagna.
:wink:

Jim

Pas lu ni Invisibles, ni Animal Man.
Filth m’a laissé de marbre, mais j’étais sûrement trop jeune/inexpérimenté en comics.

J’ai terminé de le lire en vf (j’avais pas tout compris sur la fin en VO).

J’ai adoré.

Du grand art.

C’est peut-être ça qui gêne certains lecteurs…

J’aime beaucoup ces 2 pages d Animal Man dont je ne connais strictement rien si ce n’est que le passage dans 52. Ça transpire l’émotion à venir.
Merci.

Toute la série est bien, avec son discours écolo (« antispéciste », on dirait aujourd’hui), mais il y a bientôt la dimension « quatrième mur », qui s’impose au fil des récits et qui prend une importance inattendue. Et tout le « monde des limbes » dans lequel croupissent les héros oubliés, que traverse Superman à la hauteur de Final Crisis, c’est déjà dans Animal Man.

Jim

Oui, outre (quoique techniquement avant) la rencontre finale avec Grant Morrison, dont on reparle toujours (et c’est normal, parce que c’est effectivement une séquence superbe et géniale), il y a aussi / déjà dans Animal Man pas mal de choses « méta », d’une part autour du caractère fictionnel des personnages mais aussi, d’autre part, autour de la réorganisation de l’ex-multivers DC.

La dernière étape culminante de la série avant la rencontre de Buddy et de son scénariste est ainsi centrée sur le Psycho-Pirate, qui est l’un des seuls personnages, justement, à ce moment-là, à se souvenir du multivers de l’avant-Crise des Terres infinies, et qui essaie de faire revenir / revivre des persos oubliés / effacés de la nouvelle continuité.

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Oui, ses obsessions, ça fait un bail qu’il leur court après, le père Grant, mais ça me rappelle un peu une remarque d’Alan Moore sur Frank Miller, disant que ce dernier raconte toujours la même histoire, mais que personne n’arrive à la raconter comme lui…

Je constate simplement que Multiversity ne raconte rien, il n’y a aucune histoire. Si d’autres en ont lu une, je les envie.

Je rappelle qu’ayant donné mon avis sur cette sortie, tu n’es pas venu donner le tient sur ce qu’était pour toi Multiversity, mais faire la leçon à quelqu’un, je cite « qui est passé complètement à côté du truc… ».

Et dans tout le développement que tu fais, dans un commentaire suivant, il n’est jamais question d’histoire(s), d’intrigues. Il apparaît seulement qu’il faut avoir un master en DC Comics mention Grant Morrison pour lire Multiversity. La belle affaire.

Cela dit, j’ai une bonne connaissance de cet univers, et ça ne m’a pas empêché de trouver ça creux. D’autant plus creux dirais-je même.

Je n’ai rien à dire sur ceux qui aiment les trucs abscons, superficiellement complexe ; pour ma part, et je ne cherche à convaincre ni convertir personne, j’attends de la BD mainstream d’abord des histoires. Si ensuite on y trouve un travail sur la forme, une réflexion sur la BD elle-même, ou sur le monde, etc. tant mieux, je suis preneur. Mais sans intrigue(s), je trouve ça extrêmement vain.

Et là, c’est de mon point de vue, le cas. Tu ne partages pas mon opinion ça n’est pas grave, mais je rappelle que c’est toi qui est venu qui faire la leçon à « quelqu’un qui est passé complètement à côté du truc… ». Moi je n’avais rien demandé.

« Venant de ta part, ce genre de leçon est tout à fait savoureux », ben disons que si je ne partage pas l’avis de quelqu’un sur une BD, je parle du sujet, pas de celui qui l’émet. Contrairement à ce que tu crois je ne fais la leçon à personne. Tu as aimé Multiversity, moi je trouve ça creux, voire sans intérêt. D’autres vont l’aimer, mais ça me va complétement, j’aurais aimé être de ceux-là. À 35 euros mieux vaut trouver que c’est une bonne lecture.

Mais ça n’a pas été mon cas.

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Je vais me corriger par rapport au fait que je n’aime pas le DD de Miller. J’en parle déjà sur le sujet concerné à la série TV. En fait, je n’ai jamais spécialement été attaché à Miller. J’ai effectivement l’impression que Miller raconte toujours la même histoire comme disait quelqu’un ici même.
Le fait est que je n’ai pas d’affinité pour le personnage de DD et que le peu que j’ai lu de Miller sur le sujet ne m’a pas encouragé à creuser, peut être à cause de la violence des récits ou du côté desespéré, de la figure de martyr du personnage … Enfin je pense que c’est tout simplement pas ma came.

Etant fan absolu de Multiversity, je relis actuellement son Final Crisis dont je partage l’avis. Et cette nouvelle lecture de FC est savoureuse connaissant sa suite Multiverselle et notamment l’obscur Superman Beyond