NEWS : LES COMICS AU CINÉMA ET À LA TÉLÉVISION !

T’en penses quoi de « Soyez sympas, rembobinez » ?

Je déteste ce film, pour le dire très clairement.
J’aime bien Jack Black (et d’autres éléments du casting d’ailleurs) et j’avais été le voir en salles pour ça.
J’ai été consterné par le résultat.

En règle générale, ces cinéastes qui se réclament de l’artisanat poético-bricolo-rigolo-prout prout alors qu’ils disposent de budgets de dizaines et de dizaines de millions de dollars pour concrétiser leurs visions me font rire (mais pas dans le bon sens) et m’agacent prodigieusement.
Et je ne parle pas des poses insupportables de Gondry en interview, pendant justement la promo de « Green Hornet », où il se bouchait clairement le nez par rapport au matériau d’origine.
Le summum : dans une interview où il s’exprimait sur les super-héros (catégorie à laquelle n’appartient pas le Frelon Vert, je le précise), Gondry décelait dans leur nature même des traces fascistoïdes ; ça fait longtemps que j’avais pas entendu ce type d’argumentaire d’une connerie sans nom.

Je ne connaissais pas Gondry quand je suis allé voir ce film, et je ne savais pas de quoi il parlait ! (j’avais gagné des places, à une époque où il fallait pas envoyer des textos surtaxés !).

Donc, je n’avais aucune idée du contexte, du budget et j’ai pris l’histoire comme elle m’est apparue sur l’écran, au 1er degré ! Et donc, je me demande si à force d’érudition, d’information, de lecture sur les œuvres et auteurs, on n’apprécie plus une œuvre pour ce qu’elle est (parce que de la manière dont tu exprimes ton amertume sur ce film, tu ne sembles pas parler du film, mais surtout des à-côtés ! Cela dit, je ne dis pas que les à-côtés n’ont pas leur importance, je serais bien malvenu de te faire une leçon de ciné … :wink: )

Parce que quand j’ai lu l’interview que tu cites, à propos du Frelon Vert, bah je n’ai plus vu Gondry de la même façon ! Et je n’ai pas encore regardé le Frelon Vert (cependant, je pense que je prendrai quand même du plaisir à regarder à nouveau Soyez Sympas, rembobinez !

Donc si je comprends bien, plus on se renseigne sur un travail artistique et les personnes derrière et moins on est équipé pour le décrypter correctement ? Ce serait le comble, ça.

Ceci dit, il me semble voir ce que tu essayes de dire ; je n’avais pas spécialement de grief contre Gondry à ce moment-là (je connaissais pas ses films), mais ce que j’ai vu a suffit à me convaincre que c’était pas pour moi. Refaire des films qu’il prétend avoir aimé (mais n’a jamais revu, de son propre aveu) mais qu’il déteste profondément, avec le sourire ricanant en coin, très peu pour moi.

[quote=« Photonik »]

Donc si je comprends bien, plus on se renseigne sur un travail artistique et les personnes derrière et moins on est équipé pour le décrypter correctement ? Ce serait le comble, ça.[/quote]

Oulala, je me suis visiblement mal exprimé ! :blush: Loin de moi de vouloir te faire la leçon, surtout à ce sujet !
Non, ce que je voulais dire, c’est qu’en tant que naïf, je prends le film de manière brut, sans savoir ce qu’a voulu en faire ou faire dire le réalisateur !
Je le prends au premier degré ! Évidemment que si je m’étais renseigné sur ce sujet, je l’aurais appréhendé autrement ! Heureux est l’idiot, comme on dit ! :wink:

(et je parle là uniquement de Soyez sympas, rembobinez !)

[quote=« Photonik »]Je déteste ce film, pour le dire très clairement.
J’aime bien Jack Black (et d’autres éléments du casting d’ailleurs) et j’avais été le voir en salles pour ça.
J’ai été consterné par le résultat.

En règle générale, ces cinéastes qui se réclament de l’artisanat poético-bricolo-rigolo-prout prout alors qu’ils disposent de budgets de dizaines et de dizaines de millions de dollars pour concrétiser leurs visions me font rire (mais pas dans le bon sens) et m’agacent prodigieusement.
Et je ne parle pas des poses insupportables de Gondry en interview, pendant justement la promo de « Green Hornet », où il se bouchait clairement le nez par rapport au matériau d’origine.
Le summum : dans une interview où il s’exprimait sur les super-héros (catégorie à laquelle n’appartient pas le Frelon Vert, je le précise), Gondry décelait dans leur nature même des traces fascistoïdes ; ça fait longtemps que j’avais pas entendu ce type d’argumentaire d’une connerie sans nom.[/quote]

Rembobinez, je ne l’ai vu qu’une fois, mais quand je l’ai vu, je me suis dit « mais… attends… minute… il est en train de nous faire un film de super-héros sans en avoir l’air, là, l’escroc !!! » Et me souvenant de ses postures de vierge effarouchée, j’ai un peu ri jaune. J’ai pas détesté le film (mais je ne me souviens pas de la fin), mais j’ai trouvé le bonhomme hypocrite.

[quote=« Photonik »]

Donc si je comprends bien, plus on se renseigne sur un travail artistique et les personnes derrière et moins on est équipé pour le décrypter correctement ? Ce serait le comble, ça.[/quote]

Je crois pour ma part que c’est une question de fond.
Dans les fameux échanges entre Sand et Flaubert, ce dernier, de mémoire, disait « l’homme n’est rien, l’œuvre est tout ». Il entendait par là que l’auteur ne doit pas s’utiliser en tant que matériau, l’exigence flaubertienne demandant de ne pas se mettre en avant (il disait que l’auteur ne devait pas plus apparaître dans son œuvre que dieu dans la nature).
Dans son idée, ce propos se limitait à l’œuvre. Pas aux commentaires extérieures à l’œuvre (Flaubert a bien dû se mettre en avant pour Madame Bovary, mais c’est la seconde dimension du truc, un deuxième effet kiss pas cool). Grosso modo, il se prononce contre une littérature nombriliste (il gueulerait face à la « littérature sans estomac », comme l’appelle Pierre Jourde, qui fleurit de nos jours).
Mais je crois qu’on peut légitimement étendre sa citation à plus loin. Moi qui écris des bouquins sur des auteurs, je me pose toujours la question de savoir s’il est pertinent de raccrocher une expérience personnelle de l’auteur au contenu de sa création. Je crois que c’est secondaire.
Et surtout, pour en revenir à Gondry, je crois que cela fausse le jugement. Lire des interviews de l’auteur, connaître des détails biographiques, ça perturbe la perception, la lecture elle-même. Choron disait « il ne faut jamais rencontrer ses lecteurs », on aurait envie de lui rétorquer qu’il ne faut pas non plus rencontrer ses auteurs. Ça change trop de choses. On perd le regard du lecteur. On risque la surinterprétation, ou l’excuse, ou le prétexte.

Jim

Ah non, mais y’a pas de soucis, Soy, je te rassure. On discute simplement. :wink:

[quote=« Jim Lainé »]
Je crois pour ma part que c’est une question de fond.
(…)
On perd le regard du lecteur. On risque la surinterprétation, ou l’excuse, ou le prétexte.

Jim[/quote]

C’est un débat passionnant, et potentiellement sans fin.
Perso, j’aurais finalement plutôt tendance à penser qu’une approche trop « biographique » présente plus d’inconvénients que d’avantages. C’est le reproche que je ferais à un Onfray dont il était question il n’y a pas très longtemps, quand il attaque des philosophes ou des penseurs au sens large sur leur parcours biographique.
Qu’un Sartre (ou un Freud) soit un arriviste, un salaud, un lâche ou tout ça à la fois ne me semble pas disqualifier leur travail a priori.

Sur l’exemple de Gondry (dont je ne sais strictement rien de la biographie en l’occurrence), je me borne à me baser sur ce qu’il pense du matériau qu’il adapte (ou en tout cas de choses très voisines dans l’esprit) ; si c’est pour se pincer le nez, qu’il fasse autre chose, on a envie de lui dire.
Bien content qu’il ait laissé tomber l’adaptation de « Ubik », tiens.

[quote=« Photonik »]…]
Qu’un Sartre (ou un Freud) soit un arriviste, un salaud, un lâche ou tout ça à la fois ne me semble pas disqualifier leur travail a priori.

…][/quote]

Un peu quand même pour un philosophe et un psychanalyste.
Tout comme pour un ministre qui aurait des comptes dans des « paradis fiscaux » ou qui ne paierait pas ses impôts.
Ou un flic malhonnête, ou qui ferait des excès de vitesse

Il y a des « professions » où on ne peut pas (selon moi) enlever la biographie si je puis dire).

Dans le cas du flic ou du ministre, ça me semble évident. Dans le cas du philosophe ou du psychanalyste, pas du tout.
Peut-être qu’exercer un « pouvoir » entraîne un devoir d’exemplarité, je ne saurais me prononcer de façon trop catégorique. Produire des concepts, des théories ou des objets culturels ne me semble pas du tout relever du même ordre.

Je te donne un exemple : je te lis avec assiduité et prends en compte ton point de vue sur des sujets qui m’intéressent. Et si ça se trouve, selon mes critères, tu es peut-être la dernière des raclures. :wink:
Car je ne te connais pas ; pourtant cette possibilité/probabilité n’invalide en rien l’effet de ce que tu écris sur moi.

Bon, évidemment, tu pourras m’objecter (et tu n’auras pas tort) qu’il y a toujours quelque chose de l’ordre des atomes crochus ou de qualités humaines évidentes qui percent dans ce que l’on peut écrire, ne serait-ce que les questions de courtoisie que vous évoquiez par ailleurs avec Jim…

[quote=« Photonik »]Et si ça se trouve, selon mes critères, tu es peut-être la dernière des raclures. :wink:
Car je ne te connais pas ; pourtant cette possibilité/probabilité n’invalide en rien l’effet de ce que tu écris sur moi.[/quote]

Sauf que tu ne le sais pas. Pourrais-tu dire la même chose s’il s’avérait que Artemus Dada fait partie de l’Hydra ?

Ce qui, en soit, va dans le sens de Soyouz. Moi qui ne lis pas d’interview de Gondry, je ne savais pas que les films qu’il rejoue sont des productions qu’il déteste, donc ce n’est pas une donnée qui parasite ma vision de Soyez sympa, rembobinez ! Je pensais même que c’était l’inverse.

Par contre, Le Frelon Vert, c’est un film dont je ne garde aucun souvenir. C’est dire s’il m’a marqué.

[quote=« Jack! »]

[quote=« Photonik »]Et si ça se trouve, selon mes critères, tu es peut-être la dernière des raclures. :wink:
Car je ne te connais pas ; pourtant cette possibilité/probabilité n’invalide en rien l’effet de ce que tu écris sur moi.[/quote]

Sauf que tu ne le sais pas. Pourrais-tu dire la même chose s’il s’avérait que Artemus Dada fait partie de l’Hydra ?[/quote]

Une branche dissidente seulement, ça compte (l’Hydra Vion) ?

Lors de sa sortie, le coté « grosses bottes et outrance » de The Boys m’a rapidement ennuyé. Et puis un jour, je me suis fait l’intégrale de la série et j’ai découvert, en avançant, qu’Ennis fait preuve d’un peu plus de finesse dans la caractérisation de ses personnages (comme souvent chez l’auteur).

C’est pas un sommet de la bande-dessinée américaine, le tout manque de surprises (comme souvent chez Ennis), mais c’était « moins pire ». Et puis l’aspect violent et la tournure en dérision m’ont fait marrer d’un coup. Allez comprendre…

Je suis de l’Hydra-T. On travail avec des agents sous-marins.

[quote=« Jack! »]…] il s’avère que l’auteur fait preuve d’un peu plus de finesse dans la caractérisation de ses personnages en avançant.

…][/quote]

Comme c’est souvent (?) le cas avec lui, j’ai relu Just a Pilgrim est c’est, sous des dehors bourrins, très finaud et bluffant (Pour en savoir +).

[quote=« Jack! »]

) ?
Je suis de l’Hydra-T. On travail avec des agents sous-marins.[/quote]

Respect !

Je suis Hydra-lin, agent de la Team !

[quote=« Jack! »]
Sauf que tu ne le sais pas. Pourrais-tu dire la même chose s’il s’avérait que Artemus Dada fait partie de l’Hydra ?[/quote]

HA HA HA !! :mrgreen:
Je sais pas ; il paraîtrait que ça arrive même à des gens très bien. :wink:

[quote=« Photonik »]
C’est un débat passionnant, et potentiellement sans fin.
Perso, j’aurais finalement plutôt tendance à penser qu’une approche trop « biographique » présente plus d’inconvénients que d’avantages. …][/quote]

J’ai pour ma part un point de vue différent du votre, ce que fait un auteur n’échappe pas à sa biographie.
Je vais prendre des exemples dans la BD, Onfray nous entraînerait trop loin et dans un hors-sujet.

Par exemple on apprend en lisant le bouquin de Sean Howe que tel ou tel scénariste utilisait de la drogue à une période donnée et ces scénaristes utilisaient leurs expériences dans leurs BD, et ce même **Sean Howe ** écrit que Steve Gerber était un type clean, pour ma part ce sont là des éléments importants lorsqu’on aborde l’oeuvre de ces gens.

Cela ne nous fait pas faire l’économie de recherches sur leur travail mais c’est important.

Idem pour Steve Ditko de savoir qu’il est un objectiviste, j’en avais discuté avec Tristan Lapoussière l’auteur d’un essai sur Ditko (Pour en savoir +) en lui « reprochant » pour le dire vite de justement être passé trop vite sur cet aspect.
Un aspect qui condition les prises de position du co-créateur de Spider-Man.
Et ses scénarios peuvent être observé avec cette grille de lecture.

Et a contrario **Ditko **ne prenait pas de drogue et n’avait pas d’accointance avec le milieu hippie, et si on ne connait pas sa biographie, en lisant Dr Strange on peut croire le contraire.

J’ai appris en lisant le livre de Sean Howe le montant des différents contrats de Stan Lee, ou plus précisément de certains contrats et pour ma part ça explique (du moins en partie) pourquoi Lee n’a pas revendiqué de droits de propriété sur les personnages Marvel par exemple.
Non pas qu’il y ait de relations de cause à effets forcément, mais c’est un angle d’attaque.

En outre ça ne « fausse pas le jugement » comme le dit Jim, à moins de croire que ce qu’on écrit est parole d’évangile.
Si on fait un travail honnête disons, qu’on reconnait la part de subjectivité de ce qu’on écrit (ou dit) et qu’on cite ses sources, la biographie et une pierre angulaire du travail critique.
Ce n’est pas la seule, mais elle est tout aussi essentielle que la place de la BD a un moment donné de l’histoire, sa réception, la manière dont travail un editor, ce qu’est un editor, ce qu’est le work for hire, qu’est ce que ça veut dire d’être payé 10 cents le mot en 1930, qu’est-ce qu’un pulp magazine, un slick magazine, etc.

Encore dernièrement je lisais (je ne sais plus où) que Superman avait été inventé par deux immigrés.
Ce qui d’une part est faux, mais qui fait sens si on sait que Superman est lui aussi un immigré et qu’on veut mettre l’accent sur cet aspect.
Sauf que dans la première histoire de Superman, et dans les pages des bandes produites pour les journaux cet aspect prend tout au plus deux cases.

On voudrait nous faire croire que Shuster & Siegel mettaient en avant la notion d’immigré.
Alors que si on s’intéresse à la biographie de Siegel par exemple on sait qu’il était un fan de science-fiction il écrivait même un fanzine, et que ce genre de motif était très présent à l’époque dans les pulp magazines, des Terriens qui d’une manière ou d’une autre se rendent sur d’autres planètes et en deviennent le héros.
Otis A. Kline s’en était fait une spécialité, je le « soupçonne » même d’avoir réécrit le roman de Robert E. Howard Almuric (Pour en savoir +).
Et il n’était pas le seul.

Je ne dis pas qu’ensuite Siegel & Shuster n’ont pas développé cette idée en ayant en point de mire l’immigration aux USA, mais il faut savoir aussi qu’en tout état de cause, dans les années 1930 le pays comptait des immigrés intérieurs si je puis dire, les hobos, que un peu moins de dix ans avant la création de Superman le détective hard-boiled voit le jour ; et les première aventures de Superman ont un petit parfum hard-boiled (Pour en savoir +).

Autre exemple il m’ait souvent arrivé de lire que le père de Siegel était mort, tué par une balle, ce qui expliquerait que Superman y soit insensible.
Jeter un œil attentif sur la biographie de Siegel donne un autre son de cloche.
Savoir que Shuster était un adepte du culturisme, et qu’il connaissait « forcément » Charles Atlas (Pour en savoir +), les deux auteurs rendent d’ailleurs un hommage à ses cours dans les pages de la BD (Pour en savoir +).

Bref, la biographie, le contexte, tout ça est utile et nécessaire (de mon point de vue en tout cas) si on veut faire des appareils critiques de qualité et sortir des sentiers battus.
Par exemple, savoir qu’Alan Moore s’intéresse à la magie permet d’écrire un article où le label ABC Comics devient un sigil (Pour en savoir +). :wink: