SUPERMAN t.1-3 (Grant Morrison / Rags Morales)

[quote=« Zeid »]
c’est surtout le deuxième que j’ai aimé. D’une part, parce que KUBERT… et moi, j’adore KUBERT. D’autre part, parce que c’est là que j’ai vraiment eu l’impression de retrouver MORRISON: rien que le coup de la balle téléportée dans sa tête et qui est en fait un tesseract pouvant abriter plus d’espace en son sein qu’à l’extérieur, ça le fait. Bref, j’espère que ces K-Men seront réexploités plus tard, mais en tous cas, ce couple d’épisodes m’a vraiment captivé.[/quote]

j’aime beaucoup les premiers episodes, mais c’est vrai que ce doublé d’episodes est totalement savoureux.

Je prend le run pour une cartographie de toutes les histoires possibles à faire avec superman.

Pour ces k-men connaissant morrison c’est forcé qu’on les revoit avant la fin du run

[quote=« Blackiruah »]

Ce passage m’a complètement embrouillé perso, mais surement parce que je suis un novice. [/quote]

Disons que la bataille qui a lieu dans le vaisseau de Brainiac a également lieu dans la balle figée à l’intérieur de la tête de Clark… (une balle tirée par Zarov engagé par Nimrod, et cette balle a été téléportée directement dans la tête): l’extérieur est à l’intérieur qui est aussi l’extérieur. C’est pour cela que quand la kryptonite du moteur est endommagée à l’extérieur, le corps de Clark est alors empoisonné ! Mais il se sert justement de cet empoisonnement pour alimenter sa fusée…

C’est pour empêcher ça que les mecs de la Légion reviennent dans le temps pour infiltrer les K-Men, cachés dans le cerveau de Clark, dans cette balle. Qui viennent eux-même du futur, comme on le comprend dans l’une de leurs premières répliques sur la forteresse de solitude. En fait l’armée anti-Superman composée des K-Men vole le moteur à kryptonite du vaisseau.

Bref, je sais pas si j’ai été clair, ni si j’ai tout bien compris en fait.

Certains pourraient confirmer, mais je pense que c’est nouveau tout ça. En tous cas, l’intrigue est du pur MORRISON.

Oui bah c’est un peu cela. On notera que l’approche de MORRISON rejoint finalement celle qu’il avait adopté sur All Star Superman: il tente de réutiliser des concepts de différentes époques pour en faire une nouvelle mythologie. J’aime bien aimé notamment la réutilisation de Krypto :slight_smile: Par ailleurs, un des K-Men ressemble beaucoup au Superman bandé d’All-Star !

Pour le reste, les notes de fin sont, je le dis encore une fois, très sympa ! les auteurs y expliquent par exemple pourquoi ils ont fait de Lex un personnage un peu fort, loin de l’acteur de Smallville ou de la montagne de muscles qu’on a souvent eu ces dernières années.

Je suis vraiment désolé Zeid, mais du coup, tu…m’embrouilles encore plus XD.

Mais merci pour l’effort. (J’ai pas compris l’histoire comme ça du coup je finis ma critique et je vais reparcourir ça)

[quote=« Blackiruah »]Je suis vraiment désolé Zeid, mais du coup, tu…m’embrouilles encore plus XD.
[/quote]

Je pense que ces épisodes méritent d’être relus, car c’est typiquement le genre de truc à la MORRISON où tu sais que des trucs t’échappent :smiley:

Par exemple, à un moment, les K-Men neutralisent des mecs sous une capuche… et voient que ce sont d’autres K-Men… bah là, j’ai pas compris qui ces trois mecs étaient ? J’ai pensé qu’il s’agissait de ceux remplacés par la Légion ou autre, mais je dois bien dire que même en m’y repenchant, ça m’a pas paru hyper clair.

Ou plutôt son approche habituel quand il prend la tête d’une série D.C/Marvel.

[quote=« Guy Gardner »]

Ou plutôt son approche habituel quand il prend la tête d’une série D.C/Marvel.[/quote]

Tout simplement en fait :smiley:
Mais j’avoue que pour les X-Men ça ne m’a jamais autant marqué que pour un Superman ou Batman… certainement aussi parce que les X-Men n’ont pas le même passé et donc des différences aussi marquées que les perso de DC. Bien sûr, il suit le même genre de schéma pour la série, mais ne peut pas jouer de la même manière que chez DC où il s’amuse avec des trucs dont DC a cherché à se débarrasser (les aventures très légères et très « n’importe quoi » du Golden et Silver Age… franchement, qui aurait pu penser revoir la Batmite comme ça ? Ou le Club des héros ? Ou même le Batman de Zur-En-Arrh ?).

[quote=« Guy Gardner »]

Oui bah c’est un peu cela. On notera que l’approche de MORRISON rejoint finalement celle qu’il avait adopté sur All Star Superman: il tente de réutiliser des concepts de différentes époques pour en faire une nouvelle mythologie. J’aime bien aimé notamment la réutilisation de Krypto :slight_smile: Par ailleurs, un des K-Men ressemble beaucoup au Superman bandé d’All-Star !

Ou plutôt son approche habituel quand il prend la tête d’une série D.C/Marvel.[/quote]

Morrison propose un concept facinant (peut-être qu’il ne fait que le rprendre ceci dit, mais pas à ma connaissance) : il parle de « narration ergosodique ». C’est un terme qui vient de la thermodynamique…
On dit d’un système qu’il est ergosodique lorsque toutes les configurations possibles en son sein finissent toutes par se réaliser au bout d’un laps de temps assez long. Tout ce qui était possible finit par se produire à un moment.
Donc une narration ergosodique se propose d’épuiser les possibilités de récit offerte par son postulat de base.
Morrison donne un exemple très très intéressant : il présente « Le Prisonnier » comme la première fiction ergosodique à laquelle il ait été confronté. Un type de narration faits de séries (au sens premier du terme), de modules, et qui n’a pas peur des contradictions (la localisation du Village en est un exemple, il y a des infos contradictoires).

On peut penser que le run de Batman, de ce point de vue « ergosodique », est l’exemple le plus abouti de tentative de cet ordre chez Morrison : il essaie littéralement de raconter TOUT ce qu’il est possible de raconter sur le personnage (d’où l’emploi des doubles, des ersatz, des copies dégradées…qui sont aussi des outils de réflexion sur la consommation de masse et la marchandisation de la culture).

Mais comme le dit Guy on peut probablement l’étendre à la majorité de ses travaux mainstream.

[quote=« Photonik »]…]

Morrison propose un concept facinant …] il parle de « narration ergosodique ». C’est un terme qui vient de la thermodynamique…
On dit d’un système qu’il est ergosodique lorsque toutes les configurations possibles en son sein finissent toutes par se réaliser au bout d’un laps de temps assez long. Tout ce qui était possible finit par se produire à un moment.
Donc une narration ergosodique se propose d’épuiser les possibilités de récit offerte par son postulat de base.
Morrison donne un exemple très très intéressant : il présente « Le Prisonnier » …][/quote]

Où l’Ergosodysée morrisonnienne nous mènera-t-elle ?

**Morrison ** a toujours des idées, c’est indéniable ; mais il me semble qu’un *run * où toutes les configurations possibles sont épuisées passe à côté de ce qui fait une -justement- histoire. Et l’exemple du **Prisonnier ** est singulièrement intéressant.

D’une part c’est l’exemple parfait de la série culte dans le sens premier du terme, c’est-à-dire un très faible public au départ qui entretien la flamme (presque en secret) jusqu’à ce que, en dépit de ses forces ou de ses faiblesses, l’objet adoré par une minorité devienne incontournable pour les faiseurs d’opinion et par une large majorité du public.

Ceci étant dit Le Prisonnier est le type même de série qui à force d’épuiser son sujet (à mon avis cette série échappe totalement à McGoohan il n’y a rien de volontaire là-dedans), épuise totalement son public et devient un énorme gloubi-boulga incompréhensible.

Si je pense qu’une histoire n’a pas besoin d’être « réaliste » (surtout une histoire de Superman), pour moi elle doit être cohérente, et l’exemple de la localisation du **Village ** est un bel exemple. Si le **Village ** ne peut-être localisé, il doit y avoir une explication qui entre en résonance avec le propos de la série (et serve l’histoire) ; mais si cette série veut épuiser toutes les possibilités elle n’a pas de ligne directrice. Le Rien n’est vrai tout est permis de Burroughs est une très belle formule reste à savoir si elle fait de bons livres.

Je repense à quelque chose : je viens de regarder 12h01 Prisonnier du temps et Retroactive/Rétroaction (1993 tous les deux) ; deux films qui tentent -tous les deux- d’épuiser leur sujet (en tout cas ils m’ont épuisé) avec une histoire de boucle temporelle (ce n’est pas la même chose que ce veut faire Morrison certes). Mais le problème c’est que ces deux films deviennent victime de leur procédé. On ne peut pas épuiser le sujet et si on tente de le faire c’est trop long, en outre la fin est toujours décevante et plate.
Reste le procédé.

J’espère que Grant Morrison fera mieux.

Dans Le Prisonnier, la localisation fluctuante est implicitement expliquée par le jeu de faux semblants perpétuel et orwellien, par le culte du mensonge et de la désinformation des officines qui ont mis en place le Village.

Après, plus le temps passe, plus je trouve le Prisonnier assez prophétique (« alors toute la terre ressemblera au Village ? » « Oui ! Qu’est-ce que vous en pensez ? » « que je voudrais être le premier habitant sur Mars », in l’épisode The General/Le Cerveau, dont le changement de titre entre la VO et la VF est l’illustration formelle du fond orwellien)

Par ailleurs, le « Rien n’est vrai tout est permis » n’est pas de Burroughs. Rien qu’au vingtième siècle, on le retrouve déjà chez Vladimir Bartol, qui l’attribue à un personnage du onzième siècle, l’activiste persan Hassan Ibn Sabbah (apôtre de la défonce comme Burroughs, mais pas de la même façon)

Dans le genre « épuisement d’un personnage par jeu combinatoire et paradoxe temporel », je ne peux que recommander à tous la lecture des trois tomes de Tengu-Do, qui joue précisément à ça.

« Tengu-Do », je me note ça, ça m’intéresse du coup.

C’est bien Hassan Ibn Sabbah, le « Vieux de la Montagne », fondateur de la secte des Haschichins (comprendre « Assassins », puisque c’est l’origine étymologique de ce mot), qui aurait prononcé le célèbre aphorisme burroughsien le premier ; je crois que Burroughs cite lui aussi sa source en diverses occasions, d’ailleurs (surtout dans ses essais).

Pour « Le Prisonnier », dont je suis un fan indécrottable, on peut éventuellement « justifier » les infos contradictoires d’un point de vue scénaristique, en effet. Mais on peut aussi considérer, à l’aune de la conclusion de la série, que toute l’histoire est la mise en images allégorique du combat intérieur d’un homme pour se libérer de lui-même.
La cohérence peut être battue en brêche si la portée symbolique « dépasse » le besoin de cohérence : le face-à-face final entre le Numéro 6 et le Numéro 1 illustre cette idée je crois.

Après, je suis quand même d’accord avec Artie en grande partie : non, toutes les histoires ne s’y prêtent pas, et oui, dans le cas de McGoohan, il y a sûrement une part d’aléatoire qui rentre en ligne de compte.
Mais je trouve quand même cette grille de lecture de la série intéressante : mêmes les épisodes généralement considérés comme « superflus » (l’épisode western par exemple) prennent une aura différente à la lumière de cette idée « ergosodique », dans le genre « variations sur un thème ».

Dans le cas de Batman, étant donné le nombre de copies / ersatz à disposition sans même que Morrison ait eu besoin de les créer (le Club des Héros, Jason Todd et j’en passe), Morrison peut ménager la chèvre et le choux, la cohérence et l’épuisement des possibles, puisque ce n’est pas forcément le « vrai » Batman qui est toujours au centre des évènements. Ex : Jason Todd tue Flamingo, son « Joker » à lui, ce qui n’implique pas que Morrison se débarasse pour de bon du Joker.

[quote=« artemus dada »]

Où l’Ergosodysée morrisonnienne nous mènera-t-elle ?

Si je pense qu’une histoire n’a pas besoin d’être « réaliste » (surtout une histoire de Superman), pour moi elle doit être cohérente, et l’exemple de la localisation du **Village ** est un bel exemple. Si le **Village ** ne peut-être localisé, il doit y avoir une explication qui entre en résonance avec le propos de la série (et serve l’histoire) ; mais si cette série veut épuiser toutes les possibilités elle n’a pas de ligne directrice. Le Rien n’est vrai tout est permis de Burroughs est une très belle formule reste à savoir si elle fait de bons livres.[/quote]

J’aime bien le terme d’ergosodysée.

Pour le reste, il ne faut pas confondre à mon sens cohérence et linéarité ou encore continuité (dans le sens de narration continue, sans coupure), ni même poser tout cela comme nécessaire à un dire.

Les rêves sont souvent construits autour de signifiants, dont les différentes variations de sens sont épuisées dans le rêve. Cela n’empêche pas qu’un dire singulier s’en dégage et j’ajouterais bien au contraire.

La poésie, cette longue hésitation entre le sens et le son, pouvions nous lire dans le métro parisien il y a quelque mois. C’est d’à propos, parfois il faut épuiser le sens pour que jaillisse le son et avec lui peut être, si ce n’est un sens supplémentaire en tout cas quelque chose qui touche au vivant de la langue.

L’ergosodyssée apparait ainsi comme une manière d’épuiser la fiction et son cadre normatif et figé (début, milieu, fin, cause conséquence, enjeu, dénouement…) pour l’amener au plus près de ce qu’il peut y avoir de vivant en elle, une écriture onirique donc qui n’en est pas moins logique et précise.

Cela me fait penser à une analyse percutante dans l’ouvrage des moutons sur Kirby. Les auteurs mettaient en avant que bien que détaillés en terme de décors, les dessins de Kirby ne permettaient jamais d’établir l’architecture d’une pièce, l’agencement d’une rue, contrairement à un hitch par exemple.
Ils voyaient en cela l’une des clefs de l’extraordinaire énergie qui se dégageait de ces dessins, où la réalité dans ces derniers étaient à chaque dessins redéfinit et donc toujours en mouvement.

A ce titre l’espace Kirbyien n’est euclidien, ni même cohérent. Ca n’en fait pas un gloubiboulga pour autant. Lynch, morrison, le prisonnier, Joyce, chacun travaille a sa manière la matérialité même de leur parole.

Lacan disait dans l’étourdit « qu’on dise, reste souvent oublier derriere ce qui se dit de ce qui s’entend », ce sont là des auteurs qui cherchent à ne pas l’oublier et dans leur écriture à le faire percevoir, du coup ce qui se dit et ce qui s’entend s’en trouve fissuré, ce n’est pas un mal.

Par honnêteté, je me dois de signaler que je ne suis pas le type le plus objectif pour en parler.

Mais de fait, on est totalement dans ce dont on parle, avec le jeu sur le double, la boucle, le mensonge et la dissimulation comme réinvention du réel.

Ah d’accord !! Tu en es l’auteur en fait…
Ben moi je trouve que ça te met pas mal en situation d’en parler, non ?

Y’a un p’tit côté « Ronin » de Miller dans le très bref résumé que j’ai trouvé sur le Net, ça aussi me paraît intéressant.
Par contre, « Tengu » traduit par « démon », ça m’étonne un peu : le Tengu n’est-il pas une forme hybride entre l’homme et l’oiseau (j’ai un pote spécialisé dans le Zen qui avait écrit un très beau texte sur cette figure mythologique), plutôt, et pas forcément démoniaque d’ailleurs ?

Joyce

[quote=« Nikolavitch »]…]

Par ailleurs, le « Rien n’est vrai tout est permis » n’est pas de Burroughs. …][/quote]

Oui je sais que l’on prête cette citation au Vieux de la Montagne, mais j’ai pris **Burroughs ** car **Morrison **l’a cité dans des entretiens.

Je veux bien, mais pour moi le symbolique, le méta-discours, la réflexion sur le médium etc. … ne vaut que si il y a une histoire au premier degré. La BD, les séries télévisées, les films ne m’intéressent que si il y a une histoire, des personnages, etc. … Tant mieux si il y a plus, mais sans histoire je ne suis pas client.

Je ne crois pas qu’un rêve fasse une histoire encore moins une bonne histoire.

Je crois que le problème de ce genre de projet ne peut en aucun m’intéresser.

[quote]
Joyce, chacun travaille a sa manière la matérialité même de leur parole [/quote]

Ça fait deux fois que Joyce est cité en peu de temps, et il me paraît l’exemple même du gloubi-boulga littéraire. En tout cas pour moi c’est illisible.

J’aime bien Lacan je cite souvent une phrase qu’on lui prête « Tout le monde ne peut pas parler chinois dans sa propre langue », on peut lui faire confiance sur ce point, car il était le premier à le faire. Et je pense que **Joyce **aussi.

[quote=« n.nemo »]…]

Cela me fait penser à une analyse percutante dans l’ouvrage des moutons sur Kirby. Les auteurs mettaient en avant que bien que détaillés en terme de décors, les dessins de Kirby ne permettaient jamais d’établir l’architecture d’une pièce, l’agencement d’une rue, contrairement à un hitch par exemple.
Ils voyaient en cela l’une des clefs de l’extraordinaire énergie qui se dégageait de ces dessins, où la réalité dans ces derniers étaient à chaque dessins redéfinit et donc toujours en mouvement.

A ce titre l’espace Kirbyien n’est euclidien, ni même cohérent. Ca n’en fait pas un gloubiboulga pour autant…][/quote]

Ou plus simplement **Kirby **(et beaucoup d’autres) ne faisait pas de plan des espaces qu’il dessiné. Au demeurant je ne fais pas partie des gens qui tentent de dessiner le Baxter Building à partir des cases de Kirby. Encore moins si l’architecture des espaces intérieurs n’a aucune résonance sur l’histoire. Et quand bien même.

C’est amusant que tu cites l’ouvrage sur Kirby des Moutons, car il m’a fait l’effet d’être en chinois dans ma propre langue.

J’avais lu les Tengu-Do à l’époque de la prépublication et j’en garde un assez bon souvenir quoi que diffus… la parution plus que chaotique du mag des Humano y est liée, et je dois bien avouer que je ne sais même plus si la fin était parue dans le mag ou non. Si ça n’est pas le cas, je n’ai donc jamais lu la fin… comme pour beaucoup de séries pourtant très bien de ce mag (Alter notamment, que j’avais trouvé excellent). Dire que le *Crusades *d’Alex était destiné à y être publié également :slight_smile: Je préfère mes volumes reliés en tous cas :smiley:

Alors, non, la fin n’était pas sortie en mag (elle correspond au tome 3 : Maitre).

en ce qui concerne la notion de Tengu, j’ai délibérément joué sur une ambiguité de la créature qui, si elle n’est pas intrinsèquement maléfique, peut le devenir, et il l’est dans la perception qu’en ont les personnages du récit. Dans le cas présent, il joue le rôle d’une rupture de réalité, de l’irruption dans le réel d’un élément perturbateur étranger et surnaturel (ce qui est une des définitions du fantastique, d’ailleurs).

Rapprochement tout à fait juste me semble-t-il, d’autant que le surnom de « Burroughs des temps modernes » accolé à Morrison (par Metzger par exemple) me paraît très pertinent…

Je crois qu’on confond deux choses là : l’auto-reflexivité et le méta-discours, nous sommes bien d’accord, j’en parlais avec Tony Smart sur un autre thread, si ce n’est pas accompagné d’un solide récit « premier degré » dira-t-on par commodité, ça n’a que peu d’intérêt. Mais la symbolique, c’est une toute autre affaire je crois. Tu m’as l’air Artie d’être de l’école de John Ford, et ma foi il y a pire, qui disait : « il y a trois choses importantes au cinéma (mais on peut l’élargir à d’autres domaines « narratifs ») : l’histoire, l’histoire et l’histoire ». Moi aussi j’adhère à ce credo, mais je complèterais par le célèbre aphorisme de Godard : « une bonne histoire a nécessairement un début, un milieu et une fin, mais pas forcément dans cette ordre ». Godard entendait par là exalter un petit peu les types de narrations sortant de l’ordinaire (et les narrations non-chronologiques sont maintenant légion). Il existe en fait tout un tas de façons de raconter une histoire, la narrativité « classqiue » reposant sur l’enchaînement des péripéties et cherchant à défaut de vraisemblance tout du moins la cohérence n’en est qu’une modalité parmi tant d’autres. Des oeuvres fondamentales comme les premiers films d’Alain Resnais ou certains Bergman (je pense à « Persona ») ne repose pas sur ce type de narration. Et j’en parlais avec Benoît sur un autre thread, « L’Oeuf de l’Ange » de Mamoru Oshii repose aussi sur des enchaînements tout sauf logiques, le montage est plutôt guidé par le langage symbolique et le « sens poétique » de ses auteurs.

Faut voir : « Un chien andalou » (un exemple de narration non logique, tiens) est basé en partie sur les rêves de Bunuel et Dali, et le film a beaucoup fait progresser le langage filmique. Je pense à un autre exemple : « Dementia » film de 1955 est la retranscription d’un rêve rapporté par sa secrétaire particulière à John Parker, auteur du film. Le résultat est ahurrissant et incroyablement original. Autant on ne peut pas dire qu’un rêve mène nécessairement à une bonne histoire, autant l’affirmation inverse me semble aussi péremptoire, et en fait fausse.

Je le dis sans aggressivité, Artie (je te dois trop de bons conseils de lecture pour ça !), mais ça me semble évacuer un peu vite le cas « Joyce » ; gloubi-boulga littéraire, ce n’est peut-être pas très juste pour un auteur assez largement reconnu comme un des plus grandes plumes du XXème siècle (et que ça nous passe au-dessus de la tête à toi et à moi ne change rien à l’affaire).

Je vais pour ma part citer Deleuze (pas spécialement un pote de Lacan d’ailleurs) qui dit que le génie en littérature consiste à inventer une sorte de langue étrangère dans sa propre langue. Comme quoi…

en passant rapidement : tout a fait d’accotrd avec photo et même plus, puisque je ne connais pas ses exemples. Et super citation de deleuze !

On pourrait parler de lost highway, de dead man, de la fin de 2001 l’odyssé de l’espace, des films de jodo.

L’histoire j’aime beaucoup, mais les athmospheres, les ambiances, les images, les emotions, les idées ont sans doute ma preference s’il fallait choisir.

Charles burns en est un exemple egalement et notament sa serie actuelle, mais aussi black hole, qui est la narration en parallele d’un reve et des elements de la réalité qui l’ont insipé.