Frank Miller et John Romita Jr livrent le premier des trois numéros de leur mini-série Superman : Year One, où l’auteur tellement affilié au Chevalier Noir décide de s’intéresser à l’Homme d’Acier, en montrant l’origine de « son » Superman (de DKR et des suites), et les valeurs qui le fondent. Et si c’est un peu long, c’est bigrement intéressant.
Frank Miller présente la destruction de Krypton, l’arrivée sur Terre, l’éducation simple mais solide des Kent… et enchaîne sur l’enfance, les difficultés à supporter l’injustice et les brimades envers les plus faibles ; les tentatives pour stopper ça, qui empirent la situation. D’autres solutions, non plus seul mais avec Lana Lang, qui centralise les espoirs et passions d’un jeune homme qui se découvre. Et qui décide de suivre son aspiration, de rentrer dans la Navy pour découvrir sa planète, et la protéger ; mais sans briser ces Humains trop faibles, comme Jor-El n’a cessé de le dire dans ses enregistrements. Les au-revoirs sont déchirants et intenses, mais Clark a confiance - il va revenir, il va revenir auprès des siens. Même si on se doute que son destin sera différent, on a envie d’y croire à la fin de ce premier volet.
Frank Miller prend son temps pour raconter son histoire, pour forger son personnage. Pour montrer comment ce bébé, si intelligent à son arrivée, s’est pleinement immergé sur Terre, en étant complètement influencé par les valeurs simples mais justes des Kent. Et là où Zack Snyder s’est perdu dans Man of Steel avec un portrait incompréhensible de Jon Kent, Miller s’en sort mieux, en flirtant avec les attributs un peu « paysans » de quelques Américains, mais toujours en gardant une boussole morale équitable et compréhensible. L’opposition aux petites brutes est intéressante, car Clark doit régulièrement s’atteler à la tâche pour réussir, en comprenant que la force ne règle pas tout. C’est pertinent, et ça servira sûrement plus tard ; comme la belle relation Clark/Lana, touchante et bien réalisée, ou la relation du jeune homme avec ses parents, tout en sous-entendus et en non-dits puissants.
Une réussite scénaristique, donc, même si le volume est intense, long. C’est une lecture agréable, mais qui est exigeante car Miller prend définitivement son temps, souligne les choses et passe du temps sur des détails ; qui ont du sens sur la fin, comme une récompense. L’exigence envers le lecteur est un mot-clé, car on peut aussi l’utiliser pour John Romita Jr - qui demeure l’un des plus grands artistes de son temps, mais a désormais un style très marqué, très strict, qui divise. J’aime bien, ses traits ici sont un peu arides mais correspondent au propos, et ça fonctionne ; mais ça exige l’accord du lecteur, qui ne trouvera pas de planches « belles », mais efficaces et dynamiques.
Un bon lancement, donc. J’étais curieux depuis le début pour Frank Miller sur Superman, car je suis persuadé que l’homme est apaisé après ses ennuis de santé et sa rage post-11 septembre, et il semble « mûr » pour se frotter à l’optimisme, à l’espoir incarnés par Superman, après la noirceur de Batman. Et ça commence bien. Vivement la suite.