Je suis en train de profiter du fait que D8 (re-)diffuse The Event pour découvrir la série, dont j’avais entendu parler dans la >sanglots, sanglots< précédente incarnation de superpouvoir >sanglots sanglots<, dont le pitch m’intéressait, et dont je n’ai pas souvenir d’avoir lu des avis bien précis.
C’est donc avec curiosité, mais appréhension, que j’ai regardé le truc, craignant de me retrouver avec une sorte de Flashforward bis.
Hé bien, je suis ravi d’avoir tenté le coup.
Le pitch est tout con : un jeune homme, dont la fiancée a disparu durant une croisière, tente de la retrouver et met les pieds dans un complot qui implique le gouvernement… et plus encore !
Bon, dit comme ça, c’est peu engageant, parce que déjà bien cliché. Et pourtant, deux choses emportent l’adhésion dès le premier épisode :
- D’une part, la construction, pas linéaire du tout : on suit plusieurs personnages séparément, certains dont les liens sont directement évidents, d’autres dont les liens n’apparaissent qu’après un certain nombre de séquences, jusqu’au lien final, qui rassemble un peu tout le monde, et qui arrive vers la fin du premier épisode ; de plus, les scènes ne sont pas chronologiques, et on passe de séquences au présent à des flash-backs qui permettent de se faire une idée du parcours qu’auront suivi les personnages pour en arriver où ils sont. Résultat des courses, non seulement le spectateur est baladé dans l’espace, mais il est également baladé dans le temps, et si les cartouches de localisation permettent de savoir où et quand on est, les flash-backs se présentent dans le désordre, et eux-mêmes ne sont pas chronologiques. Un peu essoufflant, mais surtout enivrant. Sur le troisième épisode, ils ont sérieusement freiné le procédé, sans doute parce qu’ils avaient suffisamment posé de choses dans les deux premiers épisodes, et aussi parce qu’ils avaient plein de choses à raconter dans ce troisième.
- D’autre part, et la non chronologie de la narration nous mène à cela, l’intrigue convoque de multiples thèmes venus de l’imaginaire populaire : des complots, des tueurs, des poursuites, le gouvernement, le Président, 97 êtres d’origine inconnus (mais apparemment pas humains), une sorte de « Zone 51 » et tous les petits secrets sales qu’on imagine aller avec, des pouvoirs paranormaux, des hommes en noir… Là aussi, dit comme ça, ça ressemble à une salade composée à l’assaisonnement assez fort pour faire passer le goût bizarre, mais en fait, les éléments disparates s’emboîtent très bien ensemble, et composent un thriller qui, pour l’heure, semble logique et cohérent. Tout se marie parfaitement, comme si différents imaginaires étaient faits pour cohabiter.
Au final, le résultat, c’est un peu comme si les scénaristes voulaient faire du V ou du Flashforward, mais avaient retenu les leçons données par X-Files ou par 24.
Pour l’instant, je n’ai vu que trois épisodes, mais ils sont plein de qualité, et font espérer que la suite est du même niveau. Les scénaristes ne se sont pas mis en tête de faire durer le suspense concernant les interrogations, et posent d’emblée, entre le premier et le deuxième épisode, les bases de l’univers présenté, notamment en affichant l’existence des fameux « 97 ». Partant de là, le suspense ne porte plus sur les secrets que l’on cache, mais sur la quête du jeune homme qui va mettre le doigt dans un engrenage incroyable. C’est un suspense d’action, pas un suspense de thématique.
Ces informations données permettent de justifier des flash-backs qui remontent non pas aux quelques jours, semaines ou mois qui précèdent le fameux « événement », mais carrément à 1944. L’ensemble est amené sans cahot, et l’énergie du thriller à la 24 accueille sans coup férir les thématiques à la Mulder, tout passe naturellement.
De même, la construction, et notamment le montage, permettent de maintenir le suspense tout le temps : le scénario laisse un personnage dans une situation difficile pour passer à quelqu’un d’autre. C’est basique, mais c’est diantrement efficace. Le rythme est soutenu, la caméra n’est pas fainéante, et on s’intéresse à plein de personnages. Cette chorale fonctionne à plein, ça défocalise, on voit plusieurs points de vue (sur le premier épisode, c’est d’ailleurs assez épatant, cette volonté de refaire des scènes en changeant les points de vue).
Le résultat, c’est une série qui galope, qui balance énormément d’informations par épisode, où il se passe plein de choses, et qui opte pour le principe de l’intrigue globale, et non pour celui de l’enquête du mois avec un vague fil rouge en filigrane. En gros, c’est pas Flashforward.
Bref, pour l’instant, après seulement trois épisodes, c’est passionnant.
Bien écrit, rusé, sans pitié pour le spectateur distrait, donc exigeant (c’est un peu ça qui titille, faut avouer, ce sentiment de ne rien comprendre pendant quelques scènes, d’être embarqué dans un tourbillon, et de ne commencer à saisir quelques bribes que quand il est trop tard), la série rajoute à tout cela le plaisir de revoir quelques têtes connues. Genre Laura Innes, ou Zeljko Ivanek, ou encore Clea DuVall. Elle, vraiment, elle m’épate. Ça fait deux fois que je ne la reconnais pas (la fois précédente, c’était dans Argo). Une fille qui parvient à ce point à jouer les caméléons, c’est à souligner.
Bref, je sais ce que je regarde la semaine prochaine.
Jim