TRAUM : PHILIP K. DICK, LE MARTYR ONIRIQUE (Aurélien Lémant)

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Description :

« Toute prise de parole devrait être l’expression artistique d’une vérité, et toute œuvre d’Art le compte-rendu d’un rêve. Philip K. Dick n’écrivait pas de romans, il rédigeait des rapports. » La question n’est plus de savoir si Philip K. Dick a vu quelque chose. Il faut à présent se demander si les informations que cet homme disait recevoir n’étaient autres que le film interdit de nos vies oubliées : et s’il nous était donné, à nous aussi, d’assister à cette projection privée ?
Comme l’oeuvre de Dick, dont il écrit qu’elle se présente à nous comme un « manifeste romanesque en faveur d’une relativité de la réalité » ou « du Platon S-F », Aurélien Lemant oriente le lecteur de Traum sur le sentier pentu de la mémoire collective - un périple d’autant plus dangereux qu’il est parfaitement illusoire. Qu’est-ce que la mémoire, sinon le stockage arbitraire d’une hallucination ?
Convoquant son armée personnelle de sosies dickiens, de Salvador Dalí, Brian Wilson, William Shakespeare et Christopher Nolan à Antonin Artaud, Socrate ou les Beatles, cet essai poétique ensemence le véritable territoire que recouvrent nos mémoires : les trois champs du rêve, du doute et de la folie, fraises éternelles de la déraison. Aurélien Lemant est né en 1976. Dramaturge et comédien au sein de La Carcasse ! Bactérie Théâtrale, il met en scène la schize, le double et l’hallucination collective – objets de fascination propres au médium théâtre comme à l’ensemble de l’œuvre de Philip K. Dick, dont il est le fervent lecteur.
« Extraordinairement beau. Outre une analyse beatlesienne parfaite des récits de vie de Philip K. Dick et de Charles Manson, un superbe passage sur Julian Jaynes et les relations entre Siva et la bicaméralité, de très belles lectures concernant la soeur morte de Dick et le frère mort de Dali, et un génial mindfuck autour de Marion Cotillard et Mélanie Laurent. » Pacôme Thiellement, France Culture.

Détail :

Poche: 116 pages
Editeur : Le Feu Sacré Editions; Édition : 1re (4 avril 2012)
Langue : Français
ISBN-10: 2954129417
ISBN-13: 978-2954129419
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Un très bon livre qui vaut essentiellement pour son originalité : Lémant se moque comme d’une guigne d’être exhaustif, c’est même l’inverse. Même les très grands crus (à part « Ubik », quand même) sont à peine évoquée, alors que des textes un peu moins côtés (tout est relatif, hein) comme « Les Clans de la Lune Alphane » peuvent être abondamment commentés.

Au menu, une intro et trois chapitres où sont abordés les grandes thématiques dickiennes. Lémant malgré sa vénération manifeste pour l’écrivain californien n’hésite pas à égratigner l’icône à l’occasion et nous cause pêle-mêle de philo, de pop-music, de « Inception », de jumeaux morts-nés, de Julian Jaynes (très très intéressant…), mais aussi de Neil Gaiman et de Grant Morrison : le premier est cité pour le final dickien en diable du premier épisode de « Sandman » (les réveils en cascade…), le second est carrément présenté comme le grand héritier de Dick (à travers « les Invisibles »), et c’est même un extrait de sa pièce de théâtre (eh oui) « Red King Rising » qui constitue l’exergue du livre…

Gros point fort, Lémant a du style (limite un peu ampoulé, mais ça fait quand même du bien par les temps qui courent, le style…), et contre toute attente, beaucoup d’humour.

Ce Julian Jayne ?

Ça a l’air intéressant, en tout cas.

Oui, absolument.
Philip K. Dick lui-même, sur le tard, a eu connaissance des travaux de Jaynes, nous explique Lémant, mais même avant il y a des similitudes troublantes entre les intuitions de Dick et les hypothèses de Jaynes… A tel point que « Substance Mort », si je ne me trompe pas, constitue même un pont très intéressant entre les deux.

Je ne l’ai pas lu, c’est ce roman adapté en une sorte de « dessin animé » avec** Keanu Reeves** (que je n’ai pas vu non plus d’ailleurs) ?

Ouais, c’est bien ça.
Réalisé par l’excellent Richard Linklater, qui a développé cet étrange technique consistant à faire des prises de vue réelles avec des acteurs et à transformer le tout en une espèce de dessin animé à l’animation ultra-fluide pour son très beau « Waking Life ».
Le film à l’excellente distribution (Downey Jr ou plutôt son avatar animé dans un joli exercice de cabotinage, notamment) se caractérise par sa très grande fidélité au matériau d’origine, qui se trouve être, à mon humble avis, un des sommets de l’oeuvre de Dick.

Je me permets de mettre un lien sur l’un de mes billets où se trouve une excellente émissions de radio consacrée à Philip K. Dick, pour ceux qui ne le connaîtraient pas.

Bonne écoute. :wink:

Bon je vais tenter de voir ça, merci de la recommandation.

[quote=« artemus dada »]Je me permets de mettre un lien sur l’un de mes billets où se trouve une excellente émissions de radio consacrée à Philip K. Dick, pour ceux qui ne le connaîtraient pas.
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Excellente idée.

[quote=« artemus dada »]
Bon je vais tenter de voir ça, merci de la recommandation.[/quote]

De rien, pour une fois que ce n’est pas l’inverse et donc pas moi qui puise des conseils de lecture… :wink:

Je reviens sur cette discussion ; j’ai fait une petite recherche rapide et je suis tombé sur cette critique qui n’est pas tendre avec ce livre.

Et surtout, les exemples que cite l’auteur du billet m’ont pas mal refroidi.

Qu’en penses-tu, amigo ?

Ah oui, « Stalker », un blog que j’aime bien.
Oui, j’avais lu cette vilaine chronique avant d’acheter le bouquin de Lémant mais ça n’a pas suffit à me refroidir…
Notamment parce que je me méfie des petits règlements de compte internes au milieu, et je soupçonne qu’il y a un peu de ça, notamment le côté pour ou contre Dantec, qui doit jouer ici (Lémant lui adresse une petite pique pas bien méchante accompagnée d’un compliment en plus, et l’auteur du blog semble mal le prendre) et dont personnellement je me fous avec la dernière énergie, et pourtant j’aime Dantec.

Je le trouve, du coup, assez dur avec le bouquin, notamment sur le style (il cite pour ainsi dire les seuls « dérapages » syntaxiques un peu abscons, trois ou quatre à tout casser dans le livre.

Et surtout il reproche au livre de ne pas être ce qu’il n’est pas, ce qui est vraiment le reproche absurde par excellence. Ce livre n’est pas et ne se présente d’ailleurs pas comme une étude texte par texte de Dick, c’est une série de réflexions, parfois à côté de la plaque (les considérations autour de Cotillard et de Laurent), parfois envoûtant (ce qui touche aux rêves, et qui passionne Lémant apparemment).

Et puis Lémant inclue dans son bouquin la critique possible émise dans le blog, c’est en substance celle qu’adresse Norman Spinrad à ceux qui ne restent pas suffisamment près du texte. Dans le cas d’un Dick, je trouve personnellement dommage de ne pas se référer à des éléments biographiques : l’auteur ayant fini par confondre sa vie et son oeuvre, je crois qu’on ne peut pas en faire l’économie…

Merci de ta réponse.