Merci pour vos retours, c’est intéressant.
Pour ma part, j’ai beaucoup aimé. C’est même du très bon Warren Ellis, compte-tenu de ce que j’ai pu penser de ses travaux ces dernières années, à quelques bonnes surprises près (« Moon Knight » par exemple).
J’inclus d’ailleurs dans ce bilan fortement mitigé ses romans ; je viens de finir son récent « Gun Machine », et si c’est plutôt sympa c’est pas transcendant non plus, loin s’en faut…
Pour être honnête, la sortie de lui que j’attends le plus ces jours-ci, c’est son « Hellblazer », qui a plus de 15 ans en VO. Un signe.
Mais « Trees », donc. Ben c’est pas mal du tout, et plutôt original.
Un mot déjà sur Jason Howard, dont j’ai dû voir le travail pour Dan Slott sur « Superior Spider-Man », mais qui ne m’a pas marqué. Il fait ici un boulot remarquable, rappelant parfois un Kevin O’Neill « posé », très bon dans les détails naturalistes et pointilleux dans la restitution du feeling « cauchemar urbain ».
Avec ce pitch, je me disais que Warren Ellis allait travailler dans le cadre du sous-genre de la SF du « Big Dumb Object », où l’humanité rentre en contact avec un objet aux dimensions souvent gigantesques et qui dépasse son entendement, la ramenant gentiment à une position plus modeste au sein du cosmos ; Arthur C. Clarke a pu oeuvrer dans ce créneau particulier. Il avait un peu fait ça dans son excellent « Ocean », mais le rendu est ici tout autre, c’est comme une autre façon d’aborder le genre. Et d’une façon plutôt originale pour du Warren Ellis…
Le début, comme à vous, m’a semblé très longuet et avare en dramaturgie, passé une introduction explosive (et qui présente une très bonne idée de disjonction image / voix off, très bien sentie). J’ai même eu peur à ce stade ; la lecture du titre en numéros isolés doit être très pénible, franchement.
Mais en recueil, sans compter que celui-ci est du genre copieux (et pas cher, rappelons-le), c’est une tout autre expérience.
Ellis développe en effet sur la longueur une galerie de persos très attachants, et résout dans cette diversité un des problèmes actuels de son écriture, cette profusion de « John Constantine-like » qui casse un peu sa caractérisation (ça vaut aussi pour les romans d’ailleurs).
Ici Ellis expérimente vraiment, puisant peut-être un peu dans sa propre biographie (ce garçon « bouseux » à la fibre artistique qui débarque ébahi en ville, ça ressemble un peu à ce qu’Ellis raconte de sa propre jeunesse…), et compose différents portraits finalement très subtils, malgré quelques thématiques un peu « massues » (comme la question du transgenre) qui font beaucoup penser aux comics de la fin des années 80 / début des années 90.
Leurs destins n’en sont que plus poignants quand une partie d’entre se noue, à l’occasion de bouleversements narratifs en fin de volume, certes assez brutaux comme le signale Nemo, mais dont le côté brutal se marie assez bien, par contraste, à l’espèce de torpeur qui l’a précédé.
Si on rajoute à l’affaire les talents habituels de Warren Ellis pour les dialogues qui claquent et les concepts un brin barrés, on obtient un joli cocktail. Un coup de chapeau à l’ami Nikolavitch qui trouve le ton juste pour du Ellis en mode un peu plus « feutré » que d’habitude, entre gouaille de « tough guy » et moments plus émouvants.
Une bien belle surprise ; je vais me remettre à m’exciter pour les sorties du scénariste britannique, je crois bien.