TRESE t.1 (Budjette Tan / Kajo Baldisimo)

C’est un personnage que j’ai connu il y a un moment en suivant une artiste philippine justement

Tout à fait ! Mais je ne veux pas spoiler tout quand même !

ah oui? On pourrait avoir le nom ?

C’est exactement le premier numéro. En Tagalog dès 1950 alors que le pays est encore très anglicisé. Ca rejoint ce que disait plus haut. Le Tagalog est parlé par les masses à Manille et sur Luçon. Les élites et la classe moyenne parlaient (et parlent encore) Anglais. Dans les Visayas, c’est un peu différent.

Et il vous faudra attendre pour la suite. Je suis en train de le lire, mais c’est en Tagalog. Alors, Google Lens sur chaque page pour traduire … c’est long, mais heureusement que ça existe. Ce sera du super-héros pur encore une fois.

En Vendée ?!

Ayessario
https://www.instagram.com/ayessario/

J’ai pensé la même chose ! Mais connaissant un peu l’endroit, j’ai eu un doute.

Bonjour,
toujours en train de lire mon komiks en Tagalog. C’est long à lire puis traduire via Google Lens (mais ça marche pas trop mal !). Donc, je vais plutôt vous montrer ce sur quoi j’ai craqué (bon, ça reste raisonnable).


2 Trese #3 (édition Ablaze) avec des couvertures spéciales : une de Manix Abrera (dont les comics vont être publiés aussi chez Ablaze) et une de Miguel Mercado (dessinateur chez Boom! entre autres).
Aussi, le « Book of Murders » que je recherhais depuis longtemps ! Enfin, ils l’ont réédité cette année. C’est la compilation des 3 premiers volumes de Trese, qui font un tout. Un beau pavé ! Je crois que ça aurait été plus logique si l’édition française avait retenu ce format là … pour la continuité de l’histoire et la cohérence du tout.

Ouais mais il aurait été alors plus cher.

pas faux … 1250 pesos ici … 25€ .

Bonjour !
après quelques jours où je n’étais pas disponible, je reviens avec Kalayaan de Gio Paredes.


Kalayaan est un superhéros philippin qui existe depuis longtemps maintenant et est publié (plus ou moins régulièrement, mais normalement deux fois par an) sous forme de fascicules d’une vingtaine de pages depuis juin 2007 ! C’est donc un superhéros qui a le plus résisté au temps dans ces dernières années. J’ai trouvé à Cebu un recueil (on pourrait appeler ça un TP, même si ce n’en est pas un) qui regroupe les 4 premiers épisodes : The Beginning, Overload, The Battle, Broken. En 2008, un fascicule coûtait 60 pesos (un peu plus d’un euro). J’ai payé 200 pesos (4 euros) pour le recueil. Les couvertures sont en couleurs et l’intérieur en noir et blanc. Le format est en A5. C’est simplement des A4 pliées en 2 avec une jaquette en cartonné léger.
L’avantage, c’est qu’on peut commander sur le site de GMP (les éditions Gio M. Paredes) les numéros d’origine. Et il ne les fait pas payer plus cher qu’à l’origine, même si les fascicules plus récents sont à 70 pesos (prix du papier et inflation sûrement).
Bref, la couverture est en Anglais, le dos aussi, la préface également … mais quand on commence le komiks, on se retrouve face à du Tagalog ! Je baragouine 2-3 mots, mais suivre du texte dans cette langue m’est totalement impossible. J’ai donc du utiliser l’application Google Lens de mon téléphone qui m’a permis de traduire presque en temps réel et plutôt bien les dialogues.
L’histoire : Kalayaan est un projet scientifique de Rhea Calalang (qui se promène en mini mini-jupe verte et crop-top de la même couleur) qui a pour ambition de créer un super soldat avec des pouvoirs plus proches de Superman que de Captain America. Notre héros se prénomme Jose Dela Vega ; il vient de la province et est arrivé en ville à cause de la maladie et de l’alcoolisme de de son père (sa mère est partie quand il était petit apparemment et on n’en sait pas plus, en tout cas dans les premiers volumes). Il avait appris les arts martiaux (philippins entre autres) et s’est retrouvé à Manille pour travailler ; il a réussi à se faire embaucher sur des chantiers de constructions avant d’être recruté par Rhea qu’il sauve d’une tentative de viol (elle est impressionnée par sa force, son courage et sa pureté de coeur). Celle-ci lui injecte une substance de temps en temps, quand il y a besoin de sauver Manille ou de combattre le crime. Puis, quelques heures plus tard, il redevient un homme normal.
Ce jour-là, il doit combattre Blood Fang, qui fait régner la terreur sur la ville. Blood Fang est aussi un humain « modifié », mais avec des caractéristiques animalesques. Kalayaan vainc Blood Fang (crocs de sang), mais on apprend que ce dernier est le premier d’une armée de clones dirigée par Vorgon (dont les pouvoirs sont de nature électrique), l’ennemi réel de Kalayaan. Dans le deuxième chapitre, Vorgon pirate l’ordinateur de Rhea et surcharge la dose normalement administrée, pensant tuer Kalayaan ainsi. Toutefois, cela a l’effet inverse et cela permet à Jose Dela Vega de contrôler à souhait sa transformation en superhéros. Je vus la fais courte … Kalayaan réussit à défaire Vorgon et ses sbires, après la capture de Rhea et la menace de la tuer. La base secrète s’écroule sur Vorgon et on ne le revoit plus (pour l’instant car il reviendra dans d’autres épisodes). Dans le dernier chapitre, Jose revient dans sa province voir son père, mais celui-ci est dans un piteux état et meurt dans ses bras. Jose est anéanti et décide de boire une bouteille de poison … « To be continued … »
Bon, le bouquin est très bien ; la seule chose qui m’a freiné, c’est clairement la langue. C’est le premier volume, mais pas d’origin story et l’origine donc du superhéros est bien répartie dans chaque chapitre. On entre direct dans le vif du sujet et c’est très rythmé. Kalayaan siginifie « Liberté » en Tagalog. Son costume se réfère aux symboles du drapeau philippin : Le soleil en son centre, les trois étoiles à la ceinture et les 3 couleurs qui reviennent, le bleu, le rouge et le blanc. Lorsqu’il se transforme, Kalayaan a les yeux qui deviennent rouges. Sur ses bras, il est armé de lames de bolo (la machette locale) qui se rétractent dans ses gantelets. ll peut voler, a une force herculéenne, se régénère, est invincible (jusqu’à une certaine limite), mais n’a pas de vision laser contrairement à son alter-ego américain. Dans les premières pages, Kalayaan est doté d’un bouclier qui rappelle le premier bouclier de Captain America. Toutefois, dès son retour à la base, il dit à Rhea que ce n’est pas pratique, ni pour voler ni pour se battre et qu’il n’en a pas besoin.
Parallèlement, Kalayaan fait partie des Bayan Knights (qu’on pourrait traduire par les chevaliers du pays). Il faudrait que je trouve des publications les mettant en scène parce que je sais que certains numéros sont déjà sortis il y a une dizaine d’années. Ce sont un peu les Avengers locaux.
Pour terminer, à la fin du livre, de nombreux illustrateurs philippins ont dessiné Kalayaan, parmi lesquels Gilbert Monsanto, Carlo Vergara, Gerry Alanguilan ou Ian sta. Maria. Si vous aimez Google Traduction et les superhéros traditionnels avec un coeur pur, c’est fait pour vous !

1 « J'aime »

Bonjour,
ça fait un moment que je n’ai rien posté. Mes journées à la plage me prennent trop de temps !
J’ai encore quelques trucs à vous montrer ; aujourd’hui, un truc pas commun ici (pas de créatures surnaturelles ou de superhéros) et un recueil de nouvelles graphiques par des auteurs désormais célèbres.
Je commence par un petit bouquin divisé en deux. D’un côté, la nouvelle graphique The Life and Death of Amorsolo Esperanza, Faith Healer of Talinhaga et de l’autre The Amazing True-ish Story of Andres Celestial (c’est pour ça que je vous ai mis les 2 faces du livre).
elbert or
Amorsolo Eperanza suit le protagoniste du même nom qui vient de mourir après que son cabinet de « médecine traditionnelle » a pris feu et a été entièrement détruit. On découvre alors sa vie : soldat pendant la 2e Guerre Mondiale, il est accueilli par un guérisseur dans la ville de Talinhaga (qui signifie histoire, parabole, en philippin). Celui-ci le forme pour prendre sa suite car il n’a qu’une fille, dont Amorsolo tombe amoureux et épouse. On suit donc sa vie, ses succès, ses déboires et la mort de sa femme qu’il ne peut sauver (il est guérisseur, pas médecin) et on apprend qu’il s’est suicidé en mettant le feu à son affaire.
Andres Celestial est un petit garçon réveur qui veut devenir le premier homme sur Mars et construire des robots. On le suit donc dans sa vie adulte, entre aventures et explorations, lorsque le récit s’arrête pour nous montrer sa vraie vie : téléopérateur pour une entreprise japonaise. Toutefois, il apprend à apprécier le présent lorsqu’il rencontre une collègue dont il va tomber amoureux. Puis, marié, il comprend que le présent est son futur.
C’est très bien écrit. Ca ressemble énormément à certains romans graphiques qu’on peut trouver sur les étals français. Les dessins bien qu’identifiés komiks philippins, peuvent ressembler à ceux de Craig Thompson par exemple. C’est en bichromie, noir et bleu (et un peu de gris, mais très peu) sans nuances. Les histoires sont très plaisantes et je préfère Amorsolo Esperanza que Andres Celestial. La première est plus poignante, mieux racontée aussi, même si la deuxième est bien également. Je connaissais Elbert Or grâce à ce qu’il avait avec J. Torres (aux Etats-Unis), Lola, a Ghost Story ; j’avais bien aimé, je crois que c’est un auteur que je vais plus suivre, et creuser un peu plus ce qu’il fait.

Je continue avec Underpass, publié Octobre 2009. Pour la petite histoire, l’acquisition de ce volume est assez cocasse : avant de prendre le bateau pour venir dans la province, nous sommes passés à Cebu pour y prendre les billets. Juste à côté du guichet, il y avait une boutique bien connue nommée « Booksale ». Là, s’y entassent des livres anglophones à 95%, importés des Etats-Unis, souvent des pilons de bibliothèques américaines (romans, livres de recettes, magazines, comics un peu, …). Toutefois, on y trouve aussi de temps en temps quelques livres philippins et beaucoup plus rarement, des komiks. Cette fois, je tombe sur ce recueil, sans savoir ce que c’est (c’est sous plastique et si on l’ouvre, on le paie). Je regarde le prix … 175 pesos (4,50€), mais comme il est un peu abîmé (le coin supérieur droit est corné), le mec me le fait à 25 pesos (0.50€) ; une aubaine donc.


Dans ce recueil, 4 histoires. La première est écrite et dessinée par Gerry Alanguilan. SIM parle d’un homme qui trouve une carte SIM par terre. Il la ramasse dans l’idée de trouver le propriétaire et la lui rendre. il découvre qu’elle appartient à une femme et espère y trouver des photos dénudées. Il découvre une image floue, pas téléchargée. Après avoir reçu des coups de fil d’une certaine Agnes l’appelant à l’aide, il finit par retrouver l’endroit où elle habite et y trouve la mère de celle-ci. Elle lui explique que sa fille Agnes est morte depuis plusieurs mois. Il reçoit alors un appel d’Agnes où elle ricane. L’image floue termine son téléchargement et il se voit mort, en sang. Paniqué, il s’enfuit, et se fait renverser par un bus, le tuant sur le coup. Quelques instants plus tard, un homme trouve la carte SIM … Sur le modèle de Ring (et Alanguilan ne s’en cache pas, il le dit dans une mini-préface), le récit est adapté aux Philippines en gardant son suspense. C’est très efficace et très bien dessiné. On ne reconnaît pas forcément le style d’Elmer dans ce récit. Excellent début pour commencer ce recueil !
Deuxième histoire : Judas Kiss (le baiser de Judas). Basée sur un nouvelle de David Hontiveros, Budjette Tan l’a remaniée et a confié les dessin à Oliver Pulumbarit (que je connaissais pas du tout). On suit un homme sujet à des crises de démangeaisons dans son lit, comme si quelqu’un l’embrassait constamment. Il nous raconte qu’après avoir trouvé sa femme et son frère dans son lit, il les a tués tous les deux et enterrés sous l’arbre géant dans le jardin. Depuis, sa femme vient le hanter et l’embrasse sans cesse la nuit, jusqu’à le rendre fou ! Une nuit, il se réveille et découvre le fantôme de sa femme venue le hanter, mais celle-ci le regarde, sans rien faire. Ce n’est pas elle qui l’embrasse, mais son propre frère, dont il avait abusé (ce n’est pas dit explicitement, mais on le devine) quand il était enfant. Le dessin est parfait pour le récit ; chaque case en bichromie (vert et violet, jaune et bleu, vert et rouge, …) selon le moment de l’histoire et les actions du protagoniste. C’est très bien écrit, même s’il m’a fallu 2 lectures pour tout comprendre (notamment pourquoi c’était le frère et non la femme qui l’embrassait). Cette nouvelle s’inscrit parfaitement dans le recueil (basé sur l’horreur). Du Budjette Tan à ses débuts avec la noirceur d’Hontiveros. Très très bien.
La troisième s’intitule Katumbas, écrite par David Hontiveros et dessinée par Ian Sta. Maria (au Danemark pour Lego avec Budjette Tan). On suit un héros dont le travail est de remettre les âmes damnées dans le droit chemin. Ici, c’est dans le métro de Manille que sévit une créature multiforme que doit détruire le héros. Car sous ce monstre se cache Howard de Vera qui s’est suicidé dans le métro en se tranchant la gorge (sympa, oui). Le héros le présente devant le train des morts où il est pris en charge par le passeur. Encore une fois, c’est efficace, plutôt bien dessiné, même si c’est moins plaisant que ce que Sta. Maria a fait depuis. Pas mon préféré (C’est SIM que je préfère), mais ça se laisse lire !
Enfin, la 4e histoire s’intitule The Clinic. Ecrite par Budjette Tan et dessinée par Kajo Baldisimo, le duo de Trese raconte comment une starlette de la télé nie publiquement sa grossesse sur les conseils de sa tante pour ne pas gâcher sa carrière ; et, alors qu’elle préfèrerait partir un an aux Etats-Unis pour y accoucher et éviter le scandale d’un enfant hors mariage (la société philippine est très, trop?, religieuse et c’est le dernier pays au monde à interdire le divorce … avec le Vatican … et je ne vous parle même pas de l’avortement … sauf si vous êtes issue d’une famille riche qui peut vous payer un voyage en Europe), elle se laisse convaincre d’aller dans une clinique spéciale pour les filles comme elle où un avortement secret lui sera administré. Trois doctoresses très aguichantes se présentent à elle et l’anesthésient avant de se déshabiller. On découvre alors que ce sont des manananggals, des femmes ailées dont le tronc se détache de leurs jambes et dévore les fétus dans le ventre des mères. Toutes trois se servent et se délectent du fétus ainsi donné. Lorsque l’opération est terminée, la starlette peut repartir chez elle, ravie, et une nouvelle starlette arrive en taxi pour la même procédure. On apprend néanmoins que la starlette se souvient du rêve qu’elle a fait pendant l’avortement, où elle était entourée de papillons (les 3 manananggals) qui emmenaient son bébé dans un champ de fleurs … Très bien dessiné, on retrouve la patte de Baldisimo, mais en couleur cette fois … ça fait bizarre ! On pourrait croire qu’on est dans un album de Saga quant au style de dessins, de couleurs utilisées ou de cadrages … mais en remarquant le manque de temps ou, peut-être à l’époque, de technique fine. L’histoire est bien tenue, même si avec mon regard de 2022, il y a pleins de choses qui me gênent, bien que je sois conscient de l’état de la société philippine, contre l’avortement à 90% et du rayonnement (que je trouve malsain) dans la société dans son ensemble. Budjette Tan reprend les ressorts qu’on a déjà aperçus dans Trese et on se dit que ce récit pourrait être le point de départ d’une enquête d’Alexandra Trese !

J’espère que je nous vous ai pas trop ennuyé avec cette tartine. J’ai encore des choses à vous présenter (dont un truc qu’on doit me ramener de Cebu ces jours-ci), mais peut-être pas aussi régulièrement car mes journées à la plage sont quand même ma priorité !

2 « J'aime »

Tu rigoles. C’est super intéressant.
Et puis question tartine généreuse, on est servi avec nemo… on a donc bien l’habitude.

1 « J'aime »

Bonjour,
aujourd’hui, deux choses très différentes à vous proposer ; tout d’abord After Lambana écrit par Eliza Victoria (romancière qui a écrit Wounded Little Gods, Dwellers entre autres qui seront aussi publiés chez Tuttle à l’international) et illustré par Mervin Malonzo (auteur de Tabi Po, une référence aussi, ou Ella Archangel).


Ici, on retrouve Conrad De Luna, un jeune homme atteint d’une nouvelle maladie, la Rose ; sur Internet, il a contacté un homme, Ignacio, qui pourrait l’aider à guérir de ce mal inconnu. La Rose est arrivée après Lambana, la réunification de notre monde et du monde des esprits. Dans ce Manille, coexistent des êtres surnaturels et les humains, tout à fait normalement. Toutefois, après le meurtre de la Reine de Lambana, les êtres mythiques ont fermé les portes de leur Royaume et les êtres surnaturels qui étaient dans le monde humain sont forcés à y rester ; ils sont persécutés par les polices humaines qui voient en eux une menace. La Rose est donc une maladie qui arrive dans le corps d’un humain. Si elle est détectée assez vite, avant qu’elle ne prenne racine, elle peut être retirée chirurgicalement. Par contre, si elle s’enracine et qu’elle se trouve sur un organe vital, le sujet meurt après que la graine se transforme en fleur, comme une rose. Conrad a une graine de Rose sur son coeur et lorsqu’il fait une radio, il s’aperçoit que les racines ont déjà poussé. Il est donc condamné. Il a fait appel à une personne qui dit pouvoir peut-être le soigner, au moins calmer la douleur. Ignacio amène donc Conrad chez des guérisseurs qui sont en fait des créatures mythiques cachées ; leurs potions ne pourront rien faire contre son mal et seul en territoire de Lambana une rémission est possible. La quête vers Lambana s’enclenche donc et l’histoire est complexe, difficile à raconter dans son entièreté sans écrire dix pages. On ne connaît pas les raisons qui poussent Ignacio à aider Conrad au début, sans rétribution, juste parce qu’il l’a aidé un jour, et on comprend par la suite que c’est une dette de sang qui les lie, sans que Conrad ne s’en souvienne car trop jeune et traumatisé par la mort de sa soeur. Ignacio n’est pas non plus ce qu’il semble être ; humain de prime abord, il parle le langage des êtres surnaturels, se fait appeler Altesse par celles-ci et change de forme lorsqu’il s’énerve. Conrad est le candide dans l’histoire, il suit sans trop savoir ce qui lui arrive ni ce qui va arriver. Néanmoins, on découvre qu’il est la clé de l’histoire et que sans ses souvenirs refoulés, il ne peut pas y avoir de rémission.
Le dessin de Malonzo est parfait pour l’ambiance. Ca ne ressemble à rien d’autre que j’a trouvé ici ; entre de la franco-belge et du roman graphique US ; ça pourrait être du Matt Kindt avec du Fred Bernard. Les couleurs ont leur importance et retranscrivent l’ambiance sans accroc. Le scénario est bien ficelé et complexe pour attirer le lecteur averti. C’est très très bien. Une nouvelle édition va sortir chez Tuttle et sera donc disponible en Europe. Je vous le conseille chaudement si vous avez la possibilité de vous le procurer (17,52€ chez Amazon.fr , je sais, c’est pas bien, mais avec la connexion chancelante ici, je suis allé au plus rapide).

Le deuxième livre que j’ai lu ces jours-ci est ZsaZsa Zaturnnah, Sa Kalakhang Manylina, qu’on pourrait traduire par Zsazsa Zaturnnah dans la Métropole de Manille, écrit par Carlo Vergara.
zsazsa
Zsazsa Zaturnnah est un personnage bien connu ici, pas autant que Darna bien sur, mais les lecteurs de Komiks. Tout un cycle de Zsazsa Zaturnnah a été publié dans les années 2000. Maintenant, Ada, notre héroïne, veut tourner la page dans sa province et vient à Manille pour changer de vie.
Tout d’abord, Zsazsa Zaturnnah est une forme de parodie de Darna. Ada se transforme en Zaturnnah en absorbant une pierre (comme Darna), mais la régurgite à chaque fois qu’elle se détransforme. Le komiks est pour The most mature readers ever (le public le plus averti de tous les temps). Il y a des références sexuelles à chaque page et l’absorption de la pierre magique n’y échappe pas. Ada est donc une esthéticienne transgenre. Elle est secrètement amoureuse de Dodong (un terme très commun ici pour désigner un jeune homme) qui a aussi quitté la province et amène Ada à Manille. Ada veut tirer un trait sur Zsazsa Zaturnnah et veut vivre normalement avec Dodong si possible. Ils prennent un appartement tous les deux car ils n’ont pas beaucoup d’argent. Dodong trouve un travail dans une concession automobile et Ada reprend son activité de beautician (esthéticienne, maquilleuse, coiffeuse …) pour des amies, dont une qui passe à la télé dans un show rappelant Les Philippines ont un incroyable talent. Là, une catastrophe advient : un cafard géant menace de tuer le public et Ada ingurgite la pierre pour sauver la populace. Mais, Zsazsa Zaturnnah n’est pas un superhéros commun. Elle doit d’abord trouver un costume adéquat et se rend dans les loges pour le trouver : rien ne la sied et elle prend au hasard un costume de poulet (?!?!). Bref, le cafard est vaincu et Ada reprend sa vie, même si son alter ego a tapé dans l’œil des producteurs de télévision qui aimeraient en faire un produit commercial. Ada accepte leur offre et découvre que d’autres superhéros ont des contrats publicitaires, car le courage ne nourrit pas son homme. Zsazsa Zaturnnah (en costume traditionnel cette fois) fait la connaissance d’un superhéros (avec un gros paquet) qui veut la prendre sous son aile et lui apprendre les ficelles du métier.
Sous ses airs très légers et humoristiques, on trouves des thématiques sur l’homophobie, les difficultés sociales, la société du spectacle aux Philippines, la corruption, les violences sexuelles, etc … C’est très bien dessiné, bien écrit, mais c’est en Tagalog. J’ai contacté Carlo Vergara il y a quelque temps qui m’a dit qu’il travaillait depuis des années sur une version anglaise, mais qu’il n’arrivait jamais à finir car il avait d’autres projets et ne trouvait pas forcément la volonté de le faire et le temps. J’ai beaucoup aimé ce volume qui est beaucoup orienté sur les combats de superhéros que les volumes précédents. Malheureusement, je m’arrêterai sur ce titre car la lecture avec Google Traduction à côté n’est pas très confortable. J’attendrai une hypothétique publication en anglais ou je les lirai au compte-goutte quand j’aurai le temps et la motivation de le faire. C’est vraiment dommage car c’est un ouvrage qui aurait sa place à côté d’autres excellents komiks en anglais. Les dessins de Carlo Vergara rappellent les années 90 par leurs découpage ou style. C’est en noir et blanc bien sur pour économiser sur le prix de revient. Si vous aimez Google Traduction, il met à disposition des titres entiers de Zsazsa Zaturnnah sur son site https://carverhouse.gumroad.com/ . Cela vous permettra de voir à quoi ressemble le komiks.

La prochaine fois, j’ai trois titres de l’éditeur EPIK à vous présenter.

2 « J'aime »

Merci beaucoup. Le 1er titre a l’air excellent.

1 « J'aime »

Bonjour !
Trois titres que j’ai lus il y a quelques jours. Tous issus du même éditeur, EPIK, faisant partie du même univers et devant, à terme, devenir cohérent sur l’ensemble. Bon, peu a été publié depuis, mais c’était la vision générale au début du projet.

pedro penduko
Tout d’abord, une remise à jour de Pedro Penduko, personnage créé par Francisco Coching dans les années 50, avec Francisco Coching’s Pedro Penduko - The Legend Begins. Humain d’abord, Penduko est devenu un homme à moitié magique, par sa mère. Créé en 1954, il est adapté au cinéma la même année ! Depuis, il y a eu des films et même des séries TV. Ici, son origine a été remaniée. Pedro Penduko est humain, mais issu d’une mère babaylan (sorcière, dans un sens positif cependant). Celle-ci se bat contre les forces du mal alors qu’elle est enceinte et malgré sa victoire, voit son sang maudit. On retrouve Pedro 20 ans plus tard, jeune adulte, aux Etats-Unis sous le nom de Peter Harris. Pedro a été adopté à la naissance par un couple d’Américains, sa mère voulant lui épargner la malédiction. Sa mère adoptive, âgée, est décédée et son père adoptif meurt dans un accident de voiture. Voulant retrouver ses racines aux Philippines, il part chercher sa mère biologique. Il la trouve, après de nombreuses scènes d’action (sans créatures magiques), et découvre sa véritable raison d’être, combattre les forces du mal. Il fait ensuite face à plusieurs ennemis avant qu’il batte le roi des Kapre (gigantesques créatures fumant un cigare et vivant dans les grands arbres). Pour l’avoir battu si facilement, les êtres mythiques comprennent que Pedro Penduko n’est pas un simple mortel, mais le fils d’un démon traitre … La suite au prochain épisode (même s’il n’y en a pas eu).

republika
Deuxième chose : REPUBLIKA. Postulat de départ simple : les héros philippins de la fin du XIXe siècle ont pu tenir tête aux Espagnols grâce des amulettes qui leur donnaient des pouvoirs bien particuliers et ont fondé une société secrète pour préserver la république naissante : REPUBLIKA. Ici, on suit une séismologue qui découvre son équipe déchiquetée dans le laboratoire où elle travaille. Un homme en fauteuil roulant et un combattant mystérieux viennent la récupérer car ils estiment qu’elle est en danger. En effet, un commandant de l’armée américaine veut contrôler les créatures mythiques pour les mettre au service des militaires et il a capturé un Tikbalang très puissant pour commencer. En vous la faisant courte, la séismologue et le combattant réussissent à sauver le Tikbalang qui leur est éternellement reconnaissant et ils parviennent à défaire le chef américain.

carpio
Troisième chose : Bernardo Carpio. Dans la mythologie philippine, Bernardo Carpio est une forme d’Atlas, il porte le poids du monde sur ses épaules. Il construit les civilisations. Mais lors d’un combat, il détruit une ville entière et est condamné par Bathala, le dieu des dieux, à devenir humain pour expier ses pêchés. Il doit donc se nourrir, travailler, etc … tout en gardant une force surhumaine. Il rencontre la serveuse du bar où il prend sa bière après le boulot et ils s’engagent évidemment dans une relation amoureuse. Pour arrondir ses fins de mois, il participent à des combats de rue, qu’il gagne à chaque fois. Néanmoins, il est confronté cette fois à un être à six têtes qui le bat. Sa petite amie n’est autre que le coeur de ce monstre et elle l’implore de les tuer, même elle, car elle est prisonnière de cette malédiction. Ayant sacrifié ce qu’il avait de plus cher, Bathala accepte de donner une chance de rédemption à Bernardo Carpio. Celui-ci devra combattre le mal grâce à ses pouvoirs retrouvés.

Voilà un résumé rapide des 3 livres. Petite critique rapide de chacun et de l’univers ensuite.
Pedro Penduko est mon préféré. C’est classique, mais bien raconté et les dessins sont très plaisants, dynamiques et avec une patte crayonnée, sans qu’on sente une numérisation à outrance. Le légendaire est bien retranscris et le remaniement de l’origine de Penduko est intéressante et reste cohérente.
Pour REPUBLIKA (mon 2e), j’ai beaucoup aimé le prérequis avec le côté historique que cela implique. On y retrouve les grandes figures de l’Histoire philippine et le parallèle fait avec les autres puissances impérialistes contemporaines ; c’est parfois un peu caricatural et très manichéen. Le général américain est le mal absolu et rien qui pourrait le rendre attachant, plus humain ; il est plus monstrueux que les monstres qu’il emploie et c’est peut-être ça qui manque dans ce titre. Idem pour l’héroïne qui a un coeur pur et innocent … seule mention au combattant mystérieux au début dont on découvre l’histoire et la traitrise et au sorcier qui vient en aide aux Américains pour nourrir sa famille et lutter pour leur survie. Cela dit, c’est très anecdotique dans le récit et aurait mérité une place plus importante. Dennis Crisostomo est aux dessins. C’est impeccable, efficace, très bien découpé, avec un résultat final qu’on sent numérique sans que ce soit déplaisant (pour moi en tout cas). Un très bon titre, même si j’avais préféré Osyana dans le même genre et chez le même éditeur.
Enfin, Bernardo Carpio est celui que j’ai le moins aimé, même si le titre reste très correct. Le dessin est très réussi, les scènes de combat sont très agréables à suivre et nombreuses. Les couleurs montrent un Manille ensoleillé et radieux pour les scènes d’extérieurs et gardent cette luminosité pour les moments en intérieur. Cela retire un peu de mystère à certains personnages qu’on rencontre pour la première fois et auraient mérité un peu plus de suspense. Concernant l’histoire, c’est moins original. On pourrait le comparer à Thor, banni d’Asgard et envoyer sur Mittgard pour expier ses pêchés. Et ça y ressemble beaucoup par certains aspects. Même, l’iconographie fait beaucoup penser au premier film Thor. L’histoire se passe à Manille, mais de la façon dont c’est dessiné et raconté, ça pourrait se passer à Brest ou à Liverpool qu’on ne verrait pas la différence … et c’est un peu dommage.

Pour clôturer ce post, il y a encore un livre EPIK qui me manque : Maria Makiling. Difficile à trouver d’occasion, mais je regarde les sites chaque jour. Je vais bien tomber dessus. Concernant les publications EPIK, ça se laisse lire. Ce ne sont pas des komiks dont je vais garder un grand souvenir, mais leur lecture est bien agréable et divertissante. Je suppose qu’une convergence devait se réaliser entre Bernardo Carpio, Pedro Penduko ou les autres, mais avec des titres individuels pour chaque héros, difficile d’imaginer ce que cela pourrait être. Pour le moment, rien ne les relie.

La prochaine fois, un komiks d’un auteur vivant à New-York, mais très indépendant ! Une des meilleures choses que j’ai lues dans ces dernières semaines !

1 « J'aime »

Ah merci. Et quel teaser.
Sinon, c’est toi qui oriente ou la majorité de la production est liée aux divinités et autres êtres surnaturels endémiques ?

Il y a beaucoup de choses sur les divinités et croyances diverses. J’ai des lectures en ce moment sans aucun rapport avec le surnaturel. Mais ça revient beaucoup. Dans la société très catholique pratiquante aux Philippines, il est surprenant de voir la place que prennent les croyances païennes dans la vie quotidienne. Ce soir par exemple, on est allés promener le chien à la nuit tombée et on a parlé 5 minutes à des amis qui nous ont expliqué qu’une wakwak (ou mananaggal selon les lieux) tournait dans les parages pour trouver une femme enceinte et lui prélever le bébé dans son sommeil. Les fenêtres du village où il y a des femmes enceintes sont fermées au cas où. Pareil pour les dames blanches dans certaines maisons.
Il y a quelques romans graphiques tels qu’on peut se les imaginer en Europe, mais c’est forcément moins vendeur, ici encore plus. Et même ce que je vais vous montrer la prochaine fois, en étant très éloigné des croyances, y a toujours un angle qui s’y intéresse, même légèrement.
Enfin, il y a un vrai nationalisme avec un vrai roman national comme cela a pu exister en France : la résistance contre les occupants, nos ancêtres les vainqueurs de Magellan ou des Espagnols, les grandes figures historiques vénérées sans aucun ressorti critique, … La société est très catholique mais aime montrer qu’elle était que chose avant l’arrivée des Espagnols : alphabet local pré-hispanique (en fait de nombreux alphabets pré-hispaniques ont cohabité aux Philippines, seulement quelques décennies avant l’arrivée des Espagnols) appelé babaylan, croyances pré-chrétiennes, rites animistes, tout en omettant que le pays ne l’était pas et lorgnait vers les traditions musulmanes, bouddhistes ou chinoises.
Ah aussi, une chose importante que je n’ai pas précisée. Les nombreux romans graphiques axés sur le réel sont souvent rédigés en Tagalog … Et il est vrai que j’y vais moins naturellement!
Mais promis, il va y avoir moins de titres qui s’intéressent au surnaturel. Il est 22h ici. Bonne nuit.

Ah mais ma question était juste de la curiosité, pas un reproche, au contraire. Merci à toi pour ces explications et précisions.