X-O MANOWAR : LE CHÂTIMENT D'ARIC (Bob Layton, Jim Shooter, Steve Englehart, Joe Quesada, Barry Windsor-Smith)

98%

Bien : très chouette de voir arriver le Valiant classique.

Jim

Faudrait que je reprenne mon Scarce pour avoir un avis.

ça fait un moment quand même

114%

Y a quoi ? Archer & Armstrong ? Et quoi ? Solar, peut-être ? Sais plus…

Jim

Archer & Armstrong, Harbinger de Shooter et Lapham, Shadowman d’Ennis.

Et ce, depuis 2019 :

Très bien. Bon, le Shadowman d’Ennis, c’est déjà du Valiant 2.0, ça, mais bon…

Ouais, voilà, c’est du compte-goutte, quoi. Ça arrive comme le gaz russe, avec hésitation.

Jim

Bliss le considère comme toi car ce titre n’est pas cité comme étant au sein de cette collec.

X-O MANOWAR : LE CHÂTIMENT D’ARIC

€39,00 EUR

Date de sortie : 10/02/2023

Scénario : Bob Layton, Jim Shooter, Steve Englehart
Dessin : Joe Quesada, Barry Windsor-Smith, Bob Layton, Mike Leeke

288 pages. Collection Valiant Classic. ISBN 978-2-37578-306-1. Tirage limité à 600 exemplaires.

L’homme le plus primitif, l’arme la plus puissante.

Wisigoth arraché au Ve siècle et transporté de nos jours par des aliens arachnéens terrifiants, Aric de Dacie va mener une guerre sans relâche contre ses ravisseurs, et tous ceux qu’y s’opposeront à sa colère. Équipé d’une armure surpuissante dotée de conscience et de sa brutalité acquise contre ses anciens oppresseurs romains, il deviendra le héros dont notre ère a besoin : X-O Manowar.

Créé par des légendes des comics, comme Jim Shooter (Secret War), Bob Layton (Iron Man), Barry Windsor- Smith (Wolverine Weapon X), Joe Quesada (Daredevil), Steve Englehart (Detective Comics), découvrez les origines épiques d’Aric dans l’univers Valiant Classic ! Contient X-O MANOWAR (1992) #0–9, et X-O DATABASE #1.

Je suis en train de lire ce recueil, et j’y prends beaucoup de plaisir. Un plaisir lié à la série elle-même (l’univers Valiant classique m’a beaucoup intéressé à l’époque, d’abord parce qu’il remettait sur le devant de la scène des personnages ancestraux que j’avais lus très tôt, comme Magnus, Solar ou Turok, et ensuite parce que ses premières créations, comme X-O Manowar ou Ninjak, me semblaient très prometteuses), mais aussi associé au caractère historique de cet album et de la série qu’il contient).

L’album s’ouvre sur l’épisode #0, qui est venu après, mais qui raconte l’avant et qui présente la particularité d’être dessiné par Joe Quesada. C’est pêchu, musclé, dynamique, ça fonctionne très bien et ça résume parfaitement l’univers et les enjeux, se situant juste avant le premier épisode : cette sorte de prequel, de récits des origines, développe des détails secondaires du premier épisode, et donne au personnage d’Aric une dimension épique.

Paradoxalement, ce chapitre introductif insiste sur les extraterrestres auxquels Aric doit son armure et ses capacités, entités pourtant secondaires dans la série, qui se concentre sur les relations du barbare avec les Terriens d’aujourd’hui (de 1992, en fait). C’est donc l’occasion d’avoir des cases à l’ambiance évocatrice, exotique, cosmique.

La suite, publiée donc environ un an et demi avant ce chapitre quesadien, incarne complètement la méthode Valiant. Le premier chapitre est illustré par Barry Windsor-Smith, dans un style efficace et élégant, mais un brin rapide : on sent que c’est alimentaire. Le dessinateur, qui s’est occupé des designs, se charge également des couvertures, conservant à la série son identité visuelle.

Malgré la valse des scénaristes (Steve Englehart et Bob Layton officiant, entre autres, sur la dizaine d’épisodes compilés), l’intrigue se déroule assez clairement. Aric croise le chemin de personnages importants dans l’univers Valiant, dont Harada ou les membres de Harbinger. Chaque épisode fait partie d’une saga plus longue mais peut se lire indépendamment et donner le sentiment d’avoir survolé un chapitre complet. C’est une volonté de Shooter que d’offrir à ses lecteurs une série accessible. Les dialogues et les voix off se chargent de présenter les intervenants et les enjeux. Cela dit, malgré les bonnes intentions et même si l’on connaît pas trop mal cet univers, je me demande dans quelle mesure des textes d’appoint, pour cette édition française, n’auraient pas été inutiles, afin d’éclairer tel ou tel fait majeur dans la série.

L’univers mis en place par Jim Shooter au début des années 1990 a connu un certain succès et un retentissement évident. C’est en partie dû à l’habile communication mise en place par l’éditeur, qui a su jouer sur la nostalgie avec les vieux personnages, titiller les tendances modernes avec des personnages nouveaux lorgnant sur les modes naissantes… mais la lecture de ce recueil amène un argument complémentaire permettant de mieux comprendre l’aura et la longévité de cet univers tout neuf à l’époque.

Shooter fait des choix à rebours de certaines évidences. Par exemple, lui qui a tenu la maison Marvel pendant une décennie, entretenant les codes habituels et la complicité avec les lecteurs, choisit pour sa nouvelle collection de redéfinir les habitudes : finies notamment les crédits en première page présentant les auteurs, souvent avec des superlatifs ronflants et amusants. Désormais, l’équipe créatrice apparaîtra en deuxième de couverture ou au bas de la dernière planche, dans une liste aussi sobre que fonctionnelle, sans fioriture.

Autre choix singulier, celui de ne recourir à aucune onomatopée. Les coups de point, les explosions, rien n’est accompagné de grosses lettres exubérantes, et l’habillage sonore est laissé à l’imagination du lecteur. Cela facilite le travail du lettreur, on s’en doute, mais on peut également supposer que cela peut faire baisser la facture (selon les accords avec les prestataires) et accélérer les délais de livraison. Narrativement, c’est contre-intuitif : on pourrait penser qu’un genre aussi spectaculaire que le super-héros soit indissociable de la panoplie de tonitruants sound effects qui jalonnent les planches de leurs aventures. L’argumentaire de Shooter veut que cela permette de faire respirer le dessin, mais n’est pas Barry Smith qui veut, et force est de reconnaître qu’il faudra quelques années avant que les comics Valiant ne soient illustrés de manière spectaculaire (notons quand même l’épisode 6, illustré par Steve Ditko qui renoue avec ses cases horizontales de duels, qui ont fait les beaux jours de Spider-Man et qui ont marqué Frank Miller ou Ed Hannigan… et qui profitent très bien de cet absence d’onomatopées).

Le résultat, c’est une série, et tout un catalogue, de bandes dessinées sans éclat visible, uniquement concentrées sur la narration. Les cases d’un format régulier se succèdent sans se chevaucher, les cadres ne sont pas explosés, les personnages ne débordent pas. Le catalogue Valiant semble aller à contre-courant des tendances de l’époque, le fameux « in your face » prôné par Rob Liefeld et par les autres membres du gang Image.

Valiant, c’est l’anti-Image. C’est peut-être là l’une des clés de la longévité de cet univers (en dépit des départs de responsables, des relances, des rachats…). L’univers « Ultraverse » de Malibu n’a pas duré aussi longtemps, en dépit de séries passionnantes (les Strangers d’Englehart, Mantra de Mike Barr…), et pourtant, la production était soignée (bon papier, couleurs novatrices, auteurs renommés…) avec une volonté de singer Marvel de la meilleure manière. Le « Comics’ Greatest World » de Dark Horse a fait des choix éditoriaux risqués, par exemple en lançant ses nouvelles séries à partir de cross-overs. À part X et Ghost, le résultat n’a pas été à la hauteur des attentes. À une époque où tous les éditeurs se sont montrés désireux de lancer leur propre univers de super-héros, celui de Valiant a fait montre d’une résistance surprenante face aux justiciers des Image Boys. C’est peut-être pour cela que le cross-over Deathmate, qui opposait les héros des deux univers dans d’épais prestige format, a connu un certain succès et exerce encore aujourd’hui une fascination évidente, et pas seulement à cause de l’aspect formel : l’esthétique la plus exubérante côtoyait la plus sobre, dans une étrange alchimie des contraires.

Deathmate_black

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Le pari risqué de Shooter a porté ses fruits, en tout cas pendant quelques années. Et à lire ce recueil, on peut se poser la question de la pertinence de sa tentative, voire de son côté visionnaire. Allant à rebrousse-poil de toutes les tendances de l’époque, ainsi que des conventions narratives admises depuis des décennies, l’univers Valiant semblait prôner une bande dessinée d’un autre âge, là où Image préfigurait l’avenir. Mais a posteriori, ça ne semble pas aussi simple.

Déjà, à l’époque de Shooter, une narration sobre, avec des compositions régulières et des cases au format passe-partout, ça existe : du côté de Vertigo, certains auteurs privilégient des planches où les vignettes s’alignent sans remous, et ça ira en augmentant, certaines séries majeures, à l’exemple de Hellblazer ou Preacher, préférant un découpage minimaliste afin de mettre en valeur les dialogues et la caractérisation. Plus éloquente, l’absence d’onomatopée annonce déjà les explorations formelles d’un Warren Ellis qui se débarrassera bientôt, à la fin de la décennie, de tout effet sonore, laissant pour le coup exprimer la violence des situations (et quand c’est un Bryan Hitch qui dessine, l’impact n’en est que plus saisissant). Le même Ellis mettra, dans ses productions chez l’éditeur Avatar, en avant un découpage formel minimaliste afin de privilégier la dimension textuelle du récit.

Relire X-O Manowar aujourd’hui, c’est prendre la mesure de l’importance historique du catalogue Valiant de l’époque. C’était certes une alternative au règne des deux éditeurs dits majors, mais c’était aussi des choix narratifs, thématiques (Harada, s’il hérite du Lex Luthor de Wolfman et Byrne, annonce aussi le Henry Bendix de StormWatch et quelques autres vilains d’apparence faussement anodines) et formels qui pouvaient passer pour risqués voire ringards, mais qui semblent, avec le recul, annonciateur d’un air du temps et d’une modernité qu’on n’était sans doute pas en mesure de saisir à l’époque.

Jim

3 « J'aime »

J’ai toujours hésité à prendre cet album.

Pas facile de conseiller : tu trouveras peut-être ça old school ou chiant ou ouatéveur. Peut-être que les quelques extraits te donneront une idée.
Moi, à la fois en tant que lecteur et en tant que critique, j’aime bien, mais effectivement dans une perspective historique. Qui manque cruellement, à mon sens, dans l’accompagnement éditorial de la série : le contenu est trop brut de décoffrage, en quelque sorte.

Jim

Me confonds pas avec Blackie, stp.

1 « J'aime »

Y a beaucoup de vieilleries que je fais dans ce cadre.

J’ai les numéros US, j’ai le premier tpb, et je me suis donc rué sur cette intégrale lors de la campagne sur Ulule. C’est la troisième traduction d’un titre Valiant dans ce format (Archer & Amstrong par BWS et Harbinger avant ça). Évidemment comme je suis faible, j’ai les versions collector…