Tiens, j’ai récemment trouvé le seul album (à ma connaissance en tout cas) que Paquet a consacré au couple Beresford, des enquêteurs un brin fauchés qui ont eu droit à une adaptation très libre (mais très drôle) en France, avec Catherine Frot et André Dussolier dans les rôles (dans Mon petit doigt m’a dit, Le Crime est notre affaire et Associés contre le crime, trois films réalisés par Pascal Thomas entre 2005 et 2012 : j’en ai vu un, le premier je crois, et c’est drôlement porté par les acteurs).
Comme je disais plus haut :
Le récit déroule une intrigue d’espionnage prenant racine dans le naufrage du Lusitania, et se plaçant dans l’Angleterre de l’après-guerre, où Thomas Beresford et Tuppence Cowley se mettent en tête de fonder une agence d’aventuriers et se retrouvent mêlée à la quête d’un document susceptible de fournir à ces fourbes de bolchéviques les moyens de déstabiliser la couronne. Les personnages sont sympathiques, les protagonistes divers et nombreux, les décors assez sympathiques mais parfois un peu maigres, la belle Tuppence séduisante mais à la plastique peut-être un peu trop exagérée (Emilio Van Der Zuiden n’est pas frileux quand il s’agit de représenter de belles femmes dotées d’atouts non négligeables, comme il l’a montré dans Les Filles de l’oncle Bob ou d’autres albums où il décline le concept de belle carrosserie).
L’album comporte, au-delà de la joliesse des personnages, de belles pages à effets, où l’auteur joue sur la forme narrative. Signalons par exemple une double page où les protagonistes discutent tout en se baladant dans un parc, suivant un parcours de case en case, dans des planches en gaufrier, qui font sinuer le regard du lecteur ; ou encore une autre double page où les silhouettes se déplacent dans une représentation de la bâtisse et où les différentes étapes de leur parcours guident l’œil et restituent les déplacements des antagonistes et leur simultanéité. Et quelques autres astuces ici et là. Il est dommage que cette volonté d’exploration formelle soit court-circuitée par des placements de bulles pas toujours heureux, notamment quand des propos se télescopent.
Dans un ordre d’idées voisin, une partie de l’intrigue (et des indices, mais certains ne sont pas donnés au lecteur et semblent, au moment de leur révélation, agir comme un cheveu gras sur une soupe tiède…) repose sur une confusion entre le nom et le surnom d’un des personnages. Il est ballot de constater que l’explication finale, jouant sur ce ressort, se mélange dans la désignation des personnages à un moment, comme si l’auteur s’était perdu dans le foisonnement de son casting.
Reste donc un dessin agréable, avec de beaux personnages cernés de noir qui feraient de Van Der Zuiden une sorte de Dodson franco-belge, pour faire court, plein de références rigolotes (mais parfois un peu pour initiés), notamment un Sergent Garcia qui se glisse parmi les seconds rôles, et un rythme soutenu. Un peu plus de complicité avec le lecteur (afin de lui montrer les indices) et une relecture plus assidue des dialogues auraient fait de cet album une franche réussite.
Jim