ALEXANDRA DAVID-NÉEL - LES CHEMINS DE LHASSA (Christian Perrissin, Christian Clot / Boro Pavlovic)

Discutez de Alexandra David Neel

La critique de Alexandra David Neel T.1 (simple - Glénat BD) par vedge est disponible sur le site!

Lire la critique sur BD Sanctuary

Ce personnage est évoqué dans la "biographie"d’Olrik.

Dix-neuvième livraison de la newsletter de Glénat (oui, je rattrape mon retard). Cette fois-ci, ce sont Christian Perissin ainsi que Boro et Lidija Pavlovic qui évoquent le confinement :

LE CONFINEMENT VU PAR Christian PERRISSIN et Boro et Lidija PAVLOVIC (depuis la Croatie).
Interview croisée de deux auteurs qui travaillent actuellement chez Glénat au deuxième tome de John TANNER à sortir prochainement.

- Comment se passe votre confinement ?
Christian PERRISSIN : Je suis dans une petite commune des gorges de l’Aveyron, 600 hab. éparpillés sur 5 villages et une multitude de hameaux. On se voyait déjà peu entre voisins, au marché du dimanche. Ma compagne et moi vivons très retirés, une maison sur un grand terrain, le confinement en soi est donc supportable. Notre souci c’est le ravitaillement, avec l’interdiction des marchés - vitaux dans la région - on ne peut désormais compter que sur la supérette d’une commune voisine, pas toujours réapprovisionnée.
Boro et Lidija PAVLOVIC : Nous suivons également les nouvelles de France et du monde et nous essayons de rester optimistes, c’est la seule façon de surmonter les crises.
La situation en Croatie est, à ce jour, de 635 contaminés, 4 morts et 45 guéris. À Split, nous avons 52 cas (ndlr : chiffres à fin mars, à ce jour la Croatie semble assez épargnée avec seulement 39 décès).
Notre équipe de crise (ministère de la santé, ministère de la police et Mme le médecin épidémiologiste) essaie d’aplatir la courbe, nous espérons donc qu’elle réussira. Mais l’ambiance est morose, les gens ont peur mais certains sont assez stupides et ne s’en soucient pas, marchant et faisant comme si de rien n’était.
C’est pourquoi des restrictions sont imposées : tous les événements sont annulés (culturels, sportifs, etc.), tout est fermé (les écoles ont un programme d’enseignement en ligne, les restaurants, les cafés, les bibliothèques, les musées, les galeries, les marchés) sauf les supermarchés et les pharmacies (leur temps d’ouverture est restreint de 8 à 17h) et il y a des ordres stricts pour y entrer - seulement dix personnes à la fois, des gels désinfectants à l’entrée, ainsi qu’une distance sociale de 2m à l’intérieur et de 1m en plein air. Ils envisagent d’interdire les rassemblements en plein air de 5 à 2 personnes seulement, avec une distance sociale.
Nous sommes isolés dans notre maison, sauf que je cours chercher de la nourriture une fois par semaine, heureusement nous avons un jardin autour de la maison donc Boro prend l’air et le soleil tous les jours, sans sortir. (Boro a eu des soucis de santé récemment, il va mieux et travaille à fond sur son album mais il doit faire attention).

- Quelles idées proposez-vous pour plus de solidarité ?
Christian PERRISSIN : La mairie est active et nous tient informés des besoins par mail. Une collecte de masques, gants, combinaisons jetables est en cours pour équiper les infirmières et aides à domicile du secteur. Les agriculteurs s’en servent pour se protéger des pesticides, les artisans et les particuliers qui bricolent. Je sais aussi qu’une trentaine de personnes fragiles et isolées sont contactées chaque jour et ravitaillées. Moi, je m’occupe de mes parents, très effrayés ils ne sortent plus du tout.

- Comment votre travail de création est-il affecté ?
Christian PERRISSIN : Les premiers jours, après l’annonce du confinement et la montée en puissance de l’épidémie, j’avais du mal à écrire. Dès que je butais sur une scène, je filais sur internet pour aller aux nouvelles et je me laissais happer par le flux ininterrompu des infos. J’ai fini par éteindre l’ordi pour continuer sur papier comme à mes débuts. Et ça va mieux.
Boro et Lidija PAVLOVIC : Le travail n’est pas du tout affecté (au contraire), il nous aide à surmonter les crises et à ne pas penser au Covid19 tout le temps parce que nous travaillons de toute façon à la maison, donc c’est bon… Mais bien sûr, nous voyons tout différemment maintenant, et nous nous inquiétons de l’avenir et de l’existence, et nous espérons que cette situation n’affectera pas Glénat et nous tous de manière négative.

- Sur quel scénario travaillez-vous en ce moment ?
Christian PERRISSIN : J’ai deux livres en cours. Avec Boro Pavlovic, nous achevons le second tome de John Tanner. Le scénario est écrit et, avec Boro, nous travaillons sur le découpage des dernières scènes. Ce que nous racontons est à l’extrême opposé du confinement. Tanner, enlevé par des Ojibwé quand il avait 9 ans, a partagé leur vie nomade 30 années durant. Dans cette seconde partie, il est adulte et chasse pour son clan à travers les immenses plaines du Canada. C’est rude et précaire, surtout l’hiver, parfois violent lors d’affrontements contre les Sioux. Mais une totale liberté et un esprit solidaire, mis à mal avec l’arrivée des blancs. Un jour la question va se poser pour lui de retourner chez les siens. L’autre livre, que j’écris et dessine, est une adaptation d’une nouvelle de Conrad, Jeunesse.

- Et quelles visions nouvelles cette crise peut-elle vous apporter ?
Christian PERRISSIN : Je ne sais pas encore, c’est trop envahissant. Depuis une dizaine de jours notre ciel printanier qui, en temps normal, est constamment zébré de lignes blanches - nous sommes sous un gros croisement de couloirs aériens - reste d’un bleu immaculé. Ma voisine, qui doit approcher des 90 ans, me disait retrouver le ciel de sa jeunesse. Cette crise va-t-elle nous contraindre à un retour en arrière ?