REALISATEUR & SCENARISTE
Samuel Fuller
DISTRIBUTION
Lee Marvin, Mark Hamill, Robert Carradine, Bobby Di Cicco, Kelly Ward…
INFOS
Long métrage américain
Genre : guerre
Titre original : The Big Red One
Année de production : 1980
Inspiré par ses souvenirs de la Seconde Guerre Mondiale, durant laquelle il a servi en tant que soldat et reporter de guerre au sein de la 1ère division d’infanterie américaine (surnommée la Big Red One), Au-delà de la gloire est un projet que Samuel Fuller portait depuis la fin des années 50. Le film a failli se faire, Fuller avait commencé les repérages, mais les différends du réalisateur avec la Warner, notamment au sujet des coupes budgétaires de la série B guerrière Les Maraudeurs attaquent (un boulot de commande que Fuller avait accepté en échange), en ont décidé autrement. Le studio voulait également John Wayne dans le rôle principal mais Samuel Fuller savait bien que le Duke n’était pas le bon choix pour incarner le Sergent.
Suite à la réception de ses controversés Shock Corridor et Police Spéciale, Samuel Fuller a du s’exiler un temps d’Hollywood, partageant son temps entre l’Europe et les Etats-Unis. Ce n’est qu’en 1978 qu’il parvient à obtenir les moyens nécessaires pour tourner son film de guerre le plus personnel. Budget revu tout de même à la baisse (d’où l’emploi de quelques stock-shots bien visibles) quand la Paramount a cédé les droits à la Lorimar qui a finalement donné son feu vert, avec Gene Corman, le frère de Roger, à la production.
La version finale d’Au-delà de la Gloire ne correspond pas totalement à la vision de son auteur. Comme cela lui est souvent arrivé, Samuel Fuller s’est fait en quelque sorte dépossédé de son final cut car le studio voulait une durée de moins de deux heures (le premier montage de Fuller faisait près de quatre heures). Ce qui donne au film un côté un peu décousu par endroits, on sent bien qu’il manque certaines choses (une partie a été réintégrée en 2004, une version de 2h40 sortie après la mort de Fuller). Mais l’histoire garde tout de même ce ton bien particulier qui en fait tout l’intérêt.
Au-delà de la gloire est un film sur cinq survivants, un sergent qui a déjà connu la Première Guerre Mondiale (impeccable Lee Marvin) et quatre jeunes soldats à ses ordres, les seuls rescapés de leur première bataille. Le scénario les suit d’un théâtre d’opération à l’autre, en se concentrant sur leurs actions et leurs relations. L’interprétation est de qualité et se distinguent surtout Robert Carradine, cigare toujours vissé au coin de la bouche (son personnage est l’alter-ego de Fuller), et Mark Hamill, fraîchement sorti du succès de La Guerre des Etoiles, en troufion torturé qui est le seul à remettre en question la façon de voir de son sergent et la folie dans laquelle ces hommes sont tous plongés.
Il y a un côté cruel dans le comportement de ce « noyau » bien rôdé (ils refusent même de se rappeler des noms des renforts qui rejoignent leur unité, d’en savoir plus sur eux, sachant pertinemment qu’ils risquent tous de ne pas s’en sortir), mais aussi pragmatique dans un certain sens. C’est l’un des éléments qui confèrent au long métrage de Samuel Fuller sa force, son identité…comme ses ruptures de ton, le décalage de certaines situations (l’absurde attaque de l’asile de fous ou encore l’accouchement), la manière de filmer les combats, presque dépouillés parfois. Efficaces sans être spectaculaires…
Le dernier acte voit les protagonistes découvrir un camp de concentration. Une expérience également partagée par Samuel Fuller qui a filmé à l’époque la libération du camp de Falkenau en Tchécoslovaquie. Le temps semble s’arrêter dans ce lieu d’horreur qui laisse le petit groupe de soldats en état de choc, presque vidé. La scène de l’enfant nous en dit aussi long sur le sergent. C’est très bien joué, très bien filmé…émouvant sans recourir à une surcharge de dialogues et d’effets mélodramatiques.