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Tiens, hier soir, en passant devant mon rayon Superman, je suis retombé sur Lex Luthor : La Biographie officieuse, version française d’un récit écrit par James Hudnall et illustré par Eduardo Barreto. Que j’ai relu avec plaisir, même si ça faisait bien trente ans que je ne l’avais pas parcouru. L’album est sorti en octobre 1989 dans la légendaire collection « Comics USA Super-héros », et comme bien des exemplaires, le pellicule brillant cloque et gondole (voir l’image : j’avais entendu dire que c’était à la suite d’un incendie dans un entrepôt qui aurait abimé les exemplaires survivants, mais je mise aussi, tout simplement, sur une malfaçon).

Le principe du récit est simple : on suit Peter Sands, un journaliste d’énième zone, alcoolique et fumeur, qui cherche à se refaire auprès des journaux qui l’ont précédemment embauché. Il finit par avoir un contact qui lui propose de financer un nouveau projet, à condition que ce soit juteux. Il se rabat sur une biographie de Luthor, mais se prend au jeu et commence à fouiner et à trouver « du biscuit » sur les origines de la fortune du magnat. Et, bien entendu, il va finir par attirer l’attention de gens mal intentionnés.

Parallèlement, on suit l’interrogatoire que subit Clark Kent au commissariat, car entre-temps le corps du journaliste a été retrouvé dans son appartement, et notre héros est le principal suspect, puisque Sands a laissé le nom de son présumé assassin, écrit en lettres de sang (« Clark m’a tuer »).

L’album propose donc des allers-retours entre l’enquête du journaliste, qui finit par dénicher des trucs croustillants, et l’interrogatoire. Les transitions d’une séquence à l’autre sont très modernes, dans la mouvance d’un Alan Moore, jouant sur les motifs visuels, les cadrages en parallèle, les symétries.

La continuité est respectée, puisqu’on a droit à l’évocation de l’amitié d’enfance qui unissait jadis Lex Luthor et Perry White, un souvenir évoqué l’année précédente, en 1988, dans la mini-série World of Metropolis.

Mais Hudnall s’attache à ne pas trop tisser de liens avec les comics mensuels, afin de conserver sa liberté de mouvement. Il se concentre sur la menace, sur l’atmosphère, et applique une sorte de recette Vertigo à un récit mainstream.

Voici donc un récit de Superman sans Superman, un thriller paranoïaque à l’ambiance très seventies dans sa mécanique implacable. La pirouette finale est assez splendide, montrant à quel point Luthor contrôle les différents rouages de la ville et fait d’une pierre plusieurs coups.

Graphiquement, c’est du Barreto en pleine forme : décors travaillés, ambiances pesantes, personnages magnifiques et expressifs. En revanche, j’ai été surpris, à la relecture de cette VF, de ne pas savourer la traduction. D’ordinaire, je suis plutôt amateur des traductions de Jeanine Bharucha, mais là, entre ce qui me semble être une erreur de traduction (ou une méconnaissance) et quelques tournures pas souples du tout, je reste un brin circonspect : aujourd’hui, avec près de vingt-cinq de traduction derrière moi, plusieurs trucs me sautent aux yeux. Il faut dire aussi que, question lettrage, il y a des couacs, y compris des bulles dont le texte d’origine n’a pas été nettoyé, ce qui rend illisible le texte français posé par-dessus : on sent une certaine précipitation dans l’exécution. Dommage.

Jim

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