Waow. Quel film.
Mais j’ai un souci : je ne sais pas si j’ai aimé. ^^
Je pense qu’il me faudra le revoir pour ordonner un peu dans ma tête ce que je comprends du discours (un brin confus, je le crains) d’Aster avec ce “Eddington”.
Deux arguments contradictoires qui président à ce désir de revisionnage ; pour : c’est beau à se crever les yeux de bonheur (le chef-op’ Darius Khondji, dont j’ai écouté la masterclass sur France Culture cet été, a manifestement adoré bosser avec Aster ; ça se voit j’ai envie de dire). Contre : mais que la mise en place est longue et laborieuse. Les 2 h 30 du film, à mon sens, ne se justifient absolument pas, mais alors pas du tout. La maladie des films actuels : il semble qu’ils recherchent dans la longueur une sorte d’avantage (ça plus la plus-valu spectaculaire du grand écran) sur les autres médias (je schématise mais vous voyez ce que je veux dire). Malgré la longueur de certains plans qui elle se justifie amplement par les choix de mise en scène d’Aster, le film aurait pu à l’aise se dégraisser de trois bons quarts d’heure…
Malgré son côté “on tire allègrement à la ligne”, cette intro n’est pourtant pas dénué de qualités. C’est par moments très drôle, et c’est aussi très méchant (tout du long… et je dirais même : trop ; la fin est d’une cruauté sans nom).
Je ne parle même pas du climax incroyable du film, en deux temps : d’abord une course-poursuite hitchcockienne en diable, puis un gunfight d’une brutalité ahurissante. On pourra toujours mégoter sur le fait qu’Ari Aster s’amuse et nous amuse d’une violence paroxysmique que le film fait mine de déplorer par ailleurs, mais bon, ça c’est un vieux dilemme que le cinéaste américain n’est pas le premier à éprouver.
Le critique Antoine Guillot, qui a détesté cordialement le film (mais alors, vraiment), lui fait quand même grâce d’une grande idée de mise en scène : le récit se déroule pendant le CoViD (et sa période la plus “parano” on va dire, sans jugement de valeurs ; c’est l’un des axes thématiques du film), et tous les personnages doivent donc se tenir à une distance préventive “de sécurité” de quelques mètres pour dialoguer… ce qui confère à tous les dialogues (et Aster se fait un malin plaisir de le souligner par sa mise en scène) des airs de duel de western.
Car le voilà le truc : “Eddington”, sous ses airs de comédie infusée à l’esprit des frères Coen (les différences avec le travail des frangins me semblent néanmoins énormes, sur bien des plans), est surtout et avant tout un western, citation un brin incongrue de John Ford à l’appui (on y regarde “Vers sa destinée” à la télévision…).
Qui trop embrasse mal étreint, dit-on : à vouloir brasser trop de thématiques complexes (paranoia complotiste, délires sectaires, MAGA, GAFAM, j’en passe), Aster donne des airs de grande confusion à son récit. Mais peut-être est-ce le but… Aster cherche peut-être à exprimer sa propre confusion face au climat socio-politique actuel aux Etats-Unis. C’est intéressant, mais ça rend le film assez malaimable.
Hâte de revoir ça pour clarifier un peu mes idées sur ce film pas facile facile à appréhender. En tout cas, après un “Beau is afraid” au final raté dans les grandes largeurs mais passionnant à mon sens par ailleurs, Ari Aster demeure un cinéaste à suivre, et pas qu’un peu. S’il insiste dans le registre de la comédie bouffonne, où il semble commencer à exceller, il a peut-êre un grand film à faire.