ÉVASION/ESCAPE PLAN I à III (Hafstrom / Miller / Herzfeld)

Les premières images du thriller carcéral The Tomb (EDIT : le film a depuis été renommé Escape Plan), avec Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger.

C’est « Prison Break chez les vieux » ?

Jim

C’est confirmé, Schwarzie ferait un putain de Druss

(pour ce qui connaissent pas => bragelonne.fr/livres/View/legende)

J’ai pensé la même chose que Jim sur le moment ^^.
Qu’est ce qu’ils vont pas nous faire ceux là…
En film sur le milieu carcéral c’est « Les évadés » qui m’aura bien marqué. Je l’ai beaucoup aimé ce film là. Je ne pense pas que ce sera dans le même style. :laughing: (plutôt des tatanes et je branche le cerveau après)
On va dire que je laisse le bénéfice du doute à ce film mais bon, je ne m’attend à rien de profond à la vu du synopsis. :frowning:

Mais c’est parfois bien les films peu profonds aussi :slight_smile:
J’attends d’en savoir plus quand même.

Moi, c’est plutôt le réal qui me fait peur…
Je n’avais pas du tout aimé « Chambre 1408 », thriller surnaturel cousu de fil blanc et chiant comme la pluie, avec John Cusack.

Faut dire aussi en général, les films avec john Cusack sont chiants comme la pluie indépendamment du réalisateur :smiley:

Il n’a pas été très inspiré dans ses choix ces derniers temps, c’est clair… Le dernier bon film avec lui dont je me souvienne, c’est « Identity » de James Mangold.

Jim travaille chez 20 min :mrgreen:

La bande-annonce :

La France me désespère.

Jim

En fait, je parlais des titres originaux, là : le premier titre du film était The Tomb, qui a ensuite été changé en Escape Plan.

Le titre français est maintenant connu…et c’est Evasion.

Ah, ouf.
Enfin, pour cette fois.

Jim

Alors donc, un film d’évasion avec Stallone et Schwarzenegger. Comment voulez-vous que je résiste ?

Et j’en sors relativement content. Bon, c’est pas le meilleur film d’évasion possible (mais dans ce genre, la barre est placée haute, faut dire), mais c’est en tout cas l’un des plus nerveux et l’un des plus vicieux.
Le film a plein de qualités formelles, la première étant d’en mettre plein la vue sans devenir ni aveuglant ni illisible. Ce qui est pas mal. C’est surdécoupé, mais les plans étant relativement « calmes » et l’usage de la caméra à l’épaule étant réduit à portion congrue, l’enchaînement des images n’intervient que pour conférer à la narration un rythme soutenu. Ce qui peut aller à l’encontre d’un récit entièrement constitué sur la patience et l’observation, mais ce qui renforce le bras de fer entre l’observé et l’observateur.
L’ouverture du film se fait sur une narration pas linéaire (et où les flash-back et les flash-forward ne sont pas évidents à « localiser », d’une certaine manière). C’est assez bien vu dans le sens où cela permet de matérialiser, en quelque sorte, la pensée diagonale du personnage central, qui ne pense pas dans des enchaînements logiques comme tout un chacun. Cette identité entre fond et forme génère un effet immersif assez efficace.
La deuxième partie, qui pose les protagonistes principaux et les enjeux (ainsi que la caractérisation) est constituée d’un grand nombre de plans sur des portes qui s’ouvrent. Renvoi au théâtre (l’irruption d’un personnage dans une pièce où il y en a d’autres indiquant à la fois le changement de scène mais également l’avancée dans l’intrigue), bien entendu, mais également commentaire du film sur lui-même, les portes, les vitres et les cloisons étant montrées comme franchissables, pour bien préparer l’enfermement qui va venir. Et si les cloisons sont franchissables et ne représentent plus l’adversité, c’est la table (de réunion, de travail, de repas) qui devient le symbole de la séparation, de la rencontre, du duel, bref, du drame. Là aussi, plutôt bienvenu (et bien amené, même), le rapport intérieur / extérieur étant travaillé pour impliquer une circulation (horizontale en l’occurrence) qui sera perturbée voire entravée plus tard dans le film).
Une très belle astuce est celle de l’insertion des plans (papier et 3D) dans les images, ce qui permet là encore de donner corps à la pensée du héros, qui pense en trois dimensions et visualise les cloisons derrière les cloisons, mais permet également de faire la jonction entre ceux de l’extérieur, qui le cherchent, et ceux de l’intérieur, qui veulent sortir. Cela matérialise un échiquier en volume et, loin de « faire joli », sert de rouage narratif et de relais d’information pour le spectateur. Et en plus, c’est assez élégant.
Bref, bien.

Question acteurs, ils sont tous très bien. Et tous légèrement à contre-emploi : D’Onofrio en névrosé de la propreté armé de lingettes antiseptiques, Caviezel en directeur carcéral sadique, Neill en toubib perclus de remords et la pétoche au ventre… Chacun donne le meilleur de lui-même en surprenant les fans. Mention spéciale à Caviezel, que je n’avais pas vu aussi inspiré depuis… pouh, bien bien longtemps !
Et le rapport aux fans me semble également bien réfléchi. Après tout, c’est une rencontre que l’on attend (si l’on excepte les brèves séquences dans Expendables) depuis des décennies. Il y a plusieurs dangers à ce genre de réunions de monstres sacrés, le premier étant de les laisser occuper l’écran et l’intrigue. Là, justement, la caméra crée une attente sur les deux héros (le trois-quart dos d’introduction de Schwarzenegger, par exemple), mais ne s’attarde pas sur eux. Ça reste relativement sobre, presque sec parfois, pas plus qu’il n’en faut : pas de contre-jour, pas de ralenti, pas de contre-plongée pour présenter les apparitions des deux acteurs, on n’en fait pas trop, la caméra ne s’écoute pas filmer ses vedettes.
Et dans ce sens, le film, qui compte, en tout cas dans sa promo, sur la rencontre des deux acteurs, ne repose pas sur eux. Le scénario fonctionne tout seul, il donne l’impression (fausse peut-être, je ne connais pas les coulisses du développement du film) de ne pas avoir été écrit pour eux, et qu’un autre tandem d’acteur (mettons, Wesley Snipes et Kurt Russell) aurait tout aussi bien pu le porter. Les acteurs, pour stars qu’ils soient, donnent l’impression d’être au service du récit, et non l’inverse.
Le film n’oublie cependant pas d’être un film d’action et d’être un film avec Schwarzenegger et Stallone. La fin, quand l’essentiel de l’intrigue est évacué, offre quelques biscuits pour fans (la mitrailleuse…). Interviennent alors les plans exotiques et les ralentis, mais c’est finalement tellement peu encombrant dans la construction du récit que ce remerciement envers les fans demeurent, au final, de bon aloi.
Bref, bon équilibre entre le pari commercial de rassembler ces deux têtes d’affiche et l’écriture d’un récit rapide et tordu, ça marche bien. On pourra reprocher que le tout dernier acte (les règlements de compte) est un brin rapide, mais il est le pendant de l’ouverture du film, et le sujet ayant été traité et le contrat rempli, ce ne sera donc qu’un péché véniel.

En plus d’être un bon gros divertissement sympathique et tordu, le film se paie le luxe d’avoir un discours qu’on qualifiera de « politico-social » pour faire vite : grosso modo, le métrage nous interroge sur le rôle, la fonction et l’utilité de tout système carcéral, en le confrontant au monde libéral, à la confiscation du rôle de l’État (et donc de la « violence légale », voir Max Weber) par la sphère du privé. La nature et l’emplacement même de la prison permette un discours sceptique sur l’application de la loi. Sans rentrer dans les détails (afin de ne spoiler personne), disons simplement que le film pose la question de la définition du criminel. Comme tout film d’évasion, bien sûr, mais en l’occurrence, le questionnement est ici totalement en prise avec son temps, quand on considère les raisons pour lesquelles les prisonniers sont incarcérés.
L’environnement de la prison est très intéressant. Les matons, sous couvert de protection d’identité, portent des masques qui les rendent anonymes. Vêtus d’uniformes noirs aux surfaces réfléchissantes, ils prennent des allures d’androïdes dans les politique-fictions présentant des régimes sécuritaires et paranoïaques (post 1984, quoi…). On glisse de la dénonciation du carcéral à celle du fascisme, sans d’ailleurs que ce soit particulièrement outré.

De même, l’un des personnages, musulmans, passe du statut de chef de gang dangereux à celui d’allié contraint. Le film en profite donc pour mettre en scène, au moment de sa mort, une exécution qui ressemble davantage à l’acharnement d’une milice bras armé d’un pouvoir concentrationnaire (ostensiblement occidental) contre un opposant supposé, qu’à une fusillade qui aurait mal tourné lors d’une évasion. Symboliquement, c’est la mise en scène d’une exécution sommaire d’un terroriste supposé par des pseudo SWAT à la botte d’un État policier. La scène, impitoyable, participe du portrait d’une organisation sociale autoritaire qui enferme ou abat sans autre forme de procès. Le prisonnier, abattu par le directeur, lui-même incarné par Caviezel, catholique pratiquant, voilà une scène qui ne manque pas de sel.

La confiscation de la justice (jugement et sanction) par le privé constitue un sous-texte particulièrement riche. Le film, qui passe par quelques classiques du film de prison (le médecin, le mitard, qui permettent de glisser quelques facilités et de graisser les rouages du récit, pardi…) fait l’économie du prisonnier qui clame son innocence (genre, le petit comptable à lunettes, ce genre de choses…), ce qui fait qu’il n’appuie pas sur ce discours politique. Mais le discours demeure présent néanmoins, dans les dialogues et dans la caractérisation des personnages.

Bref, bon gros film d’action, sans doute pas l’un des sommets de la carrière des deux acteurs, mais qui ne démérite aucunement, accompagné d’un discours intéressant qui permet de le revoir et d’y éplucher les différentes couches de lecture possible.
On aurait pu avoir un déferlement de clins d’œil, on a un film qui tient tout seul. Plutôt pas mal, non ?

Jim

ça peut pas être pire que the expendables et, vu ce que tu en dis, ça doit même être un film plutôt sympa à regarder :wink:

J’ai pas vu le film mais j’ai vu la bande-annonce en salles, et j’ai rigolé comme un goret à la réplique de Schwarzy, qui prend une mandale par Stallone et lui répond : « tu cognes comme un végétarien… ».

Je n’ai pas « vu » tout ce à quoi l’analyse de **Jim ** renvoie pour ma part (voir justement toute son analyse supra), seulement un film d’action plutôt sympa dont l’idée de départ est assez originale (de mon point de vue en tout cas) et dont l’une des révélations cette fois si finale, est vraiment bien pensée.

Reste que j’ai trouvé deux ou trois longueurs ; donc un film qui aurait de mon point de vue gagné à être plus ramassé, mais rien de rédhibitoire.
Ça a été, en tout cas, un bon moment d’évasion pour moi aussi.

Et comme le fait remarquer Photonik, les petites saillies humoristiques sont vraiment réussie.

Et en plus Arnold a l’air de bien vieillir, il est en encore cet athlète qui plait. :wink:

Oui, c’est plutôt un bon film, qui, comme le souligne Jim, n’est pas bouffé par ses acteurs principaux.

On peut toutefois regretter la propension habituelle des méchants à rater une vache dans un couloir de 2m de large, à 20m de distance avec une mitrailleuse, à croire que les rambardes attirent naturellement les balles.

Mis à part ce petit détail technique, j’ai plutôt bien aimé les analyses de la situation de Stallone dans sa recherche d’évasion.

Et c’est là que je trouve l’astuce assez habile, c’est que dans la recherche de la faille, il y a une « humanisation » des matons donnée par les prisonniers, dans le sens où Stallone et Schwarzie leur attribuent un nom fictif et les tocs liés, ce qui supprime le côté androïde donné (et probablement voulu) au départ.

La révélation finale est pas mal vue, même si pour ma part elle a fait un peu flop (m’en foutait un peu de l’identité de Mannheim), mais elle donne sens à tout ce qui s’est produit depuis le début. Donc, pas mal quand même.