GRÉGORY (Pat Perna / Christophe Gaultier)

Gregory

Le 16 octobre 1984, les gendarmes repêchent dans une rivière des Vosges le corps sans vie d’un enfant de quatre ans, Grégory Villemin. Son bonnet est rabattu sur son visage, ses pieds et ses mains sont liés. Le lendemain, une lettre anonyme arrive au domicile de ses parents. Tout est hors norme dans cet assassinat. La victime est un enfant qui jouait sur un tas de gravier devant chez lui. Le meurtrier revendique son crime avant même de l’avoir commis. Il n’y a aucun mobile évident : les parents de Grégory sont un jeune couple d’ouvriers, amoureux et sans histoires.
Un premier suspect, Bernard Laroche, un cousin du père, est arrêté puis relâché. Pour le défendre, ses avocats détournent l’attention vers la mère de l’enfant, Christine Villemin. Sous pression, rendu fou par les manœuvres et la rumeur, Jean-Marie Villemin se rend chez Laroche pour tenter de le faire parler. Il le tue.
La victime devient alors coupable. En prison, Jean-Marie Villemin effectue un long chemin intérieur. Lors de son procès, son humanité et celle de sa femme bouleversent les jurés. Des années plus tard, la justice a reconnu ses erreurs, présenté des excuses officielles à Christine Villemin et réparé son préjudice. Quarante ans après, l’affaire est toujours en instruction. Grâce aux parents de la victime, des moyens judiciaires importants sont mobilisés pour trouver le ou les coupables.

Ce roman graphique est exceptionnel à plus d’un titre. Fondé sur une documentation impressionnante, il s’appuie sur le témoignage inédit de Jean-Marie Villemin et ses nombreux échanges avec les auteurs. Sans rien occulter, le père de Grégory raconte, dans le détail, les sombres coulisses du drame qui a bouleversé sa vie et celle de sa femme, Christine, depuis le 16 octobre 1984.

  • ASIN ‏ : ‎ B0D6Y27LN5
  • Éditeur ‏ : ‎ Les Arènes BD; Illustrated édition (3 octobre 2024)
  • Langue ‏ : ‎ Français
  • Relié ‏ : ‎ 137 pages
  • ISBN-13 ‏ : ‎ 979-1037512581
  • Poids de l’article ‏ : ‎ 920 g
  • Dimensions ‏ : ‎ 22.4 x 1.9 x 30.2 cm

Alors là … the palme !

2 « J'aime »

Je peux avoir mes périodes de plongée dans faits divers mais aucune autre affaire ne m aura autant marqué que celle du petit Gregory devenant l affaire Laroche, devenant deux fois l affaire Villemin, puis restant en suspens.

Il y a quelque chose de subjuguant dans la haine qui dans cette histoire ne cessera de changer d objet passant du grand père au père, emportant le fils puis venant se déporter sur la mère. Comme si la haine folle du Corbeau en circulant avait fini par contaminer la France entière en elisant son ultime victime Christine Villemin.

Lorsque Durkheim fonde quasiment à lui seul la sociologie avec son étude sur le suicide, il forge le terme de fait social total, un fait qui condense à lui seul toutes les dimensions dimensions sociales d une société. Avec l affaire Gregory, nous avons le fait divers total. Rien des évolutions que connaitra cette tragedie multiple n est compréhensible si on ne comprend pas le role que la presse y joue, ni la politique, ni les rapports paris-province, ni le fonctionnement de la justice, ni les rivalites gendarme police.

Par quelques bouts qu on prenne l affaire du petit Gregory, elle est fascinante, siderante et absolument revoltante.

Facile dès lors d oublier le drame humain de la mort d un enfant dans la tragedie aux proportions épiques que cette mort prendra.

Ramener l humain, c est ce à quoi s atelle cette bande dessinée à l initiative du père de Gregory. Ramener l humain en faisant vivre Gregory.

La bd y reussit dans une première partie déchirante qui nous presente Gregory avant son enlèvement et son assassinat.

C est l humain toujours mais autrement qui est au premier plan dans la seconde partie qui se focalise sur le procès de Jean-Marie Villemin. La réussite de cette seconde partie est moins evidente surtout qu elle appelle une suite (c est en au moins deux tomes) rendant plus difficile de se forger un avis définitif.

Si la rage et la detresse du père est tres palpable, difficile sans doute pour un lecteur novice de l affaire de saisir l importance des scènes du procès choisies d etre ici relatees.

En restant au plus près de la dimension humaine, c est aussi la complexité de l affaire qui peut échapper et la compréhension des scènes du procès avec elle.

Le lecteur novice pourra peut-être passer ainsi à coté et le lecteur plus familier de l affaire pourra se sentir frustré que les injustices terribles faites au couple ne soient pas plus clairement expliquées. Mais en cela le lecteur familier ne se retrouve-t-il pas à la place exacte de Jean-Marie partageant son desir de faire comprendre au court de ce procès l énormités des ignominies, des trahisons, des tragedies que sa famille aura eu à endurer et desquelles les coupables, avocats, journalistes, policiers, juges d instruction, n auront jamais eu à répondre ?

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C’te faignasse !

Jim

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Il a fait pire au départ : il n’avait mis que ton nom.

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Oui, j’ai eu le temps de voir ça…

Tori.

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J’ai vu !

Jim

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C’te poucave

J etais occupé à ecrire le post.

J allais y revenir.

Disons qu’un tel.niveau, faut pas le cacher.

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Voilà, la classe.

Je laisse faire le pro moi, je connais mes limites.

Autant je peux me « passionner » (c’est souvent plutôt de l’ordre de l’indignation, cela dit) pour la politique, la guerre… autant les faits divers, surtout quand il y a des enfants, j’ai du mal. J’essaie d’éviter, je contourne, je regarde ailleurs. Un accident de la route, je fais partie de ceux qui ne regardent que la route, qui ne veulent pas savoir (surtout quand il y a déjà les secours, la police voire les médias : inutile d’en rajouter dans le voyeurisme).
C’est sans doute pour cela que je n’ai pas ouvert de sujet sur cet album. Ça mobilise, voire remue, des trucs qui ne me sont pas agréables. Et ce n’est pas encore assez vieux pour que je puisse faire comme si c’était de l’Histoire.

Jim

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C est compréhensible.

Mais cette affaire est tellement hors norme.

L horreur, la tragédie puis l injustice tellement totale.

Les faillites de la presse, de la police, de la justice et même de la gauche d une certaine manière sont si abyssales.

J y replonge à l occasion. Toujours au bord des larmes.

Pas mieux que Jim.
(je vous raconterai pas la « blague » qu’a faite la grande ce soir à l’école…)

Voilà : c’est déjà insupportable quand il s’agit de détournements de fonds, de maltraitance dans les crèches ou les ehpad, de corruptions ou de renoncement à la souveraineté… alors quand en plus ça tourne autour de la mort d’un enfant et de la déliquescence d’une famille et d’un village, c’est insoutenable.
Et je crois qu’en fait, c’est trop pour moi.

J’en regarde, des documentaires débiles sur tout et n’importe quoi. Mais tous les trucs sur les faits divers, j’évite : je n’ai pas la carrure.

Jim

Pour ça que je préfère l’été.

4 « J'aime »

C est tres enseignant sur comment notre société fonctionne, sur le monde dont 81 et la gauche ont accouché et dont quelque part l acte de naissance est l affaire Gregory bien plus que 83.

Je me doute. Je comprends.
Mais je crois que c’est un réflexe de protection, chez moi.

Tu sais sans doute, à force de me lire, que je m’intéresse beaucoup à ce que la fiction dit de nous, de notre société (et l’utilisation par les médias de cette fiction est éloquent aussi, bien sûr). Je reproche souvent à TF1 et ce genre de films de diffuser à l’envi des séries ou des films lorgnant vers le polar, l’enquête, et donc présentant une société hostile et fatalement anxiogène (genre, on passe d’abord Arrow, histoire de vengeance urbaine, à heure de grande écoute, et on passe Flash ensuite seulement, série qui pourtant manipule des concepts SF qui font rêver et ouvrent l’esprit).
Même si je suis moi-même très client des franchises Law & Order, j’essaie d’en limiter la consommation parce que, justement, comme tout le monde, ça finit par jouer sur ma vision du monde (genre, j’éteins la télé et je vérifie si la porte est bien fermée avant d’aller dormir). Tu vois le topo ?
L’un des trucs les plus inquiétants à mes yeux, c’est que ce genre de séries s’inscrit dans une certaine représentation du réel (les scénaristes des séries Law & Order en parlent souvent, de leur inspiration puisée dans les rubriques « faits divers » des journaux). Il ne me semble pas que ce soit une vue de l’esprit que notre société est inhospitalière et inquiétante, j’en ai conscience mais je ne veux pas m’attarder dessus. Peut-être parce que je veux conserver encore un semblant de sympathie à l’égard du monde extérieur. Ou que je veux me protéger. Je ne sais pas.

Il y a dans le fait divers quelque chose de trop vrai ou, plus précisément, de trop proche, qui m’inquiète bien plus. Sans doute qu’il y a une part de misanthropie là-dedans. Ou au contraire je suis attristé des dégâts que ça peut faire sur tout le monde. Je sais pas. Mais j’essaie de conserver une distance.

Jim

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Il y a une dimension de dévoilement dans le fait divers, une plongée dans le monde de la pulsion sous le vernis de l idéal, de la civilité, de la conscience.

Le trop de réel du fait divers, ce n est pas forcément l histoire vraie mais cette vérité de la pulsion qui s y aperçoit et où se mélangent sexe et mort.

In fine ou au commencement qu est ce qui fait qu un journaliste arrivant le lendemain de l assassinat et appercevant Christine Villemin sedateée dans l encablure d une porte est saisi par la conviction que « c est elle la coupable » et s acharnera des lors contre elle ? Qu est ce qui fait qu une juge d instruction amoureux de lui même se laissera seduire par cette idée en depit de tout indicide ? Qu est ce qui trace ce chemin que la haine empruntra jusqu à embraser la France si ce n est le désir , si ce n est que Christine Villemin etait alors une très belle jeune femme de 23 ans à l esprit vif, touchée par l horreur indicible et que c est cela qu on a voulu lui faire payer.

Je suis tombé sur ça :