[quote=« Jim Lainé »] Chapeau cela dit pour la scène d’engueulade à table, qui résume en une (longue) séquence l’effritement raconté par le film.
Jim[/quote]
C’est une scène épatante, vraiment, qui résume toute la méthode Wheatley : tournée en peu de temps avec un chef-op’ très complice (ils lisent dans les pensée l’un de l’autre, pour ainsi dire) et des acteurs énormes dans le registre de l’improvisation, puis énormément travaillée en aval au stade du montage, c’est presque le manifeste de sa méthode, donc.
Pour le reste, tous les goûts sont dans la nature, bien sûr. J’ai vu les 4 long-métrages de Wheatley (le polar fauché « Down Terrace », « Kill List » donc, "Touristes, sa comédie horrifique, et « A Field in England », son travail le plus barré…), et j’y vois pour ma part une véritable patte d’auteur qui s’installe tranquillement, avec une méthode originale et constante mais « souple » (Wheatley s’adapte au projet quand même), et surtout une thématique intéressante, celle d’une sorte d’archéologie des croyances qui font l’histoire anglaise. Wheatley voit, à la manière d’un géologue, ces différentes couches ou strates de ces croyances qui se sont succédées au cours des siècles, et qui font l’Angleterre d’aujourd’hui. On creuse beaucoup dans les films de Wheatley par exemple, et les squelettes et autres fossiles affleurent souvent à la surface.
Pour le déroulé de « Kill List », on peut voir en effet l’histoire comme celle d’un homme normal qui voit l’horreur s’immiscer dans sa vie, mais ça me semble plus subtil que ça. L’horreur a toujours été présente dans la vie de ce tueur, les images et le crescendo horrifique ne faisant que progressivement coïncider sa vision du monde et celle du spectateur. Wheatley entend interroger les conséquences des choix de politique étrangère de son pays, et notamment sa participation à l’invasion de l’Irak en 2003. Une fois qu’on a préparé des tueurs à agir, que font-ils une fois désoeuvrés ? Ben ils continuent à tuer.
On peut juger que l’histoire est elliptique et manque à fournir des explications sur les tenants et aboutissants de l’intrigue : moi j’aime beaucoup ces histoires de communautés occultes ou de complots à grande échelle qui rappelle un peu (et même beaucoup) « The Wicker Man » de Robin Hardy, LA grande influence du film, et les films de Jacques Rivette, où il y a toujours un complot à la « Un Nommé Jeudi » de Chesterton et dont personne (pas même ceux qui sont partie prenante) ne comprennent le fin mot…