Animation/fantastique
Moyen métrage tchécoslovaque/ouest-allemand
Réalisé par Jiri Barta
Scénarisé par Kamil Pixa d’après le conte du Joueur de Flûte d’Hamelin
Titre original : Krysař
Année de production : 1986
Parmi les noms importants de l’animation tchèque, il y a celui de Jiri Barta, un spécialiste de la stop-motion qui étudia à l’Académie des Arts de Prague avant de rejoindre le studio fondé par Jiri Trinka, qui fut appelé en son temps le « Walt Disney de l’Europe de l’Est » (même si leurs travaux étaient complètement différents). Jiri Barta a d’abord travaillé sur des courts-métrages télévisuels pour la jeunesse avant de se lancer dans un projet d’envergure pour le cinéma, un film (moyen métrage peut-on dire puisqu’il ne dure que 53 mn) à destination d’un public plus adulte.
Car si Krysar s’inspire d’un conte populaire, son traitement et son atmosphère désespérée ne le destinent pas vraiment aux enfants. C’est l’adaptation du Joueur de Flûte de Hamelin, légende allemande qui fut notamment transcrite par les frères Grimm…et typiquement le genre d’histoire que je ne connais que par les différentes déclinaisons qui en ont été tirées, que ce soit sur papier ou à l’écran. D’après ses dires, Jiri Barta a voulu revenir aux racines allemandes du récit tout en s’inspirant également de sa réinterprétation par le poète tchèque Viktor Dyk.
Pendant presque un an, Jiri Barta et ses équipes ont méticuleusement créé un village et ses habitants, dont l’apparence particulière rappelle les gravures sur bois. Les habitants de cette version de Hamelin n’apparaissent pas vraiment sous leur meilleur jour. Ils sont tous obsédés par leur rang dans la société et motivés uniquement par l’appât du gain jusqu’à adopter des visages monstrueux lors de disputes d’argent. Le fait que les dialogues ne soient constitués que d’une sorte de charabia renforce le côté malaisant de cette visite d’une bourgade loin d’être accueillante…
L’aspect cauchemardesque est renforcé par les rappels visuels à l’expressionnisme allemand et par la façon dont les rats qui infestent Hamelin sont représentés, un mélange de poupées et de véritables rongeurs qui paraissent parfois gigantesques par le jeu des perspectives…des rats presque plus vivants que les habitants eux-mêmes. Le scénario suit assez fidèlement le déroulement que l’on connaît dès l’arrivée du Joueur de Flûte qui propose contre paiement de débarrasser la ville de son problème…jusqu’à un dernier acte qui bascule complètement dans l’horreur…
…et même du body-horror. La fin s’écarte de celle du conte originel (disons juste que cette fois le joueur de flûte n’enchante pas les enfants) et conclut ce fascinant représentant de l’animation tchèque sur une note triste et amère…et malgré cela tout de même une toute petite lueur d’espoir…