Drame/fantastique
Long métrage australien
Réalisé par Peter Weir
Scénarisé par Peter Weir, Tony Morphett et Petru Popescu
Avec Richard Chamberlain, Olivia Hamnett, Gulpilil, Nandjiwarra Amagula…
Titre original : The Last Wave
Année de production : 1977
Le « Temps du Rêve » est au coeur de la culture des aborigènes d’Australie…un concept intemporel, qui explique les origines du monde. Selon eux, le Dreamtime existe bel et bien, tel un niveau d’existence parallèle au nôtre auquel on peut accéder par le biais des rêves. Cette expérience va bouleverser la vie de David Burton, un avocat chargé d’assurer la défense de cinq aborigènes accusés de la mort de l’un des leurs. Ce fait divers survient alors que l’Australie est frappée par des phénomènes météorologiques inexplicables. La première scène donne le ton. Dans un village reculé de l’Outback, les enfants d’une petite école jouent sous un soleil de plomb. Une averse torrentielle s’abat soudainement, suivie par une chute d’énormes grêlons qui blessent plusieurs écoliers…
Au même moment, la ville de Sidney est traversée par une violente tempête. David Burton (très bon Richard Chamberlain, pour sa seule incursion dans le cinéma australien) rentre chez lui après une journée de travail et la pluie le met dans une sorte d’état second, comme s’il était déconnecté, avant de retrouver ses esprits à son retour chez lui. Se succèdent alors des scènes banales de la vie de tous les jours (le diner familial des Burton) et des visions décalées (la « pluie » dans la maison).
La Dernière Vague est le quatrième long métrage de Peter Weir et pour la troisième fois d’affilée, le futur réalisateur de Witness et du Cercle des Poètes Disparus s’aventurait dans le fantastique en livrant une oeuvre atypique au croisement de plusieurs genres, comme l’étaient Les Voitures qui ont mangé Paris et Pique-Nique à Hanging Rock. La mort qui sert de déclencheur au récit le montre bien : ce n’est pas juste une bagarre nocturne, tout passe par les regards, la peur intense d’un homme qui n’aurait pas du trahir des secrets séculaires. La tension du moment est renforcée par l’apport de la musique de Groove Myers, très importante dans l’élaboration de l’étrange atmosphère.
En prenant habilement le point de vue d’un homme pragmatique faisant l’expérience de rêves prémonitoires, le scénario co-écrit par Peter Weir développe sans être lourdement explicite des thèmes forts, sur les rapports entre l’urbain et le tribal; sur le respect des traditions d’un peuple dépossédé de tout ce qu’il avait par les colons blancs et dont les représentants tentent de garder leur identité dans l’anonymat de la grande ville; sur la place de l’homme face à une nature qui se rebelle.
Le rythme de La Dernière Vague est certes assez lent tout en contribuant à cette ambiance hypnotique et fascinante, magnifiée par l’excellent travail du chef-opérateur Russell Boyd, collaborateur régulier de Peter Weir. Le fantastique bouscule progressivement le quotidien, ce qui est efficacement retranscrit par des scènes inquiétantes qui brouillent la frontière entre les deux mondes, le réel et le « Temps des Rêves », et des prémonitions (l’image est superbe, visuellement marquante) annonçant une potentielle catastrophe…
Dans le dernier acte, le personnage principal entreprend littéralement une descente dans le monde des esprits…avant de revenir à la vie mais peut-être trop tard comme le souligne l’ambiguïté des dernières secondes…