LA GRANDE ÉVASION t.1-8 (Ricard, Gabella, Hanna, Chauvel, Gloris, Jouvray, Lehman, Kris / Thomas, Palumbo, Phillips, Denys, Le Saëc, Brachet, Teague, Martinez)

Il a dû se tromper de pile à lire : il a pris la plus récente au lieu de prendre la plus ancienne.

Tori.

Un moment d’étourderie.

Jim

Dingue … j’ai pourtant annoncé un thème de l’été … ça a dû se perdre au milieu des messages.

Pendant que les filles s’amusaient dans une aire de jeux publique, fallait bien que je m’occupe.

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J’ai pris cet album sur le nom de Kris, mais j’ai lu a posteriori des avis pas très encourageants. Cela dit, j’ai lu ça comme si c’était un film américain du dimanche soir. Et j’ai plutôt apprécié en fait.
Alors, cela se passe en 1900 dans un camp en Sibérie juste à côté du lac Baïkal, où les prisonniers montent les derniers rails du Transsibérien, juste avant le passage inaugural du Tsar.
Evidemment, ces prisonniers veulent s’échapper, et pour cela, ils vont être « aider » par le célèbre bandit Tilman Razine…

Une fois qu’on a dit ça, si on se renseigne un peu, on se rend compte que Kris a pris de grosses libertés sur la réalité de la construction du Transsibérien et du voyage du Tsar. mais qu’importe, cela ne m’a pas préoccupé plus que ça, puisque j’ai pris cela comme un besoin de scénario, pour une histoire qui n’a pas de volonté de vérité historique (loin de là), mais cela dit, les quelques infos précisées sont intéressantes.
Il est vrai également que le trou qui permet aux prisonniers de s’échapper est étrangement très propre, très joliment fait, aux yeux et à la barbe des geôliers (on aurait presque dit une mine de professionnels). Même moi, ça m’a surpris, quand même.
Concernant le scénario peut être alambiqué, disons que Kris a finalement lancé deux évasions distinctes, qui vont finalement se rejoindre. Mais en fait c’est l’une d’elle qui est plus compliquée, préparée plusieurs mois à l’avance. Mais finalement, on est complétement dans un scénario américain, avec des surprises préparées en amont, et moi, j’ai bien aimé. On sent venir certaines choses, il y a un côté faux semblants en permanence, jusqu’au twist de fin, que j’ai senti venir assez rapidement, mais que j’apprécie particulièrement (là aussi, ça a fait l’objet de critiques et de frustration, que je ne comprends pas vraiment). Et je trouve que le titre et la manière de le conter s’y prêtent particulièrement. Je ne peux pas en dire plus pour ne pas divulgâcher, mais j’ai trouvé que dans tout ça, il y avait une pointe de Grande Evasion, une autre de Usual Suspect, avec un léger soupçon de Crime de l’Orient Express.
Et puis les 64 pages, je ne les ai pas faites en 30 minutes, il y a de la matière à lire, une certaine densité.

Je ne connaissais pas Guillaume Martinez et j’ai trouvé que son style réaliste se prêtait plutôt bien à l’histoire. Il ne lésine pas sur les détails, notamment sur la neige qui tombe, qui est juste là, sans envahir les pages. Et j’aime bien aussi l’ambiance nocturne qu’il donne avec les couleurs de Delf.

Bref, j’ai plutôt bien aimé lire cet album, je ne suis pas ennuyé du tout. Pas parfait, avec des facilités scénaristiques, mais qu’importe, ça m’a bien diverti.

Tiens, j’ai lu un Lehman que je ne connaissais (il en reste peu, mais il en reste) et qui est pas mal.

Son Asylum associe l’idée du monde carcéral à celui de la société de contrôle, avec son jeu de références (à Big Brother de manière la plus évidente…) et son lot de mécanismes d’oppression, de contrôle mental et de destruction de tout lien de solidarité. Il y a donc un environnement à la fois futuriste et atemporel, qui parle à tous. Sans doute parce que le scénariste prend la précaution de convoquer des thèmes voisins (l’expérimentation carcérale, l’eugénisme, l’intelligence artificielle, le rapport à l’archivage et à la mémoire…), enrichissant ainsi le propos.

Lehman étant Lehman, on a donc aussi une « ville », avec son passé, ses non-dits, son refoulé, la double personnalité matérialisée par un réseau situé à une autre profondeur. Ça fonctionne franchement bien, et la description d’une structure sociale dans sa géographie et son histoire l’emporte presque sur l’évasion elle-même, au centre de la collection.

L’évasion en tant que telle fonctionne avec la prise de conscience qu’il existe un extérieur (ce qui est un peu divulgâché par le texte de C4) et donc la présence d’un « contact ». Le récit se déroule avec une minutie d’horloger, peut-être un peu trop (la séquence de la cheminée).

Petit bémol (mais j’ai peut-être lu un peu vite), mais je trouve la fin, qui joue sur le temps qui s’accélère, un peu facile, ou peut-être un peu positive. Tous les éléments sont là pour laisser le doute sur ce qui se passe (notamment, le récit s’ouvre sur une porte et se ferme sur une autre porte, indice fort…) et pourtant l’impression est bien palpable que ce que qu’on voit, c’est ce qui se déroule. S’il y a un double sens, alors je n’ai pas été assez attentif.

Jim

N’est-ce pas ?!

Ah, c’est rigolo ça. J’ai dû me refaire la fin deux ou trois fois pour voir si je n’ai rien loupé.