LA PAROLE DU MUET t.1-2 (Laurent Galandon / Frédéric Blier)

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La critique de La parole du muet T.2 (simple - Bamboo) par vedge est disponible sur le site!

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Fils de notaire en province et maladroit compulsif, Célestin décide de quitter le confort familial et de « monter à la ville », fasciné par le cinéma, une industrie encore jeune. Il retrouve Anatole, bonimenteur et aboyeur dans une petite salle qui émarge en diffusant des pellicules érotiques où de jolies effeuilleuses dévoilent leur charme pour un public clandestin.

De fil en aiguille, Célestin parvient à trouver un emploi d’assistant décorateur tout en nourrissant des ambitions de réalisateur. Il réussit également à retrouver l’actrice qui se dénude dans un film qui l’a marqué, Constance, une jeune femme sourde et muette (mais on n’en aura confirmation que vers la fin de ce premier tome, la mise en scène laissant planer le doute), au moment où Célestin, en trichant un peu, s’apprête à faire sa première réalisation, nocturne et à l’insu de tous. Ce qu’il ne sait pas, c’est que des obstacles vont se glisser sur sa route…

Le récit est limpide, classique, rapide, linéaire. L’album se lit assez vite. Les clins d’œil sont nombreux (grand amateur de sucreries, Célestin achète des bonbons en sortant de la gare à Paris, et répand sa bonne humeur en les distribuant autour de lui : mais dans le vendeur de confiserie, doit-on reconnaître Méliès, génie de ce nouvel art reconverti dans le petit commerce après une succession d’échecs ?), ce qui n’est pas étonnant quand on sait que Laurent Galandon, scénariste classé à gauche et curieux de sujets de société, est aussi un fin connaisseur de l’histoire du septième art pour avoir travaillé dans un cinéma dit d’art et d’essai.

Le dessin de Frédéric Blier est très agréable à l’œil. Les personnages sont très expressifs, les décors simples mais présents et profonds, les couleurs donnant une belle matière au trait. Je connais mal son travail, mais sa restitution d’une époque révolue fonctionne à merveille.

Jim

Le tome 2 reprend là où le précédent avait laissé ses lecteurs, au moment où Célestin tourne son premier film. Ce qu’il ne sait pas, c’est que le scénario qu’a écrit Constance, sa jolie actrice sourde et muette, est inspiré de sa propre vie. S’il recrute des figurants dans les différents milieux que lui et ses amis fréquentent, et s’il tente d’être discret, le tournage va réveiller les inquiétudes de certains personnages et l’affaire va s’ébruiter.

Le tournage clandestin est interrompu, l’affaire découverte et Célestin viré, avec ses associés. Si certains parviennent à rebondir, c’est la catastrophe, d’autant que l’apprenti cinéaste est à son tour brouillé avec son actrice. Néanmoins, l’opiniâtreté de notre héros et les informations qu’il rassemble lui permettront de reprendre, toujours de manière illégale, le tournage, d’obtenir des alliés plus imposants et surtout de réparer une injustice.

Loin de ses récits sociaux souvent assez noirs (même si parfois traversés d’espoir), Laurent Galandon livre ici une jolie fable où l’amitié et la rédemption occupe une place centrale, en plus de parler de la jeunesse du cinéma. Il y a dans son diptyque une étincelle optimiste, presque feel-good (que je n’aime pas ce terme galvaudé, mais vous voyez l’idée…) qui fait que le récit aurait presque pu être écrit par Jérôme Félix, tant le sourire des héros est à ce point communicatif. L’album est plus bavard que le premier volet et les révélations successives peut-être un peu trop nombreuses, mais ce tome clôt avec bonheur une chouette évocation de l’entre-deux-guerres et d’un métier qui prend forme lentement, avec son rêve et ses travers.

Jim