En 1953 Greg a tout juste 22 ans et n’a pas encore adopté son nouveau patronyme lorsqu’il se décide à créer dans Héroïc-Albums, sa première grande série, Le Chat, qu’il signe sous le pseudonyme de Michel Denys (son prénom et celui de Denise, sa femme)
Faisant déjà preuve d’une grande personnalité, Greg s’inspire de Jean Valhardi et Batman. Le Chat, de son vrai nom Jacques Bertrand , joue les redresseurs de torts. Ce justicier-détective, collaborateur de Scotland Yard, va vivre jusqu’en 1956, 26 épisodes de 12 pages. Les policiers mitraillés y sont légion; le whisky s’y déguste sans glace et les petites « pépées » s’y montrent plutôt aguichantes !
Michel Greg : Le Chat était un justicier de la nuit mais il n’avais pas de super-pouvoir, il portait une cagoule avec des oreilles de chat ! Son ennemie s’appelait Lady Panthère. Dans Héroïc-Album, Tibet débutait avec Dave O’Flynn et Tillieux se détachait du lot avec Félix ! Un jour pourtant, mon Chat a dépassé Tillieux dans les ventes. J’ai offert le champagne à Tillieux pour me faire pardonner !
Les 26 épisodes du chat seront publiés par BD Must en 4 luxueux volumes , reprenant tous les épisodes du Chat, y compris les nombreux programmes non-stop et les superbes pages d’annonce en bichromie !
Voici donc le premier volume de l’intégrale du Chat, pour la toute première fois en album !
Ce volume 1 de 96 pages comprend les 6 premiers épisodes du Chat de 12 pages chacun , avec une préface historique, ainsi que 16 programmes non-stop et pages d’annonce !
Ça m’intéresse, mais c’est pas donné (d’autant moins quand on voit qu’il y aura quatre albums…) !
Tori.
Voilà, t’as tout dit !
C’est marrant de voir l’influence à la fois de Bob Kane (et son orchestre) et des classiques du strip, genre Milton Caniff et Frank Robbins.
Jim
Ouais je me suis dit la même chose (en moins précis quand même).
Ce n’est que mon avis, un brin partisan certes et nourri de ma moindre connaissance de l’histoire du franco-belge, mais j’ai toujours trouvé que la critique (au sens large) avait minimisé l’influence des comics (qu’ils proviennent des strips ou des books) sur toute une génération d’auteurs hexagonaux. Que ce soit d’ailleurs en matière de thèmes (le Chat ou Fantax, ce sont des super-héros, et il n’y a pas qu’eux) et en matière de dessin. Ça me semble un peu un angle mort de l’analyse, qui est sans doute lié au roman national qu’il fallait construire après-guerre.
Jim
Certains abordent la question, pourtant (souvent sobrement, certes)… Je sais que j’ai déjà lu des trucs sur le sujet.
Et cette influence (des thèmes, du graphisme ou de la structure narrative) est d’ailleurs évidente chez certains.
On peut notamment penser à Jijé ou Morris.
Jijé qui, d’ailleurs, continua les aventures de Superman quand les planches cessèrent d’arriver des États-Unis… Comme Uderzo qui dessina Captain Marvel…
Tori.
Morris n’a pas vécu aux States un temps ?
Si, emmené par Jijé, justement…
Tori.
Pour le Chat de Greg, celui qui dit le contraire est soit de mauvaise foi, soit n’y connait rien.
J’ai l’impression que c’est récent.
Notamment avec la redécouverte, pour un public plus large, de la période américaine de Jijé ou Morris (accentuée par la parution de Gringos Locos). Mais j’ai l’impression que la critique cherchait à traiter le corpus américain de manière indépendante (voir les textes consacrés à la BD américaine dans des revues comme Pogo, Giff-Wiff, Phénix, ou Les Cahiers de la BD, qui présentaient souvent celle-ci comme une galaxie lointaine, en quelque sorte), sans doute dans une perspective post-Résistance et anti-américaine. C’est en tout cas l’impression que j’en garde, sans pour autant m’être replongé dedans bien souvent. Après, peut-être qu’à l’époque ça me paraissait moins évident et donc que j’ai été moins sensible à d’éventuelles mentions.
Par exemple, les reprises (Uderzo et Captain Marvel Jr, par exemple) sont souvent présentées comme un truc qui leur a été imposé, un tour de force et un défi relevé afin de remplir les pages, en écartant parfois le jeu d’influences.
Je trouve ça réellement passionnant de ressortir les « péchés de jeunesse » des grands auteurs franco-belge, qui permettent de mettre en évidence des généalogies de la forme.
Jim
79%.
Jim
93%
Cool.
Jim
107%
Explications de BD Must sur BDGest :
Au début des années '50, l’impression couleur était onéreuse.
Héroïc-Albums imprimait la première page en couleur et le reste en noir et blanc.Le point de trame noir était utilisé pour simuler les ombrages.
Les auteurs indiquaient au crayon bleu sur leurs planches les zones où appliquer un point de trames.
La technique de l’époque (et la nécessité d’aller vite et à moindre frais) implique un point de trame assez épais et imprécis.Ca n’a pas été inventé par Caniff, c’est juste la technologie de l’époque !
(en gros on découpait au stylet-cutter des films tramés et on les recollait sur les films noirs)
Et du coup, en voyant cet original, je me dis que ça équilibre beaucoup les influences : on sent moins Caniff et Robbins (encore un peu) mais davantage Bob Kane et son studio.
Jim
Par la suite, les mangakas sont devenus des maîtres dans la pose des trames (publication en noir et blanc oblige)…
Tori.
Cela reste de l’influence américaine quand même.
Oui oui, mais « moins noble » aux yeux de certains.
Et effectivement, l’absence de trames atténue l’effet « strip ».
Jim