LES CONTES DU 7e SOUFFLE t.1-4 (Éric Adam / Hughes Micol)

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Toho Daisuke vient d’achever sa formation quand il reçoit une lettre de sa sœur. Il se met en route et retrouve cette dernière, qui vient d’épouser un riche seigneur, Aohige. Ce dernier, ayant appris par sa jeune épouse que la lignée est entachée par la sinistre réputation de leur père, propose au jeune samouraï de l’adopter et ainsi, de lui redonner honneur et belle lignée. Mais le héros apprend des choses troubles sur son beau-frère…

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Premier tome des Contes du 7e Souffle, « Aohige » est une reprise détournée de Barbe-Bleue, le fameux conte dans lequel un veuf joyeux accumule les épouses… et les morts. Les deux auteurs profitent de ce décalage pour mettre en scène un Japon médiéval tissé de clichés visuels, mais charmant justement à cause de cette force évocatrice.

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Au dessin, Hughes Micol fait une grande démonstration de sa maîtrise des techniques noir & blanc, jonglant avec les hachures, les aplats noirs et les zones de blanc.

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Au niveau de la narration, les planches recourent souvent à des gaufriers, ce qui est l’occasion de petites prouesses narratives. Notamment la scène où le samouraï compte les tueurs envoyés par le Aohige à mesure qu’il les abat, tandis que sa sœur compte les épouses défuntes qui l’ont précédée. Belle maîtrise.

Jim

Toujours à la recherche d’aventures, Toho Daisuke rencontre une troupe de mercenaires qui l’invitent à les rejoindre, puis un groupe de nains vivant dans la montagne.

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Si le détournement de Blanche-Neige semble ici évident, les auteurs s’ingénient à donner une dimension sociale au récit, le destin des mineurs montagnards prenant des allures de dénonciation du capitalisme forcené.

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Graphiquement, quand Micol place ses personnages dans des décors dominés par le blanc, son travail n’est pas sans rappeler celui d’Eddie Campbell, le registre des hachures étant d’une variété saisissante.

Jim

Je ne connaissais pas du tout, mais tu m’as donné envie.
Surtout si ce sont des récits indépendants !

Alors oui, ce sont des récits indépendants, sortis entre 2002 et 2006, je crois. Et pour ma part, j’ai l’intégrale (qui date aussi de 2006), que je conseille (à condition d’avoir de bons yeux) : c’est au petit format, mais c’est en noir et blanc, et je trouve que ça fait magnifiquement respirer le dessin.

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Jim

Ah ouais, pas mal aussi.
Pour le coup, j’aime bien aussi la couleur, qui donne un côté vieillot, je trouve, qui sied bien au dessin.

De mémoire, j’avais un ou deux tomes. J’ai pris l’intégrale et j’ai offert les deux bouquins, tellement j’étais séduit par le noir & blanc.
La couleur a l’avantage d’être très sobre (presque hellboyenne), et d’accompagner le dessin, un peu comme la colo des Adèle Blanc-Sec de Tardi.

Jim

Et l’intégrale a l’avantage de prendre moins de place …

Bon, vais surveiller ça attentivement …

C’est un argument auquel moi aussi je suis sensible.

Jim

« Ao » signifiant « bleu » et « hige » signifiant « barbe » (ainsi que « moustache », d’ailleurs), ça ffait sens…

Tori.

Dans le troisième tome, le héros, toujours hanté par la réputation ternie de son père, est confronté à un homme dont la rumeur dit qu’il en est l’assassin.

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Parallèlement à cette quête de vérité et d’honneur, le récit propose deux autres trames : une représentation théâtrale mettant en scène un pantin, et un village de pêcheurs lancé à la poursuite d’une baleine (mais rançonné par le brigand que notre héros affronte).

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En filigrane se dessine une relecture de Pinocchio, où chaque intrigue fait écho à l’autre. Toho Daisuke n’est-il pas le pantin lancé sur les traces d’un père fantasmé ? L’imbrication des trois récits donne lieu à des jeux de résonance vraiment intéressant (sans compter les variations sur le gaufrier), et le dessin de Micol, qui se fait dans certaines cases plus réalistes, est de grande qualité.

Jim

Si le troisième tome avait cette petite étincelle existentialiste qui recourait à des métaphores pour parler de la condition humaine, le quatrième développe une sorte d’humour basé sur disproportions et les rapports de force.

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Cette fois-ci, c’est le Vaillant petit tailleur qui est réinterprété à la sauce nipponne (ou japonisante, plutôt). Avec en parallèle une légende à base de géants, le récit met en scène un personnage qui est porté par l’image que les gens ont de lui. Cela fait écho au rôle de la rumeur dans le tome précédent.

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Autre point de cet univers mis ici en avant, l’entourage du héros. À l’image de pas mal de récits initiatiques ou picaresques, le héros continue son chemin, entraînant dans son sillage tout un groupe qui jouent le contraste. Dans ce dernier tome, leur rôle est plus important, posant en creux la question d’un monde de fiction avec, ou sans, son personnage central.

Jim