REALISATEUR
Fritz Lang
SCENARISTES
Jan Lustig et Margaret Fitts, d’après le roman de J.Meade Falkner
DISTRIBUTION
Stewart Granger, Jon Whiteley, George Sanders, Joan Greenwood…
INFOS
Long métrage américain
Genre : aventures
Titre original : Moonfleet
Année de production : 1955
Un film d’aventures réalisé par Fritz Lang ne ressemble à aucun autre. Les Contrebandiers de Moonfleet n’est pas traversé par le même souffle que les autres productions du même genre avec Stewart Granger telles que Scaramouche et Le Prisonnier de Zenda. Le film a son rythme particulier, son atmosphère qui l’est encore plus et un côté « film d’horreur gothique » qui se dégage des premières minutes. Un petit garçon se rend en pleine nuit vers le village de Moonfleet. Près d’un cimetière, il est effrayé par la vision d’une statue aux yeux qui semblent briller (très beau plan d’un métrage qui n’en manque pas) avant de s’évanouir. Lorsqu’il se réveille, une contre-plongée révèle une assemblée de tronches burinées qui observent le jeune arrivant.
John Mohune (Jon Whiteley, un acteur qui n’a connu qu’une courte carrière quand il était enfant) a été envoyé par sa défunte mère auprès de Jeremy Fox, avec qui elle a eu une aventure quelques années plus tôt (on peut imaginer que Fox est le véritable père de John, mais ce n’est jamais confirmé). Jeremy Fox n’est pas ce que l’on peut appeler un modèle pour le gamin qui va vite découvrir que sous ses airs de gentleman se cache le chef d’une bande de contrebandiers…
Pendant toute l’histoire, John va garder très naïvement une véritable confiance envers Jeremy Fox. De son côté, l’aventurier se révèle ambigu, aussi élégant que débauché et frayant dans un monde d’aristocrates corrompus. Mais son attitude cache certainement une profonde blessure car on devine que les choses auraient pu tourner autrement pour lui s’il avait pu poursuivre son histoire d’amour avec la mère de John. Ce qui aurait pu le rendre sympathique…mais il ne l’est en fait pas vraiment (jusqu’à un certain point) car la caractérisation évite le manichéisme.
En prenant des libertés avec le roman, Les Contrebandiers de Moonfleet nous montre l’innocence plongée dans un univers inquiétant et pessimiste. La vie du petit John est souvent menacée et c’est lui qui est le déclencheur des principaux rebondissements. Des péripéties qui replongent alors le spectateur dans le récit de pirates (tunnels sous un cimetière, chevauchées, fusillades, duel, recherche d’un trésor…).
Fritz Lang a toujours eu des difficultés à travailler dans le système hollywoodien et le tournage des Contrebandiers de Moonfleet a connu son lot de problèmes (Stewart Granger a déclaré avoir détesté travailler avec ce « boche »). Une mauvaise ambiance qui n’a pas rejailli sur le film, superbe à tous les niveaux : l’histoire, les relations entre les personnages, les costumes, les décors (le manoir envahi par les herbes des ancêtres de John Mohune est magnifique), le final qui ressemble à un happy-end sans en être totalement un…
Echec à sa sortie en Amérique, Les Contrebandiers de Moonfleet a été redécouvert lors de sa sortie en Europe (les français ont du attendre 1960 pour le voir) et a acquis un statut culte (amplement mérité) avec le temps.