Je me pose aussi plein de questions, depuis longtemps, sur ce que j’appellerais la « géographie horrifique ». Les rapports différents que les Américains et les Australiens entretiennent à la route, par exemple : chez les premiers, c’est l’arrêt en bordure de route (l’escale, la panne) qui est moteur d’action et surgissement d’horreur (de Psychose à Jeepers Creepers en passant par Massacre à la tronçonneuse…), chez les seconds, c’est la route elle-même et le voyage (je songe à Mad Max, ou à un petit film d’horreur avec une sorte de camion hanté dissimulant une usine à viande où sont recyclés les promeneurs malchanceux, son titre m’échappe…).
Et il y a cette idée que je trouve assez fascinante du « suburban gothic », avec toute cette légende autour des banlieues (parfois en construction ou en promotion, comme dans ET ou Poltergeist…) qui a fondé un genre mais aussi rajouté une couche à la psyché américaine (Tim Burton l’a bien compris dans Edward en percutant la banlieue et le château ancestral…).
Or, « liminal », ça vient de « limen », en latin, qui décrit le seuil. Mais aussi la frontière. Et là, c’est intéressant parce que l’Amérique s’est construite autour de cette idée de nouvelle frontière (l’Ouest, la côte, bientôt l’espace…). Et il y a quelque chose à creuser dans l’idée que l’Amérique est devenu un espace clos, étriqué presque, qui va d’une mer à l’autre, qui s’étend sur un continent et tente de sauter vers le haut (les gratte-ciel, les fusées…).
Là, de ce que le résumé et les images peuvent annoncer, cette idée de seuil semble aussi associée à l’idée de l’espace clos, de l’enfermement, et donc d’un dedans et d’un dehors (qui n’est pas la même chose que l’ailleurs).
Ça peut aussi faire écho au sentiment de sécurité lié au chez-soi, qui nourrit un genre là aussi éminemment américain, celui du « home invasion ».
Ouais, la frontière, le seuil, le passage, c’est récurrent dans le fantastique et le surnaturel (la clairière et la forêt, tout ça…), mais aussi c’est fondateur dans le genre western (la ville, le fort : voir le plan sur la porte ouvrant vers l’extérieur dans La Prisonnière du désert). Du coup, l’une des choses qui me fait dresser l’oreille, c’est la présence du nom de René Magritte. Car la thématique me semble profondément américaine, et c’est justement l’exploration au-delà des frontières (!!!) américaines qui me semble féconde.
Bref, intriguant.
Ça va faire l’objet d’une commande chez ma libraire, ça.
Jim