L'ŒIL DE LA NUIT t.1-3 (Serge Lehman / Gess)

Je viens de lire le troisième tome, et j’ai été emporté.

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Le récit distribue plein de biscuits pour fans : il y a la dimension « wold newtonienne » propre au projet, notamment avec la présence du Sâr Dubnotal, les clins d’œil à Fantômas ou Dracula (entre autres), les couleurs de Delf qui naviguent dans les eaux sillonnées par Dave Stewart le coloriste de Hellboy
La narration est d’une nervosité saisissante, avec un sens de l’ellipse impeccable (je conseille d’admirer toute la séquence de poursuite en voiture, par exemple) et plein de petites trouvailles visuelles. Un vrai plaisir, d’autant que le récit est orienté vers une action souriante et débridée, parfait contrepoint à l’angoisse oppressante propre à Metropolis, autre série passionnante de Lehman.

Au niveau du lettrage, si je ne goûte toujours que peu les bulles étirées comme des ballons de rugby que Gess semble affectionner, les calages des textes sont nettement plus convaincants que dans d’autres albums, et l’ensemble est fluide, même si un peu plus de soin aurait été bienvenu.

En lisant ce troisième tome, j’ai davantage pensé à Igor Kordey ou à Richard Corben. Avec quelques compositions qui m’ont semblé des échos de l’Andreas de Capricorne. Mais bref, j’ai trouvé les pages très chouettes.

https://forum.sanctuary.fr/t/capricorne-andreas/29688/2?u=jim_laine

Jim

Tiens,il m’en manque un…

Roooh … dommage, ma liste des choses à lire dans le week end est déjà trop chargée …

L’oeil de la nuit, c’est celui qu’on ne peut pas toujours fermer : qui n’a jamais dit ou entendu « Je n’ai pas réussi à fermer l’oeil de la nuit » ?

Tori.

rimshot

Jim

Je proteste:cette blague m’a bien fait rigoler.

Je l’avais raté à l’époque, mais avec les podcast, il n’est jamais trop tard.
Donc, vous pouvez réécouter l’entretien de Serge Lehman sur France Culture, dans l’émission « La Méthode scientifique », et c’est ici.

Jim

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Jim

On passe donc au suivant (bon, c’est rigolo qu’ils aient été obligé de changé le nom du héros, ainsi que son prénom civil, alors que dans la Brigade Chimérique et l’Homme Truqué, ça n’a pas été nécessaire)

Donc, ouais, un bon « Year One », comme on dirait chez DC. Qui démarre en mettant en route un paquet de protagonistes, pas mal de clins d’œil (comme d’habitude, mais ceux-ci se rapproche plus de ceux de la Brigade que ceux de Metropolis, ce qui est cohérent), ainsi que des clins d’œil du propre corpus de Lehman (au moins un ou deux, dont pour Masqué, ce qui est très rigolo). J’ai lu ça avec délectation, sans trop me préoccuper des références qui servent surtout à fleurir l’histoire et à montrer les caractéristiques de cet univers fantasmé. C’est marrant que l’orientation aille vers les étoiles, alors que la suite (parue avant) ne se préoccupe que de son nombril terrestre. Faut croire qu’on ne pense qu’au ciel que quand le paillasson est propre.
C’est rigolo aussi de voir ce Nyctalope jeune, quand même très différent au niveau du caractère que celui qu’on voit, à la fois dans l’Homme Truqué, mais aussi, bien évidemment, dans la Brigade. Il a vraiment rapidement perdu toute insouciance, pris dans les responsabilités qu’il s’est donné.
Je trouve aussi que Lehman arrive à se diversifier dans ses enquêtes, à jouer sur d’autres références, d’autres styles … bref, j’ai beau enquillé du Lehman depuis 5 à 6 semaines, je ne m’ennuie pas du tout, et j’y trouve une cohérence. Tout n’est pas lié, mais ça se parle vachement bien.
Et puis là, en moins de 100 pages, il y a une sacrée variété d’oppositions, et beaucoup de péripéties.

Pour Gess, je trouve quand même qu’on reconnait son style vu dans la Brigade. Là, les pages sont plus grandes, il y a beaucoup moins de cases, donc possible aussi qu’il ait peut être plus de temps (au-delà de ses potentielles expérimentations graphiques que vous connaissez mieux que moi).

Bref, encore une fois, en belle réussite, mais vous l’aviez dit bien avant moi.

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Eh eh eh, difficile de passer après toi (même 9 ans plus tard).
Bon, il y a moins de variété d’oppositions que dans le tome 1, mais il y a en revanche une variété de narrations qui donne u cpoté histoire dans l’histoire, dans le fond comme dans la forme, avec une réelle volonté de Lehman de rendre hommage à un genre, chose qui était ressenti dans la Brigade, et qui l’est encore plus ici, depuis le début.
J’ai l’impression que Lehman se dégage de toute « pression », si je puis dire, de mettre un engagement, un propos dans son histoire, pour orienter son histoire uniquement sur l’histoire, en fait. Et c’est extrêmement dense, il se passe beaucoup de choses. J’ai avalé d’une traite ce deuxième album, me rendant compte qu’il était quand même 1h30 quand je l’ai fini (et j’avais école ce matin). Et en effet, Théo St Clair évolue, et commence à correspondre au perso qu’il est dans la Brigade. Faut que le passage du cœur humain au cœur mécanique ne peut pas être sans conséquence. Et ça confirme en effet que Lehman ne laisse rien au hasard, qu’il réfléchit aux conséquences de chaque décision qu’il prend pour ces persos. Et oui, il y a une belle brochette de perso secondaire, généralement plutôt attachants. Et avec un peu d’humour et même de la romance (plus que je ne l’aurais cru, d’ailleurs)
Alors, évidemment, pour ça, il faut un dessinateur protéiforme. cela dit, il garde son identité grpahique, quand même. Et sur la partie principale, je trouve que Gess se détache un peu plus du style utilisé sur la Brigade. ça me semble ici un peu plus « réaliste », si je peux me permettre l’expression.

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Oui, c est ça : une histoire dans le monde de

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Bon, je me suis lu ça tranquillement en trois soir, comme un feuilleton. C’est palpitant, en effet.
Je ressens certaines frustrations : il y a plein de clins d’oeil que je n’ai pas vu (enfin, je sais pas lesquels, mais je le sens), et la fin, qui fait clairement écho à la Brigade Chimérique (comme dit plus haut), me fait aussi dire, dans une page suivante, que Lehman donne l’impression que le côté super-héros à la française ressuscité, une touche autrement plus positive que dans la Brigade.
Et puis comme d’autre, j’en aurais bien pris une lampée supplémentaire.

Ah bon ? Dracula ? Ou alors, c’est passé crème et j’ai pas retenu.
Tu saurais retrouver ? La scène des corbeaux sur la fin ?

Tu sais quoi : je me suis dit la même chose. Disons que ça tome 3 me confirme une idée que je me faisais dans le tome 2. En fait, c’est surtout dans sa manière de faire gesticuler lOEil de la Nuit.
En tout cas, les pages sont magnifiques, moins dense que dans ses travaux précédents, et puis c’est très dynamique. ça ne s’arrête pas beaucoup, de l’action pur sucre.

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De mémoire, non. J’essaie de songer à regarder ce soir.

Jim

Merci.

Alors j’ai relu, un peu rapidement certes, pour me remettre tout cela en tête (et c’est toujours aussi bien).
Ce ne sont que des clins d’œil dans les dialogues : Clemenceau qui évoque Fantômas (un peu comme Gordon qui évoque le Joker à la fin de Year One), et un personnage à la fin qui appelle le méchant « Dracula ». Dans le premier cas, un moyen de jouer la carte wold-newtonienne d’un imaginaire de fiction global, dans le second une manière de catégoriser son personnage par rapport à une référence réellement universelle, à mes yeux.

Question dessin, j’ai trouvé que le style de Gess contenait encore des traces d’influences vatiniennes (sans doute voulues) apparaissent surtout dans les représentations de la silhouette féminine.

Il y a un côté assumé chez le héros, qui accepte son sort et en joue même (voir la rencontre avec Clemenceau : c’est batmanien). Et Gess y va également à fond. La scène de la poutrelle d’acier, c’est du Superman. Et puis la fin : la réécriture du temps, l’instant suspendu (qui, finalement, en conjonction avec ce que je viens de dire, a un côté Superman The Movie).

Jim

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Oui, Fantomas, c’est présent dans tout le corpus de ce que j’ai lu en BD (ou quasiment)

Ah, faut que je re-regarde alors. Merci.

Oui oui … même moi je l’ai noté.
(mais un peu Spidey aussi, vu l’échéance du danger)