MALEFIQUE (Robert Stromberg)

Oh bah ça discute, dites-moi !

Non, effectivement, il ne suffit pas qu’une femme règne pour que ça fasse du royaume un matriarcat, mais Maléfique et Stéphane (je l’écris à la française, na !) sont des métonymies des deux régimes, ils les incarnent.

Et je persiste à penser que le scénario (écrit par une femme, si ma mémoire ne m’abuse point, et ce n’est donc pas anodin…) tourne ses regards vers la symbolique médiévale.
Par exemple, il est évident, comme expliqué plus haut, que les ailes coupées, en plus d’être une métaphore sur l’assassinat des rêves, est également une représentation du viol. Bien évidemment. Mais quand elle vole, Maléfique se dresse et transperce des nuages ou des fenêtres, bref, elle perce des parois, elle pénètre. Les ailes lui permettent de rivaliser sur le terrain de l’homme, à savoir la vitesse, la force, la violence. Ce faisant, les ailes s’imposent en attribut phallique. Voilà pour la lecture freudienne.
Mais les ailes permettent aussi une lecture médiévale. Maléfique sans ses ailes, c’est le Roi Pêcheur, blessé à la cuisse et condamné à voir son royaume flétrir. La blessure à la cuisse du « roi méhaignié », c’est là aussi une métaphore sexuelle, bien entendu, mais aussi une métaphore sociale, dans la perspective médiévale, celle du dernier de la lignée incapable de conserver sa fertilité à son royaume. Il n’est pas anodin, là non plus, que le film présente ce benêt de Philippe comme « premier de sa lignée », car le cycle de la gaste-terre est rompu.

Après, on rappellera aussi une chose : le mot « fée », qui n’est plus qu’un nom propre aujourd’hui, était entendu jadis également comme adjectif. Et dans des contrées merveilleuses comme la Lande décrite par le film, tout était « fée », les arbres étaient fées, l’eau était fée, les pierres étaient fées. De là s’établissait un rapport entre les habitants et le lieu, et si les uns étaient touchés, l’autre l’était aussi.

Je ne crois pas que ce soit une erreur de lecture de dire qu’il y a une compréhension de l’imaginaire médiéval dans ce film. Je crois en revanche que ce serait une erreur de lecture, ou en tout cas une lecture incomplète, d’appliquer sur le récit une grille d’explication entièrement « moderne » (à savoir grosso modo freudienne).

Jim

Je partage assez le point de vue de Therru. Voila, comme ça j’ai pas besoin d’en écrire des tartines.

D’un point de vue appréciation, j’ai bien aimé cette réinterprétation du personnage de Maléfique. Elle a vraiment un côté touchant. On est loin du manichéisme des premiers dessins animés de Disney.

Bon, pour une fille qui a reçu une bénédiction de beauté, je la trouve pas terrible Aurore…
Et je la plains la pauvre gamine, parce qu’en 16 ans, les fées n’ont pas progressé en cuisine, ça ne devait pas rigoler tous les jours au moment des repas. Sans compter qu’elles sont totalement irresponsables, c’est criminel de la part du roi de leur avoir confié son enfant.

J’ai relevé qu’à la différence du dessin animé, quand Maléfique est près du berceau, les 3 fées sont qualifiées de bas-peuple alors que dans le DA, c’est la racaille… :mrgreen: Je suis curieux de connaître la différence en VO.

[quote=« Vik »]
Et je la plains la pauvre gamine, parce qu’en 16 ans, les fées n’ont pas progressé en cuisine, ça ne devait pas rigoler tous les jours au moment des repas. Sans compter qu’elles sont totalement irresponsables, c’est criminel de la part du roi de leur avoir confié son enfant.[/quote]

J’aime bien cette description de la féminité incompétente, ça participe à rompre le manichéisme initial…

En VF, c’est encore mieux : elle dit « petit peuple », ce qui porte une polysémie intéressante, renvoyant à la notion de classe sociale, mais utilisant aussi une dénomination pour le peuple fée. Très bien vu.

Jim

[quote=« Jim Lainé »]
En VF, c’est encore mieux : elle dit « petit peuple », ce qui porte une polysémie intéressante, renvoyant à la notion de classe sociale, mais utilisant aussi une dénomination pour le peuple fée. Très bien vu.[/quote]

Alors c’est intéressant tout de même côté traduction, parce que le film reprend la même phrase que dans le dessin animé.

*Royalty. Nobility. Gentry. How quaint. Even the rabble. *

Le Larousse me dit ceci;
la populace, la racaille.

Intéressant comme choix.

Je ne dis pas le contraire, c’est juste que pour ma part, je manque totalement de ta culture médiévale et que je ne saurais te suivre sur le sujet, mais ça reste très intéressant.^^

Juste une chose :

Nom propre ? Pas nom commun ?

Cela permet aussi et surtout de créer un contraste et de donner une raison à Maléfique de s’attacher petit à petit à Aurore, puisqu’elle est « forcée » plusieurs fois de s’occuper d’elle « contre son gré ».

Chacun ses goûts, je trouve personnellement Elle Fanning très jolie. Maintenant, forcément, quand on la compare à La Belle au Bois Dormant du DA, le contraste est flagrant, mais au moins, elle fait vraiment ses 16 ans, là où je donne facilement la vingtaine à l’Aurore du DA.^^

[quote=« Jim Lainé »]
D’autre part, et plus intéressant encore, le film, par le truchement des changements opérés (dans le fameux « schéma actantiel »), remet la femme (les femmes) au centre du dispositif narratif et des enjeux du récit, et en arrive même à chasser, à grands coups de bottes dans le train, le Prince Charmant de l’équation. Ce faisant, il extirpe la femme de son rôle de « demoiselle en détresse » que les contes (Perrault et autres, mais notamment Perrault) lui avaient confié. (…)[/quote]

Voila un article que j’ai trouvé intéressant sur le sujet. L’article va même plus loin dans la réflexion puisque ce n’est pas seulement le Prince Charmant qui est dégagé à grands coups de pompes dans le train, mais également l’Amour (oui avec un grand A, celui qui est sublimé, le premier regard, etc). Chose qui est mise également en parallèle avec la Reine des Neiges, où les mêmes réflexions sur le sujet ont été faites (par contre je ne trouve pas que la chanson « Libérée, délivrée » est un hymne au célibat).

Fife :

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Gabriele Dell’Otto

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Dan Brereton

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