MISÉRICORDE (Jean Van Hamme / Bazin, Dominique Bertail, Aimée de Jongh, Djief, Durieux, Efa, José Luis Munuera)

Miséricorde

Un auteur de polar que ses personnages trahissent. Un tueur en cavale dans un club de parachutistes. Un scénariste qui n’aurait pu imaginer l’histoire d’amour dingue qui lui tombe dessus. Un marchand de pilules qui stoppent le temps. Ou encore une marieuse de la belle époque face à son plus grand défi. Voici quelques nouvelles que le célébrissime Jean Van Hamme a proposé de mettre en images à la crème des auteurs contemporains : Emmanuel Bazin, Dominique Bertail, Djief, Christian Durieux, Ricard Efa, José Luis Munuera et Aimée de Jongh.

Le résultat ? Des petites friandises narratives tour à tour tendres, roublardes, cruelles ou pétillantes, mais toujours surprenantes et écrites de main de maître.

Aucune miséricorde à espérer : vous ne lâcherez pas cet album avant de l’avoir terminé !

  • ASIN ‏ : ‎ B0C8CJ86RY
  • Éditeur ‏ : ‎ DUPUIS (3 novembre 2023)
  • Langue ‏ : ‎ Français
  • Relié ‏ : ‎ 96 pages
  • ISBN-13 ‏ : ‎ 979-1034770687
  • Poids de l’article ‏ : ‎ 788 g

L’idée me séduit.

Dans le numéro récent du Monde consacré à Van Hamme, il y a l’histoire dessinée par Aimée de Jongh. Faut que je la lise.

Jim

Ah, j’ai enfin lu la bande dessinée signée Aimée de Jongh et publiée dans le mag cité plus haut.
C’est très sympa.
Comme expliqué dans le magazine, l’idée vient du fait que Huguette Van Hamme, l’épouse du scénariste, a « sauvé » plusieurs personnages secondaires d’une mort certaine en conseillant à son époux de les épargner. Parfois sous le prétexte du « tu pourrais en avoir besoin plus tard ».

Van Hamme met donc en scène un écrivain discret qui rédige six romans d’aventure populaire, tendance Fleuve Noir, par an, et remporte un succès aussi considérable que régulier. Ses bouquins se vendent très bien, mais il ne se relit jamais, préférant foncer sur le chantier suivant. Dans l’histoire, c’est donc son épouse qui tape les romans avant l’envoi à l’imprimeur.
Et donc, à la faveur d’un séjour à l’hôpital dans le cadre d’une opération bénigne, l’auteur est amené à lire un de ses premiers romans pour tromper l’ennui. Et la surprise est grande, car il découvre que les personnages qu’il avait cruellement sacrifiés s’en sortent in extremis avant de rencontrer l’amour et de partir vers un crépuscule promettant des lendemains heureux. Surpris, doutant de sa mémoire, il part quand même en expédition dans le grenier, en vue de relire les autres romans, y compris des plus récents, dont il garde un souvenir plus frais. Même constat.
Il songe dans un premier temps à une manipulation de son éditeur, connaissant bien les pulsions d’écrivains ratés qui animent souvent ces gens-là. Il est d’autant plus circonspect que ces changements intempestifs n’ont rien entamé au succès de la série de romans, et ont peut-être contribué à leur popularité. De quoi faire tourner les idées dans la tête.
Le dernier opuscule étant achevé et son épouse ayant tapé la dernière page, il part le poster à son éditeur, comme toujours. Mais en chemin, il s’arrête à la terrasse du coin, ouvre l’enveloppe et se met à lire le tapuscrit. Ses doutes se confirment : les changements proviennent de son épouse ! Désarçonné, il referme l’enveloppe, envoie son prochain tome à son éditeur, et rentre à l’heure pour le déjeuner, enlaçant son épouse dévouée comme le font les couples heureux et rescapés des romans qu’il n’a, donc, pas tout à fait écrits.

Bien entendu, à la lumière de l’entretien qui figure quelques pages plus tôt dans le sommaire, on voit bien en quoi cet « ange de misércorde » présenté dans ce récit est un hommage à son épouse, à ses conseils et à son travail solitaire de scénariste. Le choix de faire du plumitif un romancier populaire générant une littérature emplie de sexe, de sang, de violence et de fureur, inscrit également le corpus dans une tradition littéraire popu, celle des tourniquets de gare et des livres de poche aux couvertures affriolantes, celle du Fleuve Noir et des Presses de la Cité, dont le livre Aux origines de la pop culture dresse un paysage éclairant. Il n’est pas surprenant que Van Hamme ait choisi un tel cadre, quand on connaît les débuts littéraires de son héros Largo Winch, d’abord publié dans une collection de roman se revendiquant clairement de cette mouvance. C’est donc tout autant un hommage à la littérature populaire.

Très chouette récit, qui donne envie d’aller découvrir le reste du sommaire.

Jim

Quelques images :

« L’Ange de miséricorde » par Aimée de Jongh :

« Les Dents de l’amour » par Christian Durieux :

« Les Bretelles » par José Luis Munuera :

« Le Piège » par Dominique Bertail :

Jim

Très sympathique recueil, avec des histoires courtes de tonalités différentes (horreur, science-fiction, polar…) et des chutes parfois prévisibles, mais toujours bien amenées.
Rien d’extraordinaire, mais je suis assez client des recueils d’histoires courtes. Ça fait regretter que Van Hamme n’ait pas exploré ce format plus souvent ni travaillé plus fréquemment dans la science-fiction ou l’horreur.
Graphiquement, c’est pas mal, même si on sent parfois certains auteurs sur la retenue : Munuera est bon et efficace, mais on sent qu’il met ses efforts sur d’autres projets plus personnels. J’aime beaucoup les planches de Bertail, différentes de ce qu’il propose ces derniers temps (là, pour le coup, on sent l’envie d’explorer quelque chose) et je découvre le travail d’Emmanuel Bazin, que j’apprécie grandement.

Jim