OPEN WINDOWS (Nacho Vigalondo)

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[quote]DATE DE SORTIE PREVUE

Indéterminée

REALISATEUR & SCENARISTE

Nacho Vigalondo (Timecrimes)

DISTRIBUTION

Elijah Wood, Sasha Grey, Neil Maskell…

INFOS

Long métrage espagnol/américain/français
Genre : thriller
Année de production : 2013

SYNOPSIS

Jill, l’actrice la plus en vogue du moment, refuse de dîner avec Nick, un fan qui a remporté un concours sur Internet organisé par le distributeur de son dernier film. Il est alors contacté par un dénommé Chord, qui se propose de l’aider à suivre les traces de la star à partir de son propre ordinateur. Peu à peu, Nick se rend compte qu’il n’est plus qu’une marionnette dans les mains d’un psychopathe obsédé par son idole…[/quote]

La bande-annonce :

Ah c’est un projet qui m’intéresse : bien casse-gueule à souhait avec son côté « high concept » (une variante sur le found footage…), mais Vigalondo a de l’envergure (son « Time Crimes », même s’il manque un peu de « chaleur », est une étourdissante expérience narrative ; les fans de paradoxes temporels c’est par ici !).

Le casting est intéressant en plus : le décidément très éclectique Elijah Wood, le droopy psychotique Neil Maskell (le tueur de « Utopia » et celui de « Kill List » : il est abonné aux rôles glauquos, le bougre), et la troublante Sasha Grey, qui n’a cependant pas encore fait ses preuves paraît-il en dehors de…euh…son créneau de prédilection.
Je demande à voir, c’est clair.

Bon, drôle de film au final : très intéressant et virtuose à sa manière, mais inabouti quand même au bout du compte. On dira que le film a les défauts de ses qualités, comme on dit : son dispositif original en fait le sel et la limite…

Je passe sur le sous-texte du film, pas inintéressant mais très largement relégué à l’arrière-plan ici, qui évoque la célébrité, les nouvelles technologies et le statut des stars à l’heure de l’ère numérique, avec une touche que je qualifierais de De Palmo-hitchcockienne par là-dessus. Voyeurisme, perversité… : on n’est pas loin du giallo et de ses motifs non plus, on y reviendra ; le film cite de plus très explicitement ses sources : au-delà du titre, une scène rappelle « Fenêtre sur Cour », et la mise en abyme du début avec le faux film carpenterien fait penser au début de « Blow Out » et son film d’horreur cheap.
Ce qui frappe ici, c’est le défi apparemment insensé que se lance Vigalondo en termes de mise en scène : le film est tout entier un plan-séquence qui zoome ou dézoome sur l’écran d’ordinateur du héros interprété par Elijah Wood, au gré de la gestion par les persos des fenêtres qui s’ouvrent ou se ferment.

Quelque part entre « La Corde » de Hitchcock (un film en un seul -faux- plan-séquence), « L’Arche Russe » de Sokourov (un film en un seul -vrai- plan-séquence) et le found-footage, même si le film me semble infiniment plus intéressant que ce qui se fait dans le genre, Vigalondo déploie des trésors d’imagination pour dynamiser son dispositif très statique et rigide sur le papier. Que d’idées ! que d’ingéniosité !! quel travail de dingo sur le script !!! Au passage, Vigalondo trouve aussi des idées formidables pour représenter via la mise en images le principe de mise en abyme du film, ses « emboîtements » successifs (une nana est manipulée par un mec manipulé par un mec manipulé par…mais je m’arrête là), avec un chouette effet « vache qui rit » vers le début, par exemple.

Mais…car il y a un mais…le film a vraiment d’énormes (j’insiste : ENORMES) problèmes de dynamique, conséquences logiques de ce dispositif si particulier. Eh oui : pas de réels découpage, pas de champ / contrechamp ou autre outils narratif propre à capter et amplifier l’attention du spectateur (c’est en ça que le film, s’il peut être qualifié de hitchcockien, s’éloigne aussi de ce modèle classique), même si Vigalondo trouve quelques ruses pour « simuler » ces divers éléments (certains passages rapides d’une fenêtre à l’autre font office de champ / contrechamp par exemple). Du coup, le film est court et pourtant on trouve parfois le temps long…
D’autre part, le scénario pose problème : entièrement conçu pour permettre au dispositif d’exister, il accumule les évènements « arbitraires », rien ne semblant justifier vraiment l’enchaînement des péripéties si ce n’est la nécessité de mettre le prochain enchaînement en place. L’empathie, l’immersion en souffrent évidemment.
Et puis Vigalondo voit peut-être un peu trop gros avec son accumulation de twists tous plus improbables les uns que les autres (le dernier, c’est le pompon, même si le tout reste fun).

Reste de bons acteurs (la belle Sasha Grey, qui s’en sort très bien je trouve, en plus d’être ultra-sexy), voire très bons (Neil Maskell dans un rôle de tueur psychotique qui semble lui coller à la peau, vêtu comme le tueur du fabuleux giallo « Torso » de Sergio Martino ; au passage, Vigalondo semble vraiment obsédé par la veine slasher / giallo).
Un essai courageux et virtuose, mais à la limite du non-cinéma du fait même de son concept. J’ai vraiment envie de voir maintenant l’inédit « Extra-terrestre » pour jauger au mieux les capacités de Vigalondo, maëstro de la narration barrée et ludique…

Je n’irai pas jusqu’à dire « étourdissant ».
(Oui, je suis en train de le regarder, je l’ai sur l’ordi depuis quelques mois voire un an et demi, j’ai dû le choper en lisant ton commentaire…).
Les acteurs sont pas toujours super convaincants, le filmage est un brin mou parfois (mais ça sert bien le propos consistant à faire surgir le fantastique du quotidien), c’est pas impressionnant, mais c’est roublard.
Ce qui est intéressant, c’est qu’on a un personnage qui tente de résoudre le patacaisse laissé en route, mais on a aussi une narration qui présente les faits « dans l’ordre », les uns après les autres, si bien que parfois on a l’impression que ça diverge, puis ensuite on a confirmation que ça s’emboîte.
Du coup, les va-et-vient entre les situations qui merdent et les paradoxes qui les « réparent » créent une véritable tension. C’est plutôt bien troussé et ingénieux.
Se rajoute à cela la construction du personnage, classique dans ce genre de récit discrètement initiatique. Là aussi, la caractérisation est sympa, même si le personnage est un peu froid.
C’est roublard en diable, en tout cas.

Jim

Roublard, c’est le mot. C’est toujours la limite de ce genre de dispositif.
Ce qui est vraiment malin chez Vigalondo (et dans « Time Crimes » notamment), c’est la façon de créer des récurrences et de poser des variations dessus, parfois très subtiles, comme l’usage d’objets identiques dont la fonction change d’une scène à l’autre ; ça fait très Bunuel… C’est vraiment bien foutu et très malin, très ludique. Même si ça n’en fait pas du grand cinéma pour autant.

[quote=« Photonik »]Roublard, c’est le mot. C’est toujours la limite de ce genre de dispositif.
Ce qui est vraiment malin chez Vigalondo (et dans « Time Crimes » notamment), c’est la façon de créer des récurrences et de poser des variations dessus, parfois très subtiles, comme l’usage d’objets identiques dont la fonction change d’une scène à l’autre ; ça fait très Bunuel… C’est vraiment bien foutu et très malin, très ludique. Même si ça n’en fait pas du grand cinéma pour autant.[/quote]

Je crois ne pas bien savoir que c’est, du « grand cinéma », techniquement parlant. Mais sur les objets, ouais, il est rusé. Parfois un objet qui a plusieurs fonctions, parfois deux objets qui ont la même fonction (et un petit sourire ou une expression appuyée permet de comprendre qu’il a raccroché les wagons et contourné l’incohérence potentielle).
Mais en tout cas, son Timecrimes, je l’ai déjà conseillé à deux trois personnes.

Jim