OPUS HUMANO #1-5

L’énorme morceau de ce sommaire, c’est la réédition, d’un seul tenant, de la trilogie L’Empereur-océan, d’Igor Baranko. Le texte de présentation nous apprend que la trilogie a connu plusieurs titres, puisqu’elle a eu droit à une intégrale sous le titre de Jihad et à une traduction sur le marché américain en tant que Horde, titre finalement repris dans ce troisième Opus (et accessoirement sous-titre du premier tome).

Bon, moi, personnellement, Baranko, je n’ai jamais tenté : entre le dessin que je trouve trop minimaliste, m’évoquant une sorte de Carlos Ezquerra sans profondeur, et le sentiment qu’il jongle avec la quincaillerie jodorowskienne, je n’ai jamais fait le premier pas.

D’une certaine manière, je ne suis pas déçu : c’est du Jodo qui n’en porte pas le nom. On est dans un monde slavo-post-soviético-apocalyptique, entre Russie et Ukraine (d’où vient Baranko) de demain, hanté par ses démons culturels et ses obsessions impérialistes. Là-dessus, on suit un militant tchétchène en quête d’une matérialisation céleste sur Terre, une réincarnation de Genghis Khan (et ancien romancier de science-fiction) confronté à son double féminin (et dénudé), des clones de figures historiques, des vétérans sans tête et des sorcières tantriques vampirisant la force vitale.

La structure, rappelant par exemple Le Cercle rouge, s’articule autour du parcours (tant géographique que psychologique) de chacun, convergeant vers une rencontre inéluctable. Tout le bazar de forain à la Jodo est convoqué, mais il y a dans l’écriture de Baranko quelque chose de plus frontal que dans l’œuvre du gourou chilien. Point de roulement des mécaniques genre « regardez comme je suis malin avec mes symboles de pacotille ». Au contraire, Baranko semble ne pas vouloir établir de distance entre ce qu’il raconte et ce qu’il mobilise en provenance du chamanisme et autres manifestations ésotériques. C’est presque premier degré, rendant l’ensemble assez accessible.

Et tant mieux, parce que le récit n’est pas simple : les multiples rencontres, l’entassement des personnages, les scènes de rupture qui donnent des indices mais ne font que brouiller les pistes, tout cela contribue à tricoter un récit qui demande un peu d’attention. C’est une bonne surprise dans le sens où Baranko livre du Jodo agréable. Ça reste tout de même un ovni avec une bonne dose de non-dit qui conduit à se demander ce que l’auteur a bien pu vouloir dire.

Jim

2 « J'aime »