POLTERGEIST (Gil Kenan)

Voici les premières images de Poltergeist, le remake du classique de Tobe Hooper et Steven Spielberg qui connut un grand succès en 1982.
Cette version moderne, qui verra une nouvelle famille affronter des esprits maléfiques dans leur maison de banlieue, est produite par le duo Sam Raimi & Rob Tapert.

La bande-annonce :

La nouvelle bande-annonce :

Alors bon, je sais pas. Y a des images super, la gestion de l’écran avec les mains est ingénieuse, mais je crois qu’une partie du charme du vieux Poltergeist, c’est justement cette petite touche Spielberg, l’aventure familiale teintée d’humour avec du gore qui ne dépasse pas tellement le stade du clin d’œil (la piscine pleine de cadavres, c’est comme les « gâteaux secs » dans le deuxième Indy, quoi…). Là, passer à la vitesse supérieure, je sais pas, je suis pas convaincu. Mais ça a l’air bien compétent, en termes d’images.

Jim

Voilà bien une grosse lacune dans ma culture cinématographique : je n’ai jamais vu le « Poltergeist » de Tobe Hooper et Steven Spielberg, pour ma part…

Tiens, c’est étonnant.
Je pense que ça t’intéresserait.

Pour ma part, j’y vois deux choses :

  • d’une part le glissement du gothique américain (à la suite des sitcom sixties genre Ma Sorcière bien-aimée et d’autres) depuis les châteaux de familles de colons jusqu’aux banlieues-champignons
  • d’autre part la collision entre l’imaginaire classique de la maison hantée avec le monde de l’enfance à la Spielberg.
    Le tout agrémenté d’un jeu constant de l’image dans l’image (le miroir, la télé, la caméra…), truc éminemment spielberguien (l’extrémité de la ligne directe qui conduit à Super 8, pour résumer).

Et y a un truc que moi, personnellement, j’adore, dans cette mouvance à la Spielberg, c’est que la famille est unie. Souvent, chez Spielberg réalisateur, les parents sont largués. Dans E.T., c’est frappant : ils ne comprennent rien, ont plusieurs trains de retard, regardent toujours au mauvais endroit (et dans Rencontre, c’est l’inverse : les parents abandonnent quasiment leur famille pour suivre leur vision et/ou retrouver leur enfant).
Là, au contraire, la famille est serrée, attentive, elle fait corps, toute la dynamique du truc c’est justement de se retrouver, de ne pas défaire les rangs. De là, ça fait des parents et des enfants qui sont attentifs, qui réagissent vite, tout ça. Rien de dysfonctionnel, et pourtant le drame et la tension dramatique sont là.
J’aime beaucoup.

Jim

Bon, alors ça risque pas de faire oublier le premier.
Cela dit, c’est pas mal fait. Mais un peu scolaire et très balisé. Le filmage prône l’efficacité avant tout, donc il n’y a pas d’idées nouvelles, seulement des recettes éprouvées, dans la mesure où mes faibles connaissances en matière de cinéma peuvent les renifler. À part peut-être la main en ombres chinoises qui se découpent sur l’embrasure de la porte du placard qui s’éloigne, petit instant qui retrouve l’atmosphère de déspatialisation du film de 1982.
En revanche, la chose intéressante, c’est l’injection de technologies de communication (tablettes, ordinateurs, smartphones…), qui multiplient les écrans, et donc les interfaces entre le monde réel et l’au-delà menaçant qui frappe les enfants de la famille. En guise de clin d’œil aux prises de vue, il y a même un drone. Sans oublier la référence à l’électro-sensibilité. Modernisation quand tu nous tiens.
Celle-ci est assez sympathique. Là encore, beaucoup de clichés (difficultés financières, trois enfants d’âges différents avec chacun leurs problèmes…), mais Sam Rockwell compose un père facétieux et presque plus gamin que ses mômes, faisant les pitreries les plus grossières afin de masquer son désarroi et sa fragilité.
Dans l’ensemble, ça reste un film de maison hantée « grand public », avec ses passages obligés. Des portes qui claquent, des grincements, tout ça. Le film met du temps à retrouver les petites touches d’humour du premier, et souvent, on sent le copier-coller (si l’on connaît l’ancienne version). Reste quelques bonnes surprises : la coulée de boue dans la buanderie, la suspension du temps dans l’escalier, les lumière qui quittent les ampoules et se baladent au plafond… La scène du clown est vraiment bien. Mais parfois, le film prend le parti d’être trop démonstratif. Dans la première version, l’arbre est une forme qui bouge, menaçante et presque informe. Dans celui-ci, ses branches prennent clairement la forme de mains ou de griffes. C’est un peu trop clairement énoncé.
Bref, l’ensemble fait un remake pas honteux mais sans innovation d’un film marquant, et un film de maison hantée qui ne bouleversera pas le genre, malgré quelques moments flippants comme il faut (la perceuse).

Bon, à part ça, je viens de découvrir l’existence d’un troisième volet à la saga d’origine. J’ai le souvenir d’avoir vu le deuxième (mais de ne pas tellement m’en rappeler), mais le troisième, je suis sûr de ne pas l’avoir vu. Quelqu’un l’a vu ?

Jim

Alors j’ai revu le deuxième volet et découvert le troisième, récemment.
Bon, c’est loin d’être médiocre, mais c’est carrément inférieur au premier.
Le second volet suit la famille de Carol-Ann dans leur nouveau domicile, poursuivi par l’esprit maléfique du fameux cimetière souterrain sur lequel leur première maison avait été bâtie. Je me souvenais surtout de la scène de la téquila, et du monstre (dessiné par Giger à distance, représenté par l’un de ses assistants, si j’ai bien compris). L’intrigue traîne un brin (quarante minutes avant qu’il se passe des trucs…) et la résolution est assez datée, très eighties (des scènes oniriques dans un « ailleurs » fait de nuages, on se croirait dans L’Exorciste II). C’est pas mal, mais rien de génial, ça vieillit assez mal.

Le troisième volet, je le découvre. C’est niveau téléfilm, mais plutôt de qualité. La petite Carol-Ann, qui a de plus en plus l’air d’un de ces gamins blonds échappés du Village des Damnés, est accueillie par la famille d’une tante dans une appartement situé en haut d’un gratte-ciel de New York. On change donc de lieu, mais la gamine est poursuivi par les entités maléfiques, et la psychanalyse sous hypnose qu’elle suit ne fait que réactiver le lien qu’elle entretient avec l’autre monde. Bref, classique, avec une ambiance un peu à la Audrey-Rose, ce genre de choses, dans des décors fait de verre et d’acier.
Là où ça tourne plutôt bien, c’est sur la gestion des effets spéciaux. Le scénario prend le parti de renouer avec le film de base, en cherchant des surfaces réfléchissantes servant d’interface entre le monde réel et le monde de l’au-delà. Et le choix se porte sur les vitres et les glaces qui parsèment l’immeuble. Et il y a une tétrachiée de plans super ingénieux, présentant la réalité et le reflet de celle-ci, dans lequel s’immiscent les créatures surnaturelles. Beaucoup de plans recourent à des doublures tournant le dos à la caméra, mais ça n’empêche que c’est saisissant et très finement joué.
C’est plutôt une bonne surprise, et si l’on considère que ce n’est qu’un téléfilm, il a le mérite de tirer un profit intéressant de son petit budget et de renouer avec les fondements du premier film, là où le second volet s’était un peu égaré.

Jim