RONIN (Frank Miller)

J’ai lu ça y a 12 ans (merci Semic) et je ne pensais pas que ça datait de 1983 ! Je voyais ça beaucoup moins vieux !
Et je ne pense pas que la décennie de comic books qui vient de passer l’ait vieilli tant que ça !

Je ne sais pas, je n’ai plus que le TPB VO souple sans supplément (j’ai offert les six tomes de Zenda à Munaro, il y a quelques années…).

Tu sais à qui tu me fais penser ? À moi vers 1988-1989 quand je disais pis que pendre de Moebius. J’aimais pas Moebius (et j’ai encore du mal avec plein de choses de sa production, je préfère largement Giraud, si tu vois ce que je veux dire). Mais j’ai appris à comprendre ce qu’il cherche à faire, ses explorations, ses expériences.
Je parle de Moebius, parce que chez lui aussi on trouve des formes « grotesques », presque oniriques, hybrides, qui s’accouplent, se déforment, se greffent les unes aux autres. Des protubérances qui ressemblent à des ballons sortant d’une tête, des choses comme ça. L’approche au trait, avec une seule épaisseur pour toutes les choses (les rochers, les humains, les oiseaux, le vent, les nuages), tout ça, je ne comprenais pas.
Là, chez Miller, on a des structures mécaniques qui génèrent des membres, des griffes, des mains, des corps, qui s’imbriquent, on dirait parfois la Chose du film de Carpenter, qui accole des organes les uns aux autres sans rapport réel.
Aujourd’hui, Moebius, c’est toujours pas mon délire, du tout. Alors que Miller, si. Mais Moebius, j’ai appris à le regarder. Et en fait, ce que j’ai appris, c’est à sortir de mes codes et de mes références, et à essayer de comprendre comment aborder Moebius pour ce qu’il est, pas pour ce qu’il me pousse à ressentir.

C’est plus « classique » dans l’approche. C’est beaucoup moins une expérience visuelle / esthétique / narrative. Même si c’est très bien, d’un très haut niveau. Mais d’extérieur, au fameux « premier abord », c’est plus facile.

Tu parles des épisodes dans Dark Knight ?
Tu trouves une différence de style entre le deuxième et le troisième ?
Diable, ça ne m’a jamais apparu aussi frappant que ça. Va falloir que je regarde.

Ronin, je suis resté sur le cul, positivement, mais avec la sensation qu’il se passait quelque chose et que je ne comprenais pas tout. Il me semble (mais je ne suis pas sûr) que j’ai découvert son Daredevil #191 un peu après. Et c’est la découverte de cet épisode, encré par Terry Austin, qui m’a fait comprendre que les hachures, les trois-quarts anguleux, tout ce qui est présent dans Ronin, c’était présent dans le dessin de Miller, mais très adouci par Janson. Et en découvrant ce chaînon manquant, j’ai mieux compris ce qu’il faisait dans Ronin (la découverte des mangas aussi m’a aidé, bien sûr).
Aujourd’hui encore, Ronin, ça m’impressionne. Je l’ai relu l’année dernière, et ça m’a cloué une fois de plus.

C’est sorti entre mi 1983 et mi 1984. Je trouve l’ensemble assez tenu pour un projet qui a mis un an de réalisation. On sent, sur la fin, qu’il part vers une narration un poil différente (gaufrier, moins de hachure et plus de noir…), mais c’est quand même super cohérent d’un bout à l’autre.

Jim

J’ai lu Ronin pour la première fois il y a une dizaine d’années (pareil, merci Semic)
C’est une oeuvre que j’apprécie de plus en plus à chaque re-lecture, elle est trés ambitieuse et marque une vraie évolution dans la carrière de Miller.

Pour l’anecdote, je me souviens qu’à la lecture de l’épisode 1, quand le Ronin tue Agat sur une double page j’ai hurlé "Rob Liefeld, espéce de salopard !!! :stuck_out_tongue: "

Je vous l’ai envoyé :wink:

Personnellement sur Moebius, mon avis diffère. Il y a bien une utilisation de formes grotesques mais tu as toujours d’autres parties de l’illustration qui permet de trancher le grotesque avec quelque chose de plus « propre ».
Avec Miller, il fait le choix de faire des dessins qui utilisent un style de manière très tranché, c’est un style qui cherche à transmettre des sentiments (bons ou mauvais). Du coup, sur Ronin, il abuse du grotesque et par conséquent ça m’hérisse les poils. C’est comme un chat avec le citron, c’est quasi animalier.

C’est complètement ça.
Janson parle de dessin « expressionniste », en ce sens qu’il utilise la déformation afin de faire passer un sentiment. Miller dit, grosso modo, qu’il ne cherche pas à faire joli, mais à faire beau, ce qui implique qu’il n’est pas à la recherche d’une représentation académique, idéalisée ou esthétisante, mais plutôt qu’il privilégie la signification, l’impact.
Au final, tu es beaucoup plus réceptif à Miller que tu ne le penses.

Jim

Frank Miller’s Rōnin sketch (2020)
[Frank Miller joined Jim Lee’s 60-sketches-in-60-days fundraising drive to contributing his daily sketches to benefit the Book Industry Charitable Foundation (Binc).]
Art by: Frank Miller

Jim

Un director’s cut ?

Ah, c’est vrai, j’oubliais qu’il y a des gens qui ne parlent pas la langue des maîtres du monde.

En gros, pour résumer, Jim Lee organise une opération de dessins à but caritatif, il en réalise plein, et des copains se joignent à lui (ce matin, j’ai vu passer un dessin de Sienkiewicz). Miller en fait partie. Je crois que les petits monstres en crayonnés par Mignola font partie de cette opération, aussi.

Jim

C’est un vieux sketch, je suppose ?

Qui ça ?

Tu sais, en Amérique, ils utilisent les mêmes chiffres que nous.
Et le même calendrier.

Jim

Ah ouais, c’est un vrai de 2020 ???
J’osais pas le croire tellement il est beau !
(et je t’avoue que je suis toujours méfiant sur ma compréhension de mots anglais agglomérés)

Voui voui.

Y a de très belles choses dans la production récente de Miller.

Frank-Miller-Kamandi-Challenge

Moi aussi.
:wink:

Jim

:heart_eyes: :heart_eyes: :heart_eyes: :heart_eyes: :heart_eyes: :heart_eyes:

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The last panel is an original art paste-up. Underneath Miller has drawn an unfinished panel. Presumably he wasn´ t quite satisfied with the first version and went on to draw a new portrait of the vengeful Ronin.

Jim

Cover by Frank Miller. In this issue: first look at Frank Miller’s Ronin and a « frank » interview !

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